Le dernier sondage AfrobaromËtre met en lumiËre une inquiÈtante perte de confiance du public mauricien dans les institutions politiques et les dirigeants Èlus du pays.
Défiance envers les institutions démocratiques
Un fait est indéniable : la majorité des Mauriciens n’ont que très peu ou pas du tout confiance dans de nombreuses institutions politiques du pays. Ainsi, 66% des citoyens se méfient des Conseils municipaux ou de district, tandis que 63% expriment la même méfiance envers le parti au pouvoir et l’opposition politique. L’Assemblée nationale n’échappe pas, non plus, à cette défiance, avec 61% de sceptiques.
Si le Premier ministre est aussi touché par un manque de confiance majoritaire (57%), il parvient à se démarquer en jouissant d’un taux de confiance plus élevé que son propre parti, avec 41% des citoyens lui accordant leur confiance, contre 35% pour le parti au pouvoir, le MSM et ses alliés.
Pour la justice (56%) et la commission éléctorale (49%), il y a plus de confiance que d’inconfiance au sein de la population. Cela est plutôt rassurant. Par contre, la place favorable du ministère de la Santé (55%) et la police (52%) peut surprendre dans la conjoncture de la gestion du Covid, des arrestations arbitraires et des accusations de planting…
Corruption : un problème croissant
Sur le plan de la corruption, environ 6 Mauriciens sur 10 (61%) estiment que le niveau de corruption a augmenté « quelque peu » ou « beaucoup » au cours de l’année écoulée. Parallèllement, entre 2020 et 2024, les Mauriciens considèrent de moins en moins la corruption comme le problème le plus important du pays, passant de 19% en 2020 à 11% en 2024. Par ailleurs, s’ils étaient 40% à considérer que la corruption avait beaucoup augmenté en 2022, ils sont 42% à le penser en 2024, et 29% à penser qu’elle reste au même niveau entre 2022 que 2024.
Démographiquement, ce sont les habitants des villes qui pensent que la corruption est en hausse (68%). Ils sont majoritairement des hommes (64%) âgés entre 25 -34 ans (70%) qui ont un niveau d’éducation secondaire (65%) et qui sont parmi les plus pauvres de la société (87%).
Députés et chefs d’entreprise les plus visés
Par ailleurs, 3 citoyens sur 10 pensent que « la plupart » ou « tous » les membres de l’Assemblée nationale (30%), les dirigeants d’entreprises (28%), ainsi que les fonctionnaires du bureau du PM (28%) sont corrompus. De manière plus large, la majorité des Mauriciens perçoit au moins « un peu » de corruption parmi toutes les institutions publiques et les dirigeants clés du pays.
En général, les leaders religieux, les ONG, les agents de la MRA et les fonctionnaires sont perçus comme les moins corrompus du pays, alors que les députés (30%), les chefs d’entreprises (28%) et le PM et ses officiels (28%) sont considéres comme étant le plus à même d’être les plus corrompus.
De plus, 63% des Mauriciens considèrent que le combat du gouvernement contre la corruption est un échec. Ils étaient 76% à le penser en 2022.
Représaillles en hausse pour les dénociateurs
Enfin, une grande majorité (67%) croit que les citoyens ordinaires risquent des représailles ou d’autres conséquences négatives s’ils dénoncent la corruption aux autorités. En revanche, seulement 28% pensent pouvoir s’exprimer sans crainte.
Gouvernance et responsabilités
Le sondage révèle également que près de 8 Mauriciens sur 10 (78%) estiment que l’Assemblée nationale doit s’assurer que le PM rende compte régulièrement de la manière dont son gouvernement dépense l’argent des contribuables. Cependant, une légère majorité (53%) pense que le PM ignore « rarement » ou « jamais » l’Assemblée nationale et les tribunaux, tandis qu’environ 4 citoyens sur 10 sont en désaccord.
Limitation des mandats
Près des 2/3 des sondés (64%) affirment que la Constitution devrait limiter le mandat du Premier ministre à un maximum de deux termes, une opinion en augmentation par rapport à 2022 (61%).
Performance du gouvernement
Les Mauriciens critiquent la gestion gouvernementale sur plusieurs fronts, avec 68% estimant que le gouvernement gère mal la réduction des inégalités entre riches et pauvres, 61% critiquant sa gestion de l’économie, et 59% insatisfaits de la création d’emplois.
Par contre, ils sont 55% à affirmer que le gouvernement arrive à fournir de l’eau et des services sanitaires adéquats à la population, 60% sont satisfaits du servaice d’entretien des routes et des ponts, 63% à reconnaître que le service de santé s’est amélioré, et 70% des personnes se disent satisfaits que les besoins en éducation sont adressés.
… et des leaders élus
Si les sondés approuvent la performance de Pravind Jugnauth comme Premier ministre à 49% contre 43% qui désapprouvent, par contre, les Mauriciens sont plutôt insatisfaits de la performance de leurs députés (49% contre 42%) et de leur élu municipal (48% contre 44%).
Conclusion
Le dernier sondage Afrobarometer révèle une méfiance importante des Mauriciens envers leurs institutions démocratiques clés et leurs dirigeants élus. Bien que la corruption ne soit pas considérée comme le problème le plus urgent à résoudre, une majorité significative de citoyens perçoivent une augmentation du niveau de corruption au cours de l’année écoulée et craignent que la dénonciation de ces pratiques ne les expose à des représailles. Par ailleurs, les Mauriciens expriment un soutien marqué pour le rôle de l’Assemblée nationale dans la supervision des dépenses publiques effectuées par le PM. Cependant, ils estiment que le gouvernement doit encore progresser en matière de réduction des inégalités économiques, de gestion de l’économie et de création d’emplois..