Législatives : le poids des partis alternatifs

Le gouvernement comme l’opposition sont confrontés à une crise de confiance. C’est du moins ce que révèle le dernier sondage d’Afrobarometer réalisé par StraConsult. 57 % des sondés n’ont aucune ou pratiquement aucune confiance dans le Premier ministre et 63% font peu ou pas du tout confiance à l’opposition. Comment interpréter cette posture ? Est-ce à dire que la prochaine joute électorale laissera plus de chances aux partis non-Mainstream ?

- Publicité -

Les chiffres du sondage n’étonnent guère l’observateur politique, Faizal Jeeroburkhan. « Leur discours dans l’opposition et leur discours une fois au pouvoir sont diamétralement contradictoires. Ils n’hésitent pas à vendre leur âme et conscience au plus offrant pour un fauteuil ministériel », dit-il. Il pointe par ailleurs l’ingérence politique dans les institutions publiques « où la corruption et les passe-droits savamment dissimulés sont devenus la normalité. Comment ne pas avoir une crise de confiance dans un tel environnement politique ? ». Pour autant, il n’est pas d’avis que les partis alternatifs auront plus de chances au vu du système électoral favorisant le bipartisme. Il n’épargne pas non plus les citoyens qui s’intéressent, dit-il, davantage à la politicaille plutôt qu’aux vrais enjeux économiques et sociaux. La balle est ainsi dans le camp des électeurs « qui détiennent les cartes maîtresses pour forcer les politiciens à revoir le système en leur faveur ».

Padma Utchanah, de Linion Moris, explique cette situation par le fait qu’il n’y a pas eu à Maurice, « de véritables hommes d’État mais que des hommes politiques qui n’ont fait que de la politique et pas la mise en œuvre d’une vision pour l’émergence d’une nation ». Dans les années 70/80, le Mauricien s’engageait en politique sur la base d’une certaine idéologie politique. Aujourd’hui, pour elle, « l’homme politique n’a aucune ligne de conduite. Il peut du jour au lendemain s’allier avec le pire adversaire pour des intérêts personnels. C’est une constante finalement de trahir sa posture. Cette pratique a dégoûté l’électorat de la chose politique, la considérant comme sale ». Elle voit ainsi le besoin d’incarner une alternative et est convaincue que cette élection ne ressemblera à aucune autre élection. « Une autre page de l’histoire va s’écrire », prévoit-elle.

- Publicité -

De son côté, Stefan Gua, de Rezistans ek Alternativ, observe qu’aujourd’hui, ce ne sont pas des idées politiques qui sont proposées au peuple « mais la question se focalise davantage sur qui a moins de squelette dans son placard ». Se voulant réaliste, il reconnaît que ce ne sont pas uniquement les idées qui font le poids dans la sphère politique. « Il y va aussi de l’argent. Souvent, les partis émergents se retrouvent à la traîne faute de gros moyens pour rivaliser face aux plus grands partis disposant d’un financement émanant souvent du monde Corporate qui influence grandement les élections à Maurice ». Ce qui l’induit à conclure qu’il n’y a pas un parti autre que les mainstream aujourd’hui qui peut se positionner en vrai challenger. Néanmoins, il invite à ne pas voir dans cette perte de confiance une fatalité : « Au contraire, cela ouvre la voie aux nouvelles propositions ».

FAIZAL JEEROBURKHAN: « Les électeurs ont les cartes maîtresses
pour à revoir le système »

- Advertisement -

Le dernier sondage d’Afrobarometer réalisé par StraConsult révèle que le gouvernement et l’opposition sont confrontés à une crise de confiance. 57 % des sondés n’ont aucune ou pratiquement aucune confiance dans le Premier ministre et 63% font peu ou pas du tout confiance à l’opposition. Votre lecture ?
Cette crise de confiance dans la classe politique est le résultat d’une perversion continuelle de la politique locale depuis l’indépendance, une dégradation qui s’est considérablement accélérée durant les cinq dernières années. La politique a perdu ses lettres de noblesse. Pour nombre de politiciens, elle est devenue un moyen rapide pour s’enrichir scandaleusement avec l’argent des contribuables tout en clamant sans gêne qu’ils sont les plus fidèles serviteurs de la nation.

