PRISONS/MITD : Formation en “metalwork”, L’ex-détenu Fabrice Hemsley se distingue sur le plan national

Fabrice Hemsley, 32 ans, a passé quatre ans derrière les barreaux. Depuis cinq mois, il est un homme libre. Mieux encore : le 30 septembre dernier, il a reçu une distinction nationale en sortant en effet premier à Maurice pour les examens de National Certificate Course 3 (NCC3) “metal”, dispensé dans les 25 centres du MITD. Tremplin, le centre de formation de la prison, uniquement dédié aux détenus, en fait partie. Pour sa part, un détenu, Kenneth (prénom modifié), retrouvera la liberté début 2016 après trois ans d’incarcération. Lui aussi s’est distingué lors de ces examens. Cette formation d’un an en “metalwork” s’est révélée « fortement enrichissante » pour ces deux jeunes hommes. Ils expliquent…
« J’entame actuellement des démarches et procédures nécessaires pour décrocher un job au Canada… Je compte y émigrer et trouver du travail là-bas. Pour ce faire, cette formation de NC3 et mes distinctions en “metalwork” me seront certainement utiles ! » explique Fabrice Hemsley. Le jeune homme, qui arbore un look rasta, fait la fierté de ses anciens compagnons de la Richelieu Open Prison (ROP), de même que les officiers qui l’ont connu durant son passage dans cette institution. « Ki manier garson ? Tou korek la ? » et autres « tane dir tonn ale dan avion tou… » fusent alors qu’il rencontre d’anciens compagnons de cellule et officiers de la prison dans l’enceinte du pénitencier de Richelieu. Le sourire aux lèvres, signe d’une certaine satisfaction, mais le ton toujours doux et avec politesse, Fabrice Hemsley porte toujours l’empreinte de son séjour en prison. « Seki missie Bhagarathee ine dir mwa, bann parol ki linn ena toultan, ki li kan nou ti pe suiv cour ar li ou li ti pe donn nou konsey, res grave dan mo leker ek dan mo memwar… Se sa ki pe donn mwa lafors ek perseverans pou manz are li zordi. »
Le jeune ex-détenu explique : « Quand on est prisonnier, on éprouve beaucoup de difficultés à envisager le retour à la liberté. Bien sûr, on attend ce moment avec impatience. Mais il y a aussi beaucoup d’appréhensions. » Kenneth, qui a encore quelques mois à passer derrière les barreaux, et qui a suivi cette même formation, le rejoint sur ce point : « Normal, nou anvi retrouv nou fami, lavi en deor… Mai en mem tan, ena ene laper. » Comment s’y prendre quand on retrouve sa liberté ? Quelles sont les voies à ne pas emprunter pour ne pas récidiver ? « Ce sont ces choses qui vous fatiguent, moralement et mentalement », confirme Kenneth.
Pour aplanir leurs doutes et calmer leurs inquiétudes, expliquent nos deux interlocuteurs, « nous avons trouvé auprès de MM Seegoolam, le Prison Welfare Officer, et Bhagarathee, P.O/SPO, une source d’inspiration très riche », poursuivant : « Ces deux hommes, ainsi que bon nombre d’autres officiers, nous ont beaucoup aidés. Ils ont su nous encadrer et nous donner des repères sérieux afin de nous donner la force de continuer à nous battre, l’envie d’apprendre afin d’avoir un métier, une indépendance financière. »
Sunilduth Bhagarathee souligne à ce propos qu’il est « très difficile de convaincre des détenus » de suivre une formation. « Le fait qu’ils soient enfermés est pour eux synonyme de découragement. Ils sont d’avis que leur vie s’arrête là. Donc, à quoi bon apprendre un métier ? » Mais avec nos deux interlocuteurs, concède-t-il, « cela s’est fait d’une manière plus naturelle car ils avaient la volonté de faire quelque chose pour s’en sortir, ce qui est déjà une bonne base pour démarrer ». Fabrice et Kenneth acquiescent : « Kan ou prizonye, ou pa pense pli divan. » Eux deux, cependant, ainsi que plusieurs autres détenus, ont souhaité, ainsi que le résume Kenneth, « mett enn serye ». Ils développent : « Nous sommes conscients que nous avons commis une faute. Mais nous avons été emprisonnés et nous avons payé pour cela. Nous avons droit à une deuxième chance dans la vie. Et c’est pour cela que moi, par exemple, j’ai voulu suivre ce cours. »
Les deux jeunes hommes, qui ont brillé aux examens du NC3, s’accordent sur le fait que « sur le plan académique et humain, M. Bhagarathee nous a fortement aidés ». Ils ajoutent : « Il nous a patiemment expliqué que la vie a suivi son cours pendant que nous étions enfermés… Et qu’il nous faut nous adapter aux changements qui se sont produits à l’extérieur. » De même, soutiennent nos deux interlocuteurs, « il nous a bien fait comprendre que l’approche, la manière de parler, se comporter… que tout cela est important si nous voulons réussir et prouver que nous avons appris quelque chose en prison ». Kenneth en déduit : « J’ai réalisé que quand je sortirais, j’aurais un plus. » Avant d’être arrêté et incarcéré, le jeune homme officiait comme électricien dans la construction industrielle et domestique. « J’avais déjà une idée de base de ce que j’ai appris dans ces cours de “metalwork”. Mais là, j’ai une connaissance encore plus approfondie et professionnelle. » S. Bhagarathee explique : « Cette formation basique et élémentaire, tout en étant aussi très technique, porte sur deux axes : de janvier à juin, ils ont un premier module qui porte sur l’électrique, qui est sanctionné par un premier examen. De juin à décembre, le deuxième module porte sur le “gas welding”, également cautionné par un examen, théorique et pratique. Surtout, outre d’apprendre à manier ces appareils, ils sont aussi amenés à connaître les noms spécifiques ainsi que les usages de ces équipements. Souvent parce qu’ils ont une expérience sur le tas, ils connaissent ces outils de travail. Mais forts de cette formation de NC3 en “metalwork”, ils deviennent plus professionnels. »
F. Hemsley rappelle : « Ou kone, kan pe craze endan, movai garson mem sa… Felonn tou… Penvi mett latet dan narien. Sirtou kan ena pou aprane. Mais missie Bhagarathee ine sanze nou. Li merite ene rekompans pou seki linn fer pou nou. » Kenneth le résume bien : « Cette année de formation sous la férule de S. Bhagarathee, ce n’était pas que des cours. Nous avons aussi bénéficié d’une formation pour la vie. » Et d’ajouter : « Quand je vais sortir, j’espère trouver un emploi avec une bonne rémunération. Ce qui m’empêchera de recommencer à voler pour vivre. »

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -