Réserves en eau : Le spectre du Jour Zéro ?

-Prem Saddul, ancien Chairman de la CWA : « Seul un mois de janvier précoce et pluvieux permettra d’éviter ce scénario »

-Le Midlands Dam asséché à 74%

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Le « Jour Zéro », cette date limite où plus aucune goutte d’eau douce ne sera disponible, se rapproche de plus dans certaines zones du globe. Peut-on craindre un tel scénario à Maurice compte tenu du « stress hydrique extrême » dans lequel l’île se retrouve actuellement ?  De l’aveu même du directeur général de la Central Water Authority (CWA), Prakash Maunthrooa, « l’eau des réservoirs sera inexploitable une fois la barre des 15% franchie, en raison de la qualité de l’eau à ce niveau-là. »

Prem Saddul, ancien Chairman de l’organisme et géomorphologue, a son avis sur la question. Quand bien même il souligne que « le pire est déjà devant nous, dû au manque de vision et d’investissement financier dans ce secteur », il se dit confiant  que « les grosses pluies de janvier inverseront la tendance. » En attendant, le compte à rebours est lancé et de nouvelles restrictions se mettent en place (CWA Dry Season Regulation 2022)  pour y faire face, avec de nouveaux horaires de distribution, assortis d’amendes et de peines de prison pour les contrevenants.

Les images saisissantes de nos réservoirs asséchés, publiées dans nos colonnes dimanche dernier, ont choqué plus d’un et la situation n’a fait qu’empirer depuis. Le niveau du taux de remplissage des sept réservoirs affiche une moyenne de 34,4% contre 65,1% à  pareille époque l’année dernière. Le Midlands Dam, pourtant situé dans une zone à forte pluviométrie, est asséché à 74%. Le taux de remplissage de La Ferme passera sous la barre des 20%, cette semaine, alors que Mare-aux-Vacoas, le plus grand réservoir, est rempli à 43,9%.

L’ancien Chairman de la CWA, Prem Saddul soutient que « seul un mois de janvier particulièrement précoce et pluvieux permettra au pays d’éviter le spectre du Jour Zéro », comme cela a pu être le cas à Cape Town en 2018, lorsque les autorités sud-africaines avaient réussi à retarder in extrémis ce scénario catastrophique sous de sévères restrictions et conséquences économiques : « Notre unique espoir demeure les pluies d’été, qui sont vivement attendues vers la mi-janvier. Il suffit de recevoir de grosses averses pendant deux ou trois semaines au minimum pour remplir nos réservoirs et nappes phréatiques. Je suis confiant. »

À en croire Prem Saddul, le problème de l’eau à Maurice ne découle pas uniquement de la sécheresse, du changement climatique ou de la pluviométrie, mais de l’incapacité de nos politiques à prendre en charge de façon adéquate cette ressource. Il pointe notamment du doigt l’incapacité des décideurs à prendre en charge le run-off, c’est-à-dire les eaux qui partent à la mer : « Il y a tout simplement eu, durant ces cinq dernières années, un manque de vision et d’investissement de nos politiques. Nous avons 52 rivières, six nappes phréatiques et 40 sites de sources d’eau, dont 17 émanant des lagons, à travers le pays. Et quid de l’exploitation des rivières ? Ki proze konkre inn fer ? Un milliard de m3 d’eau des rivières se perd dans la mer par an. Le pays n’arrive à capter que 7% à 9% de la pluie. C’est impensable ! »

Le géomorphologue se dit en faveur de « l’installation de mini-barrages, des mini stations de traitement le long des rivières à des points stratégiques et des châteaux d’eau, dont le coût est moins onéreux que celui des grands projets de construction de barrages ou de dessalement de l’eau de mer grâce à la technologie. » Parmi les moyens de se procurer de l’eau, figure, selon lui, « la récupération des eaux usées à des fins potables et non potables, comme ça se fait en Israël. »

Israël et PPP

Entre 1990 et 2010, Israël a réalisé une véritable révolution dans le domaine de l’eau. Dans une première étape, des mesures innovatrices exceptionnelles fondées sur des développements technologiques d’avant-garde dans le domaine du traitement des eaux usées et de l’utilisation élargie des eaux saumâtres pour l’irrigation ont permis de faire face à un déficit de 800 millions de m3 /an entre les précipitations naturelles (1,200 Mm3/an) et les besoins (2,000 Mm3/an).

Prem Saddul souligne que Maurice aurait dû s’inspirer d’Israël devenu le leader mondial de la gestion de l’eau et qui exporte son savoir-faire dans le monde entier : « Maurice enregistre 4,000 millimètres de pluie par an dans notre catchment area, contrairement à Israël qui enregistre 10 fois moins de pluie. Plus de la moitié du pays est désertique, mais Israël est le seul pays au monde où le problème de la pénurie d’eau douce a été résolu, quels que soient les effets du réchauffement climatique sur la réduction future des précipitations naturelles. »

Prem Saddul va plus loin dans ses analyses en plaidant pour un Partenariat Stratégique public-privé (PPP) dans le domaine de l’eau : « Le pays est confronté aux défis de la durabilité et de la viabilité financière en raison des réalités incontournables que sont la médiocrité des services d’approvisionnement en eau et des budgets limités.

Le partenariat public-privé (PPP) demeure une option intéressante à envisager pour améliorer les performances ou développer de nouvelles sources. Pour éviter toute polémique, je précise qu’il ne s’agit pas d’une privatisation du secteur, mais d’un accord gagnant-gagnant dans lequel le partenaire de la CWA apporterait son investissement et son savoir-faire afin d’améliorer le secteur de la distribution d’eau. »Horaires de distribution d’eau :
• Le Nord : 4h à 7h et 16h à 19h
• L’Est : 6h à 10h et 18h à 22h
• Le Sud: 5h à 8h et 17h à 20h
• L’Ouest (divisé en 3 sous-régions) : Chemin-Grenier, Chamouny, Surinam: 5h à 8h et 17h à 20h. Bel-Ombre, Baie-du-Cap : 5h à 10h et 17h à 22h. Rivière-Noire, Le Morne : 4h à 8h et 16h à 20h
• Le Centre : 4h à 7h et 16h à 19h
• Port-Louis : 4h à 8h et 16h à 20h

 

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