Océan indien : Londres s’accroche à la « fiction » du BIOT

– Des Research Briefing Notes à la Chambre des Communes en date du 22: « The new negotiations may form part of the UK’s attempts to strengthen regional alliances against China.»

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– La question du jour: « Could Diego Garcia be separated from the rest of the BIOT » ou encore « Could there be a Co-Management Agreement?

L’annonce conjointe du 3 novembre à l’Assemblée nationale à Port-Louis, et à la Chambre des Communes à Londres, au sujet de la rouverture des négociations entre Londres et Port-Louis sur l’archipel des Chagos, marque un nouveau chapitre dans le processus de la décolonisation de la République de Maurice. Même si à ce stade, si tous les espoirs sont permis quant à l’accord, tenant en ligne de compte le droit international, du côté de Maurice, l’on concède que Maurice devra jouer très serré.

En marge des consultations préliminaires engagées à Londres au sujet du Modus et du format de ces négociations, susceptibles de déboucher sur une annonce formelle le 12 mars prochain pour les 55 ans de l’accession de Maurice au statut d’indépendance, Londres, par le truchement des Research Briefing Notes, signées de Philip Loft, en date du 22 novembre et déposées à la House of Commons Library, balise son champ d’intervention dans cette nouvelle étape.

Toutefois, force est de constater que Londres s’accroche à la fiction historique de British Indian Ocean Territory (BIOT), dénomination géopolitique que récuse formellement l’Hôtel du Gouvernement. L’intitulé de ce document accessible à la Chambre des Communes, soit British Indian Ocean Territory: UK to negotiate Sovereignty 2022/23, en dit long sur la posture en termes de relations internationales des Britanniques sur ce dossier. Néanmoins, avant d’entrer dans le vif du sujet, ce document des Britanniques rappelle que ce n’est pas la première fois que la partie mauricienne et les Anglais se mettent à table pour essayer de dégager un accord.

Les deux précédentes tentatives se sont soldées par des échecs. La première fois, en 2009, avait vu Londres venir de l’avant avec le projet de Marine Protected Area autour de l’archipel des Chagos en dépit des protestations de Port-Louis qualifiant la démarche du Royaume-Uni d’unilatérale.

Puis le retour devait intervenir suite à des Further Rounds en 2016 et 2017. Avec la rupture des échanges bilatéraux, Port-Louis devait prendre Londres de court en saisissant l’assemblée générale des Nations unies avec une motion en vue de soumettre le différend historique sur la souveraineté des Chagos à l’arbitrage de la Cour internationale de justice (CIJ). Tout compte fait, l’Advisory Opinion de cette dernière instance en date du 25 février 2019 pèse de tout son poids en faveur de la revendication de Maurice.

Ce troisième round des négociations s’avère être déterminant pour les deux parties voulant faire la différence avec le document déposé à la Chambre des Communes se penchant sur les raisons de « l’US and UK’s Strategic Shift in the Region ». Tout en rappelant que « the United Kingdom has found itself increasingly isolated over its control of the BIOT at the United Nations », Phlip Loft affirme que « an additional reason for the new negotiations may be the strategic shift in US and UK foreign policy towards Asia and the Indo-Pacific in response to China’s growing economic, maritime, and military power ».

Poursuivant, le Commons Library Reseach Briefing avance que « commentators note that resolving a long-standing territorial dispute and a point of disagreement in international law and UN opinion may form part of the UK’s attempts to strenghten alliances against China ». La mention de l’importance stratégique de l’Inde dans les déclarations communies du 3 novembre dernier trouve toute sa pertinence.

Indépendamment des motivations relevant de la realpolitik dans l’océan Indien, deux options, qui pourraient davantage approfondir le fossé politico-diplomatique entre Port-Louis et Londres, sont évoquées dans la conjoncture. Dans le document de la Chambre des Communes, elles se présentent sous forme de questions, soit (1) Could Diego Garcia be separated from the rest of the BIOT? et (2) Could there be a Co-Management Agreement?

Dans les deux cas de figure, la diplomatie mauricienne joue sur la corde raide même si les Britanniques affirment que « some islands on the BIOT ware ceded to the Seychelles in 1976 upon its independence from the United Kingdom as they were not needed for defence purposes ». Mais cette éventualité semble être très loin de la revendication de Maurice en termes d’intégrité territoriale et d’exercice de souveraineté sur l’ensemble du territoire de la République.

Pour ce qui est du Co-Management Agreement et de ce que le Royaume-Uni persiste à présenter comme le BIOT, le précédent de la co-gestion de Tromelin est cité en exemple. « In 2010, France agreed a co-management agreement with Mauritius over the French-held Tromelin Island. The agreement allows the co-management of the island, including over its economy and management. The agreement did not prejudice any sovereignty claims over Tromelin », souligne-t-on du côté des Britanniques en ajoutant que « if applied to the BIOT, this could include, for example, joint management over the Marine Potected Area ».

Comme quoi, cette nouvelle étape des négociations anglo-mauriciennes sur les Chagos ne confirme qu’un point : Londres s’accroche à sa fiction de BIOT envers et contre tout et que Port-Louis ne devra que faire preuve de vigilance…

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