NAUFRAGE DU SIR GAËTAN — Imran Dowlut (Assistant Port Master) : « Le capitaine Newoor a insisté pour poursuivre l’opération »

  • Le capitaine Bheenick, porté disparu en mer depuis le 31 août, avait plaidé pour que l’opération du remorquage soit abandonnée en raison du mauvais temps, cela en au moins trois occasions
  • Le remorqueur, assuré à hauteur de Rs 45 M à la SICOM, toujours pas indemnisé en attendant les conclusions de la Cour d’investigation
  • Le Manager de la Health and Safety de la MPA concède qu’il n’y a pas eu d’évaluation de certains équipements de sécurité sur le remorqueur

Les travaux de la Cour d’investigation pour faire la lumière sur le naufrage du remorqueur Sir Gaëtan se sont poursuivis hier avec l’audition de plusieurs témoins. Imran Dowlut, Assistant Port Master, a ainsi révélé que le capitaine Moswadeck Bheenick avait demandé au Deputy Port Master, le capitaine Kavidev Newoor, d’arrêter les opérations en raison du mauvais temps, ce que ce dernier aurait refusé de faire.

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À la barre des témoins, l’Assistant Port Master a souligné que ce jour-là, le capitaine Bheenick avait demandé au capitaine Newoor de reporter les opérations en raison du mauvais temps. « De par son expérience en mer, le capitaine Bheenick savait que cette opération serait compliquée. Il en a parlé au capitaine Newoor afin de reporter le remorquage. Mais ce dernier a rejeté la demande et a donné des instructions fermes pour poursuivre l’opération », a dit le témoin. Et de faire ressortir que même en mer, le capitaine Bheenick s’entretenait encore avec le capitaine Newoor au téléphone. Mais en vain. Et cela en pas moins de trois occasions.

« Serious defects »

Au préalable, le Manager de General Insurance de la SICOM a déposé. Il a concédé que les remorqueurs de la Mauritius Ports Authority ainsi que plusieurs bateaux sont assurés par les soins de la compagnie. Il précise que l’assurance réclame certaines conditions pour approuver la police d’assurance et que le remorqueur Sir Gaëtan était assuré à hauteur de Rs 45 millions. Il confirme que le remorqueur n’avait pas de Class Certificate en ajoutant que ce n’était pas un problème pour l’assurance, « car ces bateaux naviguent dans le port et les eaux territoriales ». Quant au Safety Certificate, il a soutenu que c’est à la compagnie de s’assurer que le navire dispose des normes de sécurité.
À une question du président de la Cour d’investigation, l’ancien juge Gérard Angoh, qui cherchait à savoir quelle aurait été la position de la SICOM si elle avait appris que le Sir Gaëtan avait navigué en dehors des eaux territoriales, le témoin a répondu qu’il existe « d’autres types de police d’assurance pour les Moored Vessels ».
Il a fait également ressortir que le remorqueur n’a toujours pas été indemnisé et que si la Cour d’investigation conclut qu’il y avait de grosses défaillances au niveau du remorqueur, la police d’assurance ne sera plus valable. « If there are serious defects, it will be in contravention with the policy and the policy will not hold », a-t-il déclaré.

« No urgency »

Le General Manager de Taylor Smith, société qui avait assuré la rénovation du remorqueur et propriétaire de la barge L’Ami Constant, Thierry Bétuel, a confirmé que la barge était non motorisée et avait un certificat d’assurance valide jusqu’en 2020. Le document avait été remis au CCID. Quant aux dernières réparations effectuées sur le remorqueur, elles dataient d’octobre 2019.
Il explique en outre que c’est le Director of Shipping qui l’avait contacté pour l’opération de remorquage, le 31 août. « The MPA decided to tow back and we had to hand over the barge at Mahebourg. It was not a remunerated contract. There was no urgency to bring back the barge to Port-Louis », a-t-il déclaré. Il dit que toutes les opérations de remorquage sont menées par la MPA, qui donne aussi l’autorisation pour opérer la barge. La barge, qui avait été retrouvée deux jours après le naufrage à Poudre-d’Or, avait été ramenée par un bateau de pêche.

« Not wise »

Le Marine Surveyor de Bureau Veritas Johnny Lam Kai Leung, l’un des assesseurs de la Court of Investigation sur le naufrage du MV Wakashio, avait fait l’évaluation du remorqueur à des fins de rénovation et de classification. Sur 150 items, neuf problèmes avaient été détectés, entre autres de « steel work on the deck », « faulty battery charger », et « emergency at air compression ».
Après le constat des problèmes, un rapport est envoyé à la MPA, qui a la responsabilité d’effectuer les réparations et d’informer Bureau Veritas une fois les travaux complétés. Or, Johnny Lam Kai Leung soutient qu’il n’y a « jamais eu de retour » et qu’il ne savait pas si les travaux avaient été réalisés.
Répondant à une question de l’ancien juge Angoh sur le « seaworthiness » du Sir Gaëtan, il a soutenu que « même avec ces défaillances », un navire peut prendre la mer, mais que « cela dépend des conditions ». « Le temps est une condition importante », selon lui. « it was not wise to go in sea as the tug was not classified yet. If I were there, I would not have sent », a-t-il déclaré.

« Role of Safety Officer »

Le manager du département « Health and Safety » de la MPA, Mukeshwar Mohabeer, a également déposé. Il a fait l’objet de sévères critiques de la part de l’ancien juge Angoh, qui lui a rappelé que son rôle en tant que Safety Officer était « de veiller à tous les aspects de la sécurité, et non pas d’attendre qu’il y ait des doléances de la part des employés ».
Ce témoin a déclaré qu’au début août, il avait effectué un Risk Management Survey » de tous les tugs de la MPA, et qu’il n’y avait « aucun souci » sur le Sir Gaetan. « For you everything was in order? We have a forensic report saying that the safety equipment was not in order », lui a alors lancé l’ancien juge.
Le responsable en matière de Health and Safety a concédé qu’il n’avait pas vérifié l’état des gilets de sauvetage, car cela tombe sous la responsabilité des membres de l’équipage. « What is the role of a Safety Officer? You based yourself on complaints? You do not go personally? » a demandé l’ancien juge. « I am not a competent person to inspect life jackets. This is not my field of expertise. I am in occupational safety », a-t-il répondu.
Il a également concédé que les membres d’équipage n’ont « jamais eu de formation » ou de « refresher course » en remorquage, car, selon lui, « ce sont des personnes compétentes comptant plus de dix années d’expérience ».
Les travaux reprendront demain.

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