SOCIÉTÉ: L’ODI se positionne dans le débat social

Promouvoir une pratique inclusive de la diversité culturelle et encourager les réflexions citoyennes sur l’avenir du pays. C’est la mission que se propose l’ODI-Maurice (Organisation for Diaspora Initiatives), qui fêtera ses cinq ans d’existence l’année prochaine. À travers l’organisation d’événements culturels, de débats et de conférences, l’ODI-Maurice se propose de mettre en perspective les questions d’histoire et d’actualité, afin d’alimenter une réflexion nationale et patriotique sur les enjeux actuels et futurs pour Maurice.
L’association, fondée en 2007 par Chit Dukhira, compte à présent plus d’une centaine de membres venant de tous les secteurs socio-économiques du pays. L’ODI-Maurice est affiliée à l’ODI-International, une organisation à vocation académique basée à New Delhi en Inde, qui a pour objet l’étude des diasporas en tant que ressources dans les relations internationales et qui chapeaute un réseau international d’organisations poursuivant la même vocation. L’ODI-International est présidée par Ajay Dubay, Professeur de Science politique à l’Université Jawaharlal Nehru de New Delhi.
La création de l’ODI-Maurice en 2007 répondait à une suggestion du Pr Ajay Dubay. Lors d’une visite en Inde, Chit Dukhira rencontre Ajay Dubay, qui lui suggère alors de mettre en place une branche de l’ODI à Maurice. « C’est lui qui m’a convaincu, et moi j’ai dit OK, parce qu’on doit être un citoyen global », se rappelle le président-fondateur de l’ODI-Maurice.
Aboutissement d’un idéal
Mais, pour Chit Dukhira, l’inspiration qui est à l’origine de l’ODI remonte aussi à un idéal de longue haleine en faveur de l’unité dans la diversité mauricienne, un projet bien antérieur à l’indépendance du pays même. Dès le début des années soixante, Chit Dukhira est fortement impliqué dans les activités sociales et culturelles, mais aussi dans la politique active militante en faveur de l’indépendance, « parce qu’à cette époque, il y avait une idéologie », explique-t-il. En 1960, il s’associe à son ancien instituteur, Henri Rawat, pour fonder le Central Cultural Circle, avec pour devise l’ « Unité dans la diversité ». « À cette époque, ce terme d’unité dans la diversité n’est même pas encore utilisé à Maurice », se souvient l’ancien secrétaire du Central Cultural Circle.
Pour Chit Dukhira, la création de l’ODI-Maurice apparaît comme une résurgence de l’idéal humaniste poursuivi depuis avant l’indépendance. Pendant toute la durée de sa période d’activité professionnelle comme cadre des collectivités locales, Chit Dukhira choisit de ne plus s’impliquer dans les activités socioculturelles. « Ce n’était pas possible », explique-t-il, « car il y a des associations socioculturelles qui sont partie prenante de la politique, et moi, je n’aime pas ça. Je trouve que les deux doivent rester séparées. »
Petite soeur du SELEX
Puis, une fois à la retraite – le premier jour même de sa retraite – en 1999, Chit Dukhira fonde le SELEX, une organisation consacrée à la revalorisation du rôle des personnes âgées dans la société et qui vise à promouvoir « l’unité et le développement ». « On a déjà l’indépendance, alors l’unité existe déjà. Il faut désormais évoluer, d’où l’idée de mettre l’accent sur la notion de développement », dit-il.
L’ODI-Maurice, petite soeur du SELEX, poursuit une action semblable de réflexion sur le développement et l’harmonie sociale, mais avec la dimension internationale que lui confère son affiliation à l’ODI-International, et une emphase sur la dimension diasporique.
L’ODI-Maurice s’inspire du caractère inclusif de la culture indienne, « une culture qui regroupe sans contradiction aucune toutes les cultures et les grandes religions, dans une perspective inclusive », explique Chit Dukhira. « Au lieu de faire des associations de castes, des associations communautaires ou religieuses, nous voulons regrouper tout le monde dans une perspective inclusive », ce qui n’est pas toujours facile étant donné la préférence des politiciens mauriciens pour les groupuscules à tendance religieuse, ethnique ou castéiste.
La promotion de l’ « intra-culturel »
L’ODI-Maurice encourage la production culturelle et littéraire. À ce titre, plusieurs lancements d’ouvrages d’auteurs mauriciens se sont effectués sous son égide. Ainsi, récemment, le livre de Mario Serviable, The Do country (publié aux éditions ARS) a été lancé le 8 juillet à la mairie de Beau-Bassin/Rose-Hill. « Nous voulons promouvoir les ouvrages qui constituent une fierté pour la diaspora indienne. Nous essayons d’encourager l’intra-culturel, pas seulement les Indiens mais aussi les autres cultures », explique Chit Dukhira.
« Intra-culturel » est un terme qu’il a forgé, pour dépasser le simple « multiculturel » ainsi que l’ « interculturel », termes déjà galvaudés. « Pour moi, justifie le président-fondateur de l’ODI-Maurice, avec l’intra-culturel, il s’agit d’une pénétration mutuelle des cultures. Je te comprends et tu me comprends. C’est différent d’ « interculturel » où on ne fait que se côtoyer. Nous allons beaucoup plus loin dans la diversité. » C’est dans cette optique que l’ODI a organisé, le 13 août dernier à la salle Marie Marot de Quatre-Bornes, un après-midi « intra-culturel » de chants et danses formant un véritable bouquet de la diversité mauricienne.
Sortir de l’ombre des contributions méconnues
Dans le même esprit, l’ODI-Maurice organise aussi régulièrement des conférences autour de personnalités qui ont joué un rôle dans l’épanouissement de la société mauricienne, mais dont la contribution est encore méconnue. Parmi les personnages marquants qui ont fait l’objet des conférences de l’ODI, on peut noter : le Major Atchia, qui fut un spécialiste précurseur du génie civil (béton, électricité, téléphone, etc.) à Maurice ; Permal Soobrayen, qui fut le secrétaire et le bras droit de Manilal Doctor lors de sa venue à Maurice ; Goolam Mohamed Dawjee Atchia (plus connu sous le nom de GMD Atchia), qui fut le gourou politique de SSR et qui fit nombre de propositions de réformes dont beaucoup ont été réalisées par la suite, comme l’élargissement de l’exécutif et l’encouragement à l’éducation pour les filles.
En septembre dernier l’ODI a organisé deux conférences à la mairie de Port-Louis : l’une sur Basdeo Bissoondoyal, missionnaire indépendant et érudit qui fut un des précurseurs de la mobilisation des années quarante à Maurice ; et l’autre sur SSR et la démocratie locale.
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Dans le collimateur…
Pour l’année à venir, l’ODI-Maurice poursuit son cycle de conférences, notamment avec une causerie du Pr Serge Rivière sur Rémy Ollier, dont le rôle a été crucial dans l’élargissement de l’espace démocratique à Maurice.
À l’occasion de la célébration de l’indépendance, en mars 2012, l’ODI, en collaboration avec Mario Serviable, organisera une exposition, intitulée « Voyage dans le monde du Capricorne ». L’exposition, d’une durée de 5 jours, portera sur l’histoire des cinq pays-membres de la Commission de l’Océan Indien (Maurice, Madagascar, Seychelles, Comores et Réunion/France), avec la participation d’artistes réunionnais.

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