(Restauration) Fruits de mer : Préserver les traditions mahébourgeoises

Mine bouilli “mangouak”, mine bouilli palourde, salade ourite traditionnelle… Des spécialités typiques de Mahébourg dont raffolent les Mauriciens, qui voyagent même de très loin pour y goûter. Toutefois, le drame à la suite du naufrage du MV Wakashio est venu bousculer les habitudes. Avec la pêche interdite dans le Sud-Est, ces fruits de mer sont devenus rares. Il n’empêche que les deux snacks réputés dans ce domaine à Mahébourg, à savoir Coin Casse-Croûte et Chez François, regorgent d’idées pour continuer à faire vivre ces traditions héritées de familles de pêcheurs.

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Chez François : valoriser l’héritage familial

François Hosenbocus vient d’une lignée de familles de pêcheurs. S’il n’a pas adopté le métier, il s’évertue à poursuivre les traditions culinaires héritées de ses parents et grands-parents. Les mines “mangouak”, mine palourde ou mine aux fruits de mer sont les rois de la table au restaurant Chez François. On y parvient en empruntant la rue Labourdonnais, à côté du supermarché Lo Yeung. La clientèle vient de partout pour goûter à ces spécialités mahébourgeoises. François Hosenbocus explique : « Souvent les gens veulent changer des habituels bœuf et poulet. Alors, ils viennent goûter nos spécialités fruits de mer, préparés de manière traditionnelle. »

Il explique que ces plats font partie de l’héritage familial. « Dans la famille de ma mère, on était pêcheurs de génération en génération. Lorsque j’étais petit et que j’allais chez eux à Ville-Noire, je les observais dans les préparations. À cette époque, lorsqu’on recevait des invités, on n’avait pas l’argent pour acheter du poulet ou du bœuf. On allait à la rivière ramasser des mangouak », se remémore-t-il. Ce fruit de mer, explique François Hosenbocus, se trouve dans les embouchures. Il aime les eaux saumâtres. Son goût est semblable à celui des huîtres, donc quelque peu âcre. D’où la nécessité de bien connaître la préparation pour pouvoir l’apprécier. « C’est pour cela qu’on le prépare généralement en salmi, car les épices permettent d’atténuer ce goût. Les clients aiment le salmi de mangouak accompagné de mine bouilli ou de riz. Pour la palourde, c’est un peu plus rare », explique-t-il.

Cette tradition familiale est devenue aujourd’hui la spécialité de Chez François. Mais avec le naufrage du MV Wakashio, les plans sont quelque peu chamboulés. « Nous avons encore un stock que nous gardons pour le week-end. Nous ne pouvons proposer le mangouak en semaine actuellement. Entre-temps, il nous faudra trouver d’autres sources d’approvisionnement, puisque la pêche est interdite ici, à Mahébourg. J’ai entendu dire que du côté de Flacq, on en trouve, mais je n’ai pas encore de contact de ce côté », dit-il.
La conséquence pour François Hosenbocus est que la clientèle a considérablement baissé. « Généralement, les gens viennent de partout, même du nord, pour manger le mangouak. Parfois, ils sont déçus si nous n’en avons pas. Je dois également préciser que nous sommes sur le Guide du routard qui mentionne notre spécialité », précise-t-il. Avec la crise liée à la COVID-19 et les dégâts causés par le MV Wakashio, le restaurateur dit avoir connu une baisse d’au moins 50% de sa clientèle. Ce qui le pousse à dire que la vie à Mahébourg est devenue très difficile pour beaucoup. « Depuis la fin du confinement, on avait des problèmes pour redémarrer. Maintenant, avec le Wakashio, c’est encore plus difficile », dit-il. Il n’empêche que François Hosenbocus s’accroche à la tradition familiale, qu’il a également transmise à son épouse Paula et son fils Owen, qui l’aident dans son petit business.

Coin Casse-Croûte : le patrimoine culinaire

À la Rue La Passe, à Mahébourg, non loin de l’église anglicane, le petit restaurant de la famille Morinière est rarement vide. Il n’est pas rare de voir les gens faire la queue pour avoir une place à l’heure du déjeuner. Ici, on vend des mines bouillis et frits, des bols renversés, du calamar croustillant, du sauté d’agneau et de bœuf, comme dans beaucoup d’endroits à Maurice, mais il y a également des spécialités de la région, qui attirent des clients venant de tous les coins du pays. Voilà 23 ans que Coin Casse-Croûte entretient le patrimoine culinaire de Mahébourg. Le civet de mangouak et le sauté de palourde font des heureux. Ils s’accompagnent de riz, ou pour rester dans la pure tradition mauricienne, de mine bouilli.

Marina Morinière, qui a embarqué toute sa petite famille de cette aventure, concède que, de tous les plats qu’elle propose, beaucoup de clients viennent pour les fruits de mer. « Nous mettons surtout l’accent sur le produit local. D’une part, nous protégeons les pêcheurs de la localité et, ensuite, c’est frais. Sauf qu’avec le Wakashio, nous sommes contraints d’aller nous approvisionner ailleurs », précise-t-elle. Si généralement les mangouak et palourdes sont en abondance dans la région du sud-est, allant de Ville-Noire à Bambous-Virieux, en passant par Bois-des-Amourettes et Anse-Jonchée, aujourd’hui, il faut aller dans l’ouest pour en trouver. « Comme nous avons une clientèle régulière pour ces fruits de mer, nous allons en acheter à Rivière-Noire. Mais on n’en trouve pas beaucoup. La région pour cela, c’est surtout par ici, dans le sud-est », dit-elle.
Notre interlocutrice confie que le travail a quelque peu changé depuis la COVID-19 et, encore plus, à la suite du naufrage du MV Wakashio. « Ma clientèle est surtout mauricienne. J’ai beaucoup de Repeaters. Mais actuellement, il y a tant de personnes n’ont pas de travail. À Mahébourg, par exemple, il y a des plaisanciers, pêcheurs, ceux dans l’industrie touristique qui sont au chômage. Même la foire le lundi n’a plus son attrait habituel », soutient-elle.

En attendant le retour des beaux jours à Mahébourg, Marina Monière et sa petite équipe s’activent à garder la tradition vivante. A noter que le Coin Casse-Croûte est recommandé par le célèbre Guide du Routard.

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