TRAVAUX DE TOUT-À L’ÉGOUT : Véritable menace sanitaire à Quatre Bornes/Rose-Hill

Déviation de routes, nids de poule, gravats, chemins boueux, pollution sonore, poussière… Les travaux visant à raccorder une première partie des Plaines Wilhems au réseau de tout-à-l’égout est un véritable chemin de croix pour les habitants de Quatre Bornes et Rose-Hill. Outre les automobilistes qui se plaignent de l’état déplorable des routes et des déviations, les habitants de ces régions se disent envahis par les travaux. Certains habitants accusant même ces travaux de provoquer des complications de santé en tous genres. Éternuement, toux, fièvre,  difficultés à respirer, picotements des yeux, insomnies… la liste est interminable. Tant et si bien qu’ils ne savent plus à quel saint se vouer, où à quelle porte frapper…
Chez la famille T, à l’Avenue Ollier, Quatre Bornes, les sept personnes qui vivent dans la résidence familiale sont toutes récemment tombées malades. Presque simultanément, explique le père de famille, ajoutant que « ce sont les enfants en bas âge qui ont le plus souffert de cette poussière qui ne cesse d’être soulevée à chaque coup de vent, ou à chaque passage d’un véhicule dans cette rue très fréquentée ». Ce calvaire, cela fait deux mois que la famille T ainsi que les autres résidents de la localité le vit. Soit, depuis le début des travaux de fouilles dans les ruelles jouxtant l’avenue Ollier. La famille T est persuadée, et avis médical à l’appui, que c’est la poussière provoquée par les travaux qui a causé leur problème de santé. « Nos enfants sont tous tombés malades avec cette poussière. Nous les grands, ça passe. Mais kan zenfan pa pe kapav dormi, pe gagn lestoma serré, li grave. Comié fois pou amenn kot docter. Comié larzan pou dépensé », dit Mme T.
Fissures
Son mari, qui lui-même a perdu sa voix pendant une semaine en raison de l’exposition à la poussière selon son médecin, s’indigne lui de la qualité des travaux effectués. Ces travaux, dit-il, ont provoqué des fissures aux murs de sa maison. M.T soutient que dans lors des fouilles effectuées dans la rue pour poser le