Cette décadence politique est attribuable aux partis politiques traditionnels qui fonctionnent comme des autocraties dynastiques obsédées par la prise ou le maintien du pouvoir. Pour arriver à leurs fins, ils n’hésitent pas à mettre en danger l’économie et le tissu social du pays. Leur intérêt personnel et celui de leurs partis passent bien avant l’intérêt du pays. Ils utilisent habilement des slogans creux, de belles promesses électorales et de beaux discours politiques en faveur de la démocratie, de la bonne gouvernance, de la justice, de la liberté, de l’équité, etc. pour amadouer les citoyens.

Ils promettent de mener un combat acharné contre la pauvreté, la fraude, le népotisme, le favoritisme, la corruption, le gaspillage, la drogue etc. Mais, une fois au pouvoir, ils font exactement le contraire. Ils abusent de la bonne foi des citoyens qu’ils considèrent comme des imbéciles incapables de réfléchir intelligemment. Ils s’adonnent à l’ingérence politique à outrance dans les institutions publiques et ils manipulent ignoblement les médias publics en leur faveur.

Leur discours dans l’opposition et leur discours une fois au pouvoir sont contradictoires. Ils n’hésitent pas à trahir leurs mandants et à vendre leur âme et conscience au plus offrant pour un fauteuil ministériel. Ils ont transformé le parlement, temple de la démocratie, en tombeau de la démocratie. Ils s’ingèrent obstinément dans l’administration des institutions publiques où la fraude, la corruption et les passe-droits savamment dissimulés sont devenus la normalité. Comment ne pas avoir une crise de confiance dans un tel environnement politique ?

Cette crise de confiance donne-t-elle plus de chances aux partis alternatifs pour ces élections ?

En principe, cette crise de confiance devrait propulser les partis alternatifs à l’avant-plan. Cependant, notre système électoral, basé sur le principe du FPTP, sans la Proportional Representation (PR), qui favorise le bipartisme, est un obstacle de taille. Il y a encore la méfiance des électeurs envers les nouveaux politiciens qui se font connaître à la veille des élections sans une assise politique solide au sein de la population.

Certains de ces partis ont proposé des programmes bien travaillés pour assainir et relancer l’économie, combattre les fléaux sociaux, promouvoir la transparence et la bonne gouvernance et d’autres projets capables d’améliorer la vie des citoyens. Malheureusement, la plupart des citoyens et même les médias sont davantage concernés par la politicaille que par les vrais enjeux économiques, sociaux et environnementaux des programmes électoraux des partis.

Une partie non-négligeable de la population se laissera certainement influencer par les nombreuses mesures électoralistes et autres appâts bien dosés pour les berner. L’alliance au pouvoir dispose d’un War Chest titanesque pour exécuter cette sale besogne. De plus, elle utilisera tous les leviers du pouvoir aussi bien que les associations socioculturelles pour faire basculer les résultats en sa faveur.

L’alliance de l’opposition parlementaire dispose aussi d’un électorat fidèle à sa cause. Il capitalisera sans doute sur le mécontentement généralisé dû à l’augmentation du coût de la vie, aux nombreux scandales politiques et à la mauvaise gestion des affaires du pays durant les cinq dernières années. L’issue finale repose sur la culture et la maturité politique des électeurs. Se laisseront-ils leurrer par les cadeaux empoisonnés à court terme ou voudront-ils opter pour des changements systémiques et structurels, conditions sine qua non pour un pays plus prospère, surtout pour les générations futures ?

Quels sont les points forts et les points faibles des partis alternatifs ?

Les partis émergents ont une série d’atouts : ils sont jeunes et donc plus idéalistes, entreprenants et dynamiques. Ils sont animés par le désir de changement, ils ont des idéologies nouvelles, des projets de société novateurs, des modèles de développement durables et soutenables etc. Ils ne sont pas assujettis aux dynasties politiques. Ils ne traînent pas de casseroles ; ils n’ont pas d’ancrage communal ou castéiste. Ils sont très concernés par l’Etat de droit, la démocratie, la méritocratie, la bonne gouvernance, le combat contre les fléaux sociaux, etc. Ils refusent de s’accommoder à l’oligarchie économique en place et aux groupements socioculturels pour leur survie politique.
Toutefois, ils sont peu connus des électeurs qui n’arrivent pas à jauger leurs expériences, compétences et maturité politiques. Ils arrivent difficilement à s’entendre entre eux et ils refusent de se regrouper en une force unique même s’ils ont essentiellement les mêmes philosophies et démarches politiques.

Finalement, ils n’ont pas les moyens financiers et logistiques adéquats pour se mesurer équitablement aux partis traditionnels.

En conclusion ?

Il faut impérativement repenser la politique locale et réformer le système. La politique débridée de ces dernières années a pollué les mœurs et le comportement des citoyens qui s’exhibent de plus en plus comme des assistés et des roder bout insatiables. Les citoyens pensent avant tout à leurs intérêts personnels et font fi de l’intérêt de la collectivité et de la nation, comme les politiciens.

Les électeurs détiennent les cartes maîtresses pour forcer les politiciens à revoir le système en leur faveur. Malheureusement, ils acceptent d’échanger ces précieuses cartes pour quelques menus cadeaux électoraux utilisés comme appâts par les politiciens malhonnêtes qui veulent absolument maintenir le statu quo. Dans notre démocratie représentative, les citoyens n’ont que le jour du scrutin pour exprimer leurs opinions. Pendant les cinq années qui suivent, ce sont les politiciens élus qui décideront de leur sort. Les citoyens n’ont pas développé la culture de descendre en masse dans la rue pour exprimer ouvertement leurs mécontentements quand cela devient nécessaire. Dans ce contexte, l’éducation civique et politique des électeurs aussi bien que des étudiants est devenue une nécessité absolue.

PADMA UTCHANAH (Linion Moris) :« Il nous faut incarner une alternative »

Le dernier sondage d’Afrobarometer réalisé par StraConsult révèle que le gouvernement et l’opposition sont confrontés à une crise de confiance. 57 % des sondés n’ont aucune ou pratiquement aucune confiance dans le Premier ministre et 63% font peu ou pas du tout confiance à l’opposition. Votre lecture ?

Ce sont les résultats de notre pratique politique, hélas. Il y a deux facteurs à cela. D’un côté, il n’y a pas eu à Maurice de véritables hommes d’État mais que des hommes politiques, qui n’ont fait que de la politique et pas la mise en œuvre d’une vision pour l’émergence d’une nation, pour que le citoyen ait une bonne conscience politique.
D’un autre côté, l’homme politique n’a aucune ligne de conduite. Il peut du jour au lendemain s’allier avec le pire adversaire pour des intérêts personnels. C’est une constante finalement de trahir sa posture. Cette pratique a dégoûté l’électorat de la chose politique, la considérant comme sale. Un ressenti surtout observé chez les jeunes.

Cette crise de confiance donne-t-elle plus de chances aux partis alternatifs pour ces élections ?

En théorie pure oui, mais en pratique c’est très complexe. L’électorat mauricien est prisonnier d’un système. Navin Ramgoolam a doublement été sanctionné en 2014. Il a perdu les élections et a été personnellement battu dans son fief historique. Nous mesurons tous l’ampleur de la défaite. Cette double défaite a été reconfirmée en 2019. Il a perdu les élections et a été battu personnellement encore une fois. Qu’est-ce qui ferait que, tout d’un coup, ce même peuple estime qu’il est maintenant « bon » pour diriger encore le pays. Parce que l’actuel Premier ministre aurait fait pire que lui ?

Oui, les partis ou groupes émergents sont confrontés à de multiples difficultés. D’abord, il y a la division et les ego. Nous aurions tous dû nous entendre, avoir un programme commun. Linion Moris a démontré que nous pouvons le faire sur l’essentiel. Il faut rappeler que Linion Moris regroupe six partis et que cela fait dix mois que nous travaillons ensemble.

Il faut le dire, le militant politique est presque mort à Maurice à quelques exceptions. Nous ne sommes plus dans les années 70/80 où le Mauricien était engagé en politique sur la base d’une certaine idéologie politique. Aujourd’hui, le militant, au sens politique du terme, est un salarié. C’est quelqu’un qu’on doit rémunérer, directement ou indirectement.

C’est un fait. Les partis paient les militants. Il y a par conséquent le phénomène de l’argent. Il n’y a aucun contrôle effectif des dépenses électorales. Les grosses machineries politiques vont arroser les électeurs. Venons-en au financement. Avant, il y avait le financement par le gros capital. Ça existe encore. Mais aujourd’hui, le gros du financement est issu de la corruption et du trafic de drogue… en toute liberté !

Pensez-vous que les partis alternatifs peuvent faire le poids pour renverser la vapeur et apporter un nouveau souffle à la politique ? Nous dirigeons-nous vers un renouveau ou sont-ce toujours les ‘dinosaures’ qui seront élus au final selon vous ?

Les partis émergents multiplient les efforts. Ce sont eux qui assurent tout le travail de l’opposition. D’ailleurs, c’est le cas de Linion Moris. Nous sommes l’opposition. Sauf, qu’il y a deux phénomènes qui jouent contre nous : le vote par défaut et par extension le vote utile. Prenons l’affaire Kistnen. C’est Linion Moris qui mène un véritable combat là-dessus. Nous avons exigé une commission d’enquête pour sortir de cette affaire aux crimes multiples. L’actuel gouvernement tombera fort probablement à cause de cette affaire.

L’opposition parlementaire, aux pratiques plus ou moins similaires par le passé, ne peut recueillir les fruits de notre travail. Pour cela, il nous faut être cohérents avec nous-mêmes. Nous avons le devoir de faire une opposition forte, frontale, sans concession d’une part. Comme le MMM dans les années 70/80 lorsqu’il émergeait. Il faisait l’opposition tant à l’encontre du gouvernement que de l’opposition parlementaire du PMSD. D’autre part, il nous faut incarner une alternative. Nous devons pouvoir parler et rassurer toutes les couches de la population. Chez Linion Moris, nous sommes persuadés que cette élection ne ressemblera à aucune autre élection. Une autre page de l’histoire va s’écrire.
Quels sont les points forts et les points faibles des partis alternatifs ?

Les points forts, c’est de voir les problèmes des Mauriciens en face : le pourrissement ou mauvais fonctionnement des institutions. L’électorat mauricien est très conservateur. Il faut proposer des changements sans le brusquer. Le point faible des partis alternatifs c’est de ne pas avoir une machinerie, une structure bien ancrée dans toutes les circonscriptions. Il y a le gros problème du financement. Contrairement aux autres, nous vivons de notre travail et nous faisons parallèlement de la politique. En face, nous avons des rentiers de la politique. Ils vivent de la politique. Voyons l’exemple type des Duval, père et fils, des Bérenger, des Ramgoolam, des Jugnauth. Ils n’ont pas besoin de travailler.

Ce sondage auprès de 1 200 Mauriciens montre par ailleurs un manque de confiance du public dans les principales institutions démocratiques ainsi que dans les élus. 61 % des personnes interrogées trouvent que le niveau de corruption dans le pays a « quelque peu » ou « beaucoup » augmenté au cours de l’année écoulée. Votre point de vue ?

L’actuel Parlement a été un cirque et non pas une assemblée délibérante. Le Speaker, qui n’est pas élu recadre des élus de la nation. En termes d’incongruité, nous ne pouvons pas faire pire. C’est l’œuvre de Ramgoolam/Bérenger pratiquée par Jugnauth. Ensuite, nous avons tous vu le comportement de l’ancien Speaker. Quel signal la classe politique donne-t-elle aux jeunes ?

En conclusion ?
Le pourrissement est là. Nul ne peut le nier. C’est au peuple de voir. Soit il veut continuer avec le pourrissement soit il décide de changer. Je m’interroge sur le fait si nous ne devrions pas avoir un gouvernement de mission d’une année, qui mettra sur table 5 à 10 réformes et un retour aux urnes une fois que c’est fait.


STEFAN GUA (Rezistans ek Alternativ): « Cette perte de confiance ouvre la voie à de nouvelles propositions »

Le dernier sondage d’Afrobarometer réalisé par StraConsult révèle que le gouvernement et l’opposition sont confrontés à une crise de confiance. 57 % des sondés n’ont aucune ou pratiquement aucune confiance dans le Premier ministre et 63% font peu ou pas du tout confiance à l’opposition. Votre lecture ?

Il faut d’abord savoir de quelle opposition nous parlons. À Maurice, à ce jour, la sphère politique est divisée en trois : les Ruling Parties, l’opposition parlementaire constituée des partis dits Mainstream et l’opposition extra-parlementaire. Nous ne savons si les 63% qui font peu ou pas du tout confiance à l’opposition, dans le sondage, se réfère à l’opposition parlementaire seulement ou aussi l’opposition extra-parlementaire.

Mais, dans n’importe quel cas, dans le fond, il y a une crise de la représentation politique elle-même. Et, non seulement une crise de l’opposition et du gouvernement. C’est une crise de confiance dans ce que nous appellons l’institution politique. Si nous faisons un zoom out, nous verrons qu’au niveau mondial, il y a une crise de confiance dans les institutions politiques avec la forme la plus violente au Bangladesh, par exemple.

La montée de l’extrême droite dans certains pays d’Europe va aussi dans ce sens : perte de confiance dans les institutions politiques et les gens se rabattent sur des discours les plus farfelus dans certains cas. La situation à Maurice s’inscrit, je pense dans ce contexte. Après, à Maurice, il n’y a pas eu d’alternative politique depuis l’indépendance. Il y a juste une alternance entre deux régimes.

Comment expliquer cette crise de confiance à Maurice ?
Dans la plupart des cas, ce ne sont pas des idées politiques qui sont proposées au peuple mais la question se focalise davantage sur qui a moins de squelettes dans son placard. Avec les réseaux sociaux, tel parti nie un fait avant que l’adversaire ne vienne poster une vidéo pour prouver le contraire. Au final, les gens sont lassés.

Cette crise de confiance donne-t-elle plus de chances aux partis alternatifs pour ces élections ?

Pas forcément. Si les partis alternatifs ou émergents tiennent un discours ou adoptent un postulat archaïque, si au lieu de mettre en avant des idées politiques, ils se lancent dans la Character Assassination, ils ne tiendront pas. Aujourd’hui, il y a des partis qui sont émergents en termes d’idéologie mais dont les idées ne sont pas nouvelles, une des raisons expliquant ce déclin de confiance dans les institutions politiques. Il ne faut pas oublier que ces institutions à Maurice sont sous le joug d’un autre pouvoir, le pouvoir économique qui est plus fort. Le fait que Maurice dépend de plus en plus de l’économie mondiale fait qu’elle est sous le diktat des marchés internationaux. Si un parti émergent vient et entre dans le même jeu, il ne fera aucune différence.

Quid d’un parti qui arrive avec de nouvelles idées ? Peut-il faire le poids face aux deux blocs qui ont toujours eu le monopole ?

Malheureusement, ce qui influence la sphère politique à Maurice, ce ne sont pas uniquement les idées. Il y va de l’argent aussi en politique aujourd’hui. Souvent, les partis émergents se retrouvent à la traîne faute de gros moyens pour rivaliser avec les plus grands partis qui disposent d’un financement émanant souvent du monde Corporate et Business qui influencent grandement les élections à Maurice.

Un parti donc peut avoir les meilleures idées mais s’il n’a pas les capacités pour mettre ces idées en avant, c’est déjà un handicap. Ensuite, il y a aussi dans notre système politique, le poids des mouvements socioculturels qui opèrent dans l’ombre. Ils ne sont pas au-devant de la scène mais s’appuient sur d’autres leviers. C’est pourquoi R&A dit qu’il faut une séparation totale entre la sphère religieuse et politique. Le poids de la religion et des socioculturels est énorme. Souvent, les partis émergents pensent qu’ils feront la différence. Nous ne croyons pas trop dans cette approche.

Les partis autres que l’opposition parlementaire, pour vous, ne font donc pas le poids vraiment pour ces prochaines élections ?

Il y a des événements conjoncturels comme en 2020 où Maurice a eu la plus grande manifestation de son histoire autour du Wakashio. S’il y avait des élections à la fin de cette année, et que les divers composants au cœur de cette mobilisation, soit les Avengers, Rama Valayden, Bruneau Laurette, R&A, et que ces derniers s’étaient cristallisés en une force politique, cela aurait pu marquer une différence dans l’écosystème politique à Maurice. Mais, il n’y a pas eu cette cristallisation de ces diverses forces.

Aujourd’hui, les gens sont un peu blasés et je ne crois pas qu’il y ait un parti autre que le Mainstream aujourd’hui qui peut se positionner en vrai challenger. En termes d’idées, il n’y a pas de problème. Mais, les Mainstream ont des structures qui leur permettent, en 48h, de mobiliser des gens et organiser les élections.

En conclusion ?
Je crois que dans toute société, il y a des cycles. Nous sommes dans une situation où il y a effectivement une crise de la représentation politique telle que nous l’avons toujours connue. Ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose. Il y aura forcément quelque chose qui en émergera. Mais, il faut mettre en perspective que les leaders politiques des divers partis Mainstream vivent leurs derniers moments. Forcément, c’est un temps de transition.

Il faut voir comment les divers idées et projets alternatifs se positionnent dans ce contexte pour faire une différence dans la prochaine joute électorale. Il ne faut pas voir cette perte de confiance dans les institutions politiques comme une fatalité. Au contraire, cela ouvre la voie aux nouvelles propositions. Il faut y travailler pour que cela se réalise.

- Publicité -
EN CONTINU
éditions numériques