SUITE À UNE DEMANDE POUR ÊTRE SYNDIQUÉS : Une vingtaine d’employés licenciés après un “préavis” de 5 minutes…

Une vingtaine de travailleurs manuels mauriciens de l’International Water and Electric Company ont été sommairement licenciés samedi après un “préavis” de seulement cinq minutes. Ils étaient affectés aux travaux d’épierrage de la Montagne Lagrave à Midlands dans le cadre de la construction du Bagatelle Dam. Alors que la compagnie a évoqué des raisons économiques pour expliquer leur mise à pied, la Confédération des travailleurs du secteur privé soupçonne qu’ils ont été priés de plier bagage parce qu’ils voulaient se syndiquer à la Chemical Manufacturing and Connected Trades Employees Union, une des affiliées de cette centrale syndicale.
« La konpani nepli ena travay pou zot. Nou pa kapav kontinie proze. Zot bizin pran zot zafer zot al tou de swit ! »C’est ainsi, selon Jaynaden Murugan, un des vingt travailleurs licenciés, qu’un des préposés de l’International Water and Electric Company leur a annoncé samedi leur mise à pied. « Nou finn al dezene midi. Kan nou retourne 13 zer, zot nek apel nou ek zot dir nou sa. Nou tou gagn mari sok », raconte-t-il. Ces habitants de Dubreuil, comptant environ une année et demie de service, étaient tous affectés aux travaux d’épierrage de la Montagne Lagrave, à Midlands, dans le cadre de la construction du Bagatelle Dam, en tant que « Stone-drillers », « gate-keepers », « Kitchen Helpers », entre autres. « Notre travail consistait entre autres à faire des trous dans la pierre, pour y déposer des explosifs afin de dynamiter la montagne », explique Jaynaden Murugan.
Pour la secrétaire de la Confédération des travailleurs du secteur privé (CTSP), Jane Ragoo, il n’y a aucun doute : ces employés de la compagnie chinoise ont été licenciés parce qu’ils avaient entamé des démarches pour adhérer à la Chemical Manufacturing and Connected Trades Employees Union (CMCTEU). « Nous avons, le 29 juillet dernier, écrit à la direction de cette compagnie pour lui dire que maintenant que CMCTEU représente plus de 30 % de la main-d’oeuvre, nous lui accordons un délai expirant le 2 septembre 2013, c’est-à-dire aujourd’hui, pour discuter de notre reconnaissance syndicale, faute de quoi nous seront obligés de référer tout litige au Tribunal. Le licenciement de tous les employés mauriciens à la veille même de l’expiration de notre ultimatum, alors que les travailleurs chinois, népalais et bangladeshis n’ont été aucunement touchés par cette mesure n’est pas une coïncidence ! », soutient-elle.
Un autre licencié, Chandrabose Keenoo, explique que ses camarades et lui voulaient être membres d’un syndicat pour faire respecter leurs droits en tant que travailleurs. « Nou bizin travay 24/24, 7/7. Enn zour off pena ! », s’indigne-t-il. « Nou, nou pena enn plas pou manze. Bizin manz lor montagn kouma zako. Sinwa, Bangladaishi ek Nepale ena plas pou manze. Nou Morisien tret nou kouma zanimo ! », ajoute-t-il.
Parmi les licenciés, il y a également des femmes. « Twalet nou pena… Nou bizin al dan twalet zom nepale ! », raconte Roopa Sanichurwah. D’autres licenciés expliquent qu’ils sont obligés d’effectuer des tâches qui sont en dehors de leurs attributions. « Mo anploye kouma gardien. Me zot obliz mwa lav labou dan larou kamion ek mo iniform ek kravat ! », ricane un autre.
Mais ce qu’il les a le plus pousser à vouloir se syndiquer, c’est le manque de sécurité sur le site. Par exemple, ils sont appelés à grimper, sans harnais, sur les flancs de la falaise pour aller placer les explosifs. « Enn kamarad tir mwa depi lao », raconte un autre.« Finn ena ka kot mo koleg inn blese, ros inn tom lor li… Finn gagn boukou difikilte pour amenn li lopital », ajoute un autre.
Jane Ragoo dit avoir constaté que certaines compagnies chinoises qui opèrent à Maurice sont réfractaires à la syndicalisation de leurs employés mauriciens. « Elles trouvent toutes sortes de subterfuges pour ne pas nous donner la reconnaissance syndicale comme l’exige la loi », explique-t-elle.
« Depuis février 2009, les lois du travail ont facilité sur papier la syndicalisation des travailleurs mauriciens en n’exigeant qu’une représentativité de 30 %. Mais dans la réalité c’est une toute autre histoire. Dès que certains employeurs, surtout étrangers, entendent parler de syndicat, ils évoquent toutes sortes de prétextes pour mettre les travailleurs,  mauriciens surtout, à la porte », s’indigne-t-elle. « Les inspecteurs du ministère du Travail devraient se monter plus vigilants dans les cas d’employeurs étrangers afin de mieux protéger les Mauriciens. C’est ça leur mission », ajoute-t-elle.

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