MENACE PHYTOSANITAIRE: Bactrocera dorsalis: le ver est, de nouveau, dans le fruit !

Revoilà la Bactrocera dorsalis, la terrible mouche des fruits orientale. Celle qui ne fait pas de différence entre la mangue et le concombre, entre le letchi et le piment, entre l’ananas et le giraumon. Après une résurgence que l’on avait cru sous contrôle en octobre dernier dans la région ouest, notamment, à Gros-Cailloux, depuis décembre, la peste végétale mondialement redoutée se manifeste dangereusement dans différents villages de l’Est dans un périmètre bien plus étendu. Si bien que la question a même dû être discutée en Conseil des ministres le vendredi 15 janvier dernier. Pour les besoins d’isolement sanitaire, quatre villages ont été mis en quarantaine. Et tout est entrepris pour éviter le pire. Soit, débarrasser l’île de cette mouche à l’appétit gargantuesque, capable de se régaler d’une gamme variée de pas moins de 150 fruits du verger et du potager.  
Introduite pour la première fois dans l’île depuis seulement 20 ans, la mouche orientale (Bactrocera dorsalis) est tristement réputée pour être l’une des pestes végétales les plus dangereuses au monde. A titre indicatif, à Maurice, elle est, à ce jour, la seule à s’attaquer, tout à la fois, aux fruits du verger et aux légumes. De même, contrairement aux huit autres espèces de mouches des fruits présents sur le sol mauricien, la Bactrocera dorsalis est la seule qui s’intéresse au letchi, à l’ananas, au poivron, à la banane et au jacque.
Ananas: exportations en péril
Pour cette raison, même si, à ce jour, les dégâts constatés se situent surtout au niveau des dernières mangues de saison, c’est avec appréhension que les officiers du service d’entomologie du ministère de l’Agro-industrie et de la Sécurité alimentaire suivent l’évolution de la situation. Alors qu’à ce jour, l’infestation de la petite bête se concentre essentiellement, dans un certain nombre de villages de l’Est, la crainte des techniciens est que la mouche orientale ne se laisse attirée par les badamiers qui arriveront, bientôt, à maturité
Un fruit, certes, pas très consommé, mais qui est perché à 30 à 40 pieds en hauteur et, donc, difficilement traitable. Ce qui, disent ces techniciens, ne fera que favoriser encore davantage la prolifération de cette terrible peste végétale capable de pondre 1200 oeufs par semaine. Il est estimé que d’ici à la fin de la présente récolte de mangues prévue dans environ quatre semaines, la mouche orientale ne se privera pas pour s’attaquer, alors, à d’autres fruits et légumes. Une inquiétude particulière est exprimée, à ce propos, pour l’ananas, un des fruits par excellence d’exportation et dont la culture se concentre largement dans la région est de l’île.
Même si, au ministère de l’Agro-industrie, on laisse entendre que cette résurgence de la Bactrocera dorsalis n’a pas encore fait de dégâts au niveau des cultures potagères, des échantillons des produits du potager — concombre, giraumon et margoze, notamment — sont collectés ces jours-ci à des fins d’observation. La raison: un temps d’incubation de quatre semaines est nécessaire entre la période de contamination d’un produit par la mouche orientale et l’apparition de la “maladie” végétale qu’elle propage. Mais l’inquiétude se situe aussi au niveau des possibles répercussions sur les prochaines exportations de letchis et d’ananas mauriciens vers les marchés de l’Union européenne (UE).
En effet, au cas où les autorités phytosanitaires locales n’arrivaient pas, cette fois, à venir à bout de la présente infestation de la mouche orientale, il est fort à parier que les autorités européennes vont se prévaloir des dispositions de l’International Plant Protection Convention en vue d’une éventuelle interdiction de l’importation de produits végétaux mauriciens dont celle des fruits concernés. Ce qui, s’il s’avérait, ne manquera pas de porter un rude coup à notre filière d’exportation fruitière qui représente, quand même, un marché de quelque Rs 250 millions annuellement. C’est dire l’urgence de la situation.
Dans ce souci de parer au plus pressé, le ministère de l’Agro-industrie, se prévalant du Plant Protection Act de 2006, a décidé de la mise en quarantaine d’un certain nombre de villages de la région est les plus afffectés par l’infestation en cours, à savoir, Isidore-Rose, Mare-La-Chaux, Camp-Ithier et Quatre-Cocos. D’autres villages des environs, dont Boulet-Rouge et Bramstan, pourraient aussi, bien vite, être inclus dans ce plan d’isolement phytosanitaire dont l’objectif final est de contenir l’infestation en vue de prévenir sa propagation à d’autres régions de l’île.
Contrôle aux frontières
Dans le cadre de cette mesure de mise en quarantaine qui couvre, selon des estimations, une superficie globale entre 20 et 30 km carrés dans la région est, tout est mis en oeuvre pour empêcher que des fruits infectés dans les villages concernés ne soient transportés ailleurs dans l’île. Des collectes sont, ainsi, organisées et les fruits abîmés sont ramassés en vue d’être transférés pour être enfuis et détruits dans des puits spécialement conçus à cette fin à la station agronomique de Barkly.
De plus, les ouvriers de l’Agro-industrie qui bénéficieront en renfort, dès cette semaine, de l’appui de collègues d’autres ministères, procèdent aux traitements recommandés dont l’épandage d’un cocktail de produits à faible dose d’insecticide que l’on aussure “environment friendly” et la mise en place de “killer blocks”. L’objectif ultime visé est l’éradication de la dangereuse peste végétale. Reste, toutefois, la question de son introduction (ou de sa réintroduction) dans l’île. A cet égard, les avis sont unanimes: cela n’a pu être que l’oeuvre d’un voyageur imprudent qui aurait débarqué avec un fruit contaminé acheté ailleurs.
Au ministère de l’Agro-industrie, l’on souligne, à cet égard, qu’outre d’être originaire des régions d’Asie méridionale, d’Asie du Sud et d’Asie du Sud-Est dans des pays tels l’Inde, le Pakistan, la Malaisie ou la Thaïlande, la Bactrocera dorsalis a, aussi, élu domicile plus près de chez nous, aux Comores et à Madagascar. Aussi, avec le flux sans cesse croissant de passagers débarquant, notamment, à l’aéroport, certains estiment qu’il serait temps pour les autorités d’exercer un contrôle plus renforcé sur les produits végétaux que transportent souvent des voyageurs débarquant de pays à risques phytosanitaires.
Mais pour un pays qui mise aussi beaucoup sur le Tourisme, une telle mesure de contrôle phytosanitaire renforcé est-elle la bienvenue? That is the question!    

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