La semaine a été marquée par une escalade dans la controverse du contrat de Rs 5 milliards pour le projet de ferme solaire avec la société Corexsolar. Le ministre des Utilités publiques, Joe Lesjongard, s’est vu dans l’obligation d’animer un point de presse pour contrer les points avancés par Joanna Bérenger du MMM sur cette affaire. Le fait demeure que les coustics du board du Central Electricity Board (CEB) fait que cette dernière entité est en posture délicate pour les projets de fermes solaires, soit l’achat d’électricité des Renewable Energy Hybrid Facilities (REHF). Joanna Bérenger avait levé le lièvre en pointant du doigt le CEB pour non-respect d’une condition sine qua non de l’appel d’offres, notamment les sites de la firme Corexsolar pour ses fermes solaires.
Joanna Bérenger s’est retrouvée sous le coup de deux dépositions consignées à charge, notamment de l’Officer In Charge du CEB, Rajden Chowdhary, et de Joe Lesjongard. Ils estiment que les propos de la parlementaire sont faux et malveillants. Toutefois, les contorsions du board du CEB en faveur de cette société française pour permettre à celle-ci de relocaliser ses projets, alors que ses sites étaient déjà locked à la signature des Power Purchase Power Agreements (PPA) en février dernier, sont plus qu’apparentes.
Le Renewable Energy Committee du CEB avait recommandé au board le 7 juin que « in order to avoid an event of misrepresentation, Corexsolar has no other option than to implement its projects in the project sites specified in the PPAs. Thus, the CEB must maintain the project sites specified in the PPAs. » Ainsi, le REC recherchait le feu vert du conseil d’administration pour rejeter la requête pour des changements, venant de Corexsolar et maintenir les SPV 30MW Belle Vue 2 Ltd et SPV 30MW Belle Vue 3 Ltd.
Corexsolar avait soumis ses trois Development Securities d’un montant total de Rs 210 millions pour les trois projets, soit SPV 10MW Belle Vue 1 Ltd à Plaine-des-Papayes, SPV 30MW Belle Vue 2 Ltd et SPV 30MW Belle Vue 3 Ltd à Belle-Vue-Harel.
Risque de litiges
Les trois PPA avaient été signés avec le CEB le 15 février 2023. Le board du CEB avait ordonné le management, le 27 avril 2023, de rechercher un avis légal sur la question de savoir si le PPA pourrait être modifié pour que le site agréé soit modifié.
Le 17 mai, Corexsolar avait informé le CEB d’un problème majeur concernant les sites de projets. L’avis juridique du 4 juin, signé par Me Ravin Chetty, Senior Counsel, est sans ambiguïté, à savoir que toute modification de sites entraîne le risque de litiges et de poursuites contre le CEB. La possibilité de résilier les PPA et réclamer des dommages et intérêts à Corexsolar, au lieu d’accéder à la demande de relocalisation, était aussi évoquée.
« The Request For Proposals documents and the PPAs did not provide any specific clause which expressly permits the CEB to agree to alter the site of the proposed development after the contract has been awarded, other than general clauses granting the CEB the ability to amend the PPAS or to waive condition precedent », indique le Senior Counsel.
Il estime aussi que « if it transpired during the bidding process that the site was not available, Corexsolar would not have been eligible to be awarded the contract. » L’avis légal laisse toutefois le choix au CEB de prendre la décision finale en s’assurant que les dispositions de la Public Procurement Act soient respectées.
« Upon mutual agreement of the parties »
Cet avis de Me Chetty a visiblement été relativisé par le Legal Officer du CEB, Me Julien Tuyau. Il s’est appuyé sur l’une des clauses des PPA permettant d’amender les accords « upon mutual agreement of the parties ». « Given the importance of this project, which is in line with the Government’s policy on green energy, and the national interests, Corexsolar’s request to change the location of the project can be accepted subject to an indemnification clause to be mutually agreed by both parties in the event of lawsuits raised against the CEB », avait proposé Julien Tuyau au board CEB, estimant que « remedies and damages for failure to fulfil the Conditions Precedent are covered under the PPA. »
L’offre de Corexsolar au CEB comprenait un contrat de location conditionnelle avec option d’achat entre Mabfix Co Ltd et Corexsolar International (Mauritius) Ltd. Cet accord précisait les coordonnées GPS du site aussi bien qu’un site plan, mais ne mentionnait pas le propriétaire du terrain. Le loyer annuel était sujet à discussions après l’octroi du contrat.
Le fait est que le terrain en question appartient à Terra. Le CEB a été informé par un haut responsable de Novaterra, le cluster immobilier de Terra, qu’il n’y a jamais eu de contrat entre Terra et Mabfix, qui est une entreprise de construction ne détenant aucune licence d’agence immobilière. Suite à la ratification de la PPA, Corexsolar a demandé à Mabfix de finaliser le bail et cette dernière aurait fait part de son incapacité de louer le terrain en question.
Un tel scénario est jugé inacceptable par le REC. « It is to be noted that the REHF projects concerning SPV 30MW Belle Vue 2 and SPV 30MW Belle Vue 3 have a total capacity of 60MW requiring around 1 266 000 m² of land. Given the order of magnitude of the project costs, Corexsolar should have in the first place verified the title deed of the plot of land identified before entering into a conditional lease agreement with Mabfix Co Ltd and submitting offers for the RFP : OAB-RESP-22-0811. Since no verification was carried out on the title deeds, Corexsolar was exposed to the risk for not securing the commitment of landowners for its projects. Therefore, it can be concluded that Corexsolar has never been able to secure the commitment of the landowners for its projects », affirme le REC le 26 juin dernier.
Le comité de l’énergie renouvelable du CEB maintient que l’identification des terrains pendant le processus d’appel d’offres est un élément essentiel et une exigence obligatoire. Par ailleurs, l’attribution du projet, le terrain identifié au stade de l’appel d’offres est locked dans les PPA. Le REC est arrivé à la conclusion que Corexsolar n’a jamais été en mesure d’obtenir l’engagement des propriétaires fonciers ni par l’intermédiaire de Mabfix ni directement avec Terra pour les terrains nécessaires aux projets SPV 30MW Belle Vue 2 et SPV 30MW Belle Vue 3.
Corexsolar a sciemment signé les PPA alors que les terrains n’étaient pas sécurisés. « Such an event also constitutes a Seller’s Default under the PPA. Therefore, in order to avoid an event of misrepresentation, Corexsolar has no other option than to implement its projects in the project sites specified in the PPAs. Thus, the CEB must maintain the project sites specified in the PPAs », maintient le comité. Cette recommandation n’a pas été prise en compte par l’Officer In Charge du CEB. Ce dernier n’ayant pas, selon les documents qui sont en circulation, apposé sa signature aux observations du REC.
Si le ministre Lesjongard prétend que les whistleblowers de cette affaire ne fournissent pas toutes les informations pertinentes, Joanna Bérenger se demande qui a embêté qui dans cette affaire et pourquoi prend-on fait et cause en faveur de Corexsolar dans la conjoncture.
Affaire à suivre…