NAUFRAGE DU TUG | Des skippers à la MPA : « Sir Gaëtan avait des Safety Issues »

  • Koslendr Pothimah affirme n’avoir jamais vu le Health and Safety Manager à bord
  • En dépit des doléances, le Deputy Port Master et le Port Master auraient choisi de fermer les yeux sur les problèmes de moteur du remorqueur

Les travaux de la Court of Investigation pour faire la lumière sur le naufrage du remorqueur Sir Gaëtan se sont poursuivis hier avec l’audition des skippers de la Mauritius Ports Authority (MPA). Ils ont dénoncé le fait que ce remorqueur avait des « safety issues » depuis quelque temps mais que rien n’a été entrepris pour y remédier. Vishal Tewary, l’un deux, affirme avoir attiré l’attention du Port Master, le capitaine Barbeau, sur le problème de moteur de Sir Gaëtan mais il lui aurait demandé de ‘carry on the job’.

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Koslendr Pothimah est skipper à la MPA depuis 2018. Il opère sous la supervision du Port Master et de son adjoint. Le 31 août 2020, il a expliqué qu’il était de service et que, la veille, le capitaine Bheenick l’avait informé d’une opération pour le lendemain en vue du remorquage de la barge L’Ami Constant pour le compte de la société Taylor Smith de Pointe d’Esny à Port-Louis.

Le Capitaine Dowlut lui avait aussi demandé de préparer son équipe en marge de cette opération. Ce jour-là, le capitaine Dowlut lui avait dit que l’opération allait être annulée. « He told me that Captain Bheenick was in negotiation », dit-il. Le skipper a souligné qu’il a déjà travaillé à bord du Sir Gaëtan dans le port et qu’en termes d’équipage, le remorqueur avait la capacité d’assurer cette opération. Il a concédé que le meilleur Tug pour assurer le remorquage ce jour-là aurait été Sir Edouard ou Da Patten.

« Set aside »

Koslendr Pothimah a poursuivi que le remorqueur Sir Gaëtan, au vu de ses « safety issues », avait été « set aside » dans le port et qu’il était utilisé uniquement en cas d’urgence. Il a fait ressortir que des opérations de remorquage nécessitent des compétences spécifiques et que ce ne sont pas les mêmes que dans le port.

« Towing exercices required specialized skills which are not same as in the port. We never had any specialized training in towing since I joined the MPA », a-t-il fait comprendre. À une question du panel en vue de déterminer s’il avait signé une quelconque pétition sur les problèmes au sujet du Sir Gaëtan, le témoin a déclaré ne pas être au courant de l’existence même de celle-ci. Il a confirmé que le remorqueur était dépourvu de moyens de communication et que les officiers communiquaient uniquement à travers leurs téléphones cellulaires.

Il a fait ressortir que certains équipements dont le Search and Rescue Radar Transponder ainsi que l’EPIRB – qui sont des appareils en cas d’urgence –  avaient expiré. Il n’était pas au courant que le remorqueur n’avait pas Class et de Safety Certificate.

« Risky Business »

« We received instructions from the Port Master and we have to abide with. It is a risky business. We were not aware if there was a deficiency list », a-t-il affirmé. Le remorqueur, dit-il, comparé au Sir Edouard, ne dispose pas d’un Standard Operating Procedures Manual, qui comporte des directives pour une opération de remorquage. Les skippers assurent les opérations en se basant sur leur expérience. Il a aussi fait ressortir que le remorqueur ne disposait pas de plusieurs équipements pour procéder à la vérification de conditions climatiques.

Le témoin dit n’avoir jamais vu le Health and Safety Manager à bord d’un navire ou d’un remorqueur de la MPA depuis qu’il est en poste. « No risk assessment was done before the operation on that day. Sir Gaëtan had some issues with the engine. It was shutting down all the time and this was reported », declare-t-il.

‘Not safe’

Vishal Tewary, skipper de la MPA, celui-là même qui avait assuré l’opération de transporter la barge L’Ami Constant de Taylor Smith jusqu’à Pointe-d’Esny, a aussi déposé. Le 10 août 2020, il était en compagnie du capitaine Domingo pour cette opération. Il avait récupéré la barge de Taylor Smith à 16 heures et s’est dirigé vers Mahébourg. « Taylor Smith gave us one rope and we took ours. We had two ropes », devait-il faire ressortir.

Alors que son coéquipier assurait la garde, l’une des cordes avait cédé. « The first line broke, we kept on towing. I told him to go down on speed… If the second line broke, there would be no manoeuvre as it is not safe at night », a-t-il expliqué.

Or, lorsqu’ils sont arrivés à hauteur de Macondé à 6 heures du matin, la deuxième corde avait aussi cédé et la barge flottait loin du remorqueur. Ils ont ainsi tenté de rallier la barge une nouvelle fois et y sont parvenus. Il a expliqué que les cordes sont en polyester et que c’est dû à la friction qu’elles s’étaient cassées.

Alors que le témoin dans sa déclaration à la police en septembre dernier avait soutenu que Sir Edouard aurait été le meilleur remorqueur pour assurer cette opération, il s’est contredit en Cour hier en déclarant que ‘Sir Gaëtan was most appropriate to carry out this operation’.

« Pa fer sikoz »

Vishal Tewary a expliqué que dans des situations d’urgence, ils doivent toujours informer le Deputy Port Master ou le Port Master en vue de la marche à suivre. Il a aussi concédé que les opérations de remorquage requièrent des compétences spécifiques et que les employés reçoivent uniquement des on-the-job trainings.

Le témoin a avoué que dans des cas même s’il y a des problèmes sur les remorqueurs, les employés font face à des pressions de la part de leurs supérieurs pour effectuer le travail. « We get pressure to do the job even if there are defects. I was called by the Port Master (le capitaine Barbeau) for saying that the tug was not good. He told me Mo pe fer sikoz dan MPA. The engine of Sir Gaëtan was shutting down. It was very dangerous », a-t-il déclaré. Et d’indiquer que le Port Master n’était pas content des doléances.

Rappelons que la Cour d’investigation devant se pencher sur le Tug Sir Gaëtan aura pour mission d’enquêter sur les circonstances ayant mené au naufrage du remorqueur, soit la collision avec la barge L’Ami Constant. Ils devront se pencher sur les circonstances du décès par noyade des trois membres d’équipage (Jimmy Sylvain Addisson, Sujit Kumar Seewoo et Laval Lindsay Plassan) et la disparition du capitaine Moswadeck Bheenick, ainsi que les blessures des quatre rescapés. Cette Cour d’investigation aura pour tâche de situer les responsabilités quant aux actes ayant mené à ce drame en mer. L’enquête, elle, devra établir les responsabilités des différentes parties prenantes dans cette affaire.

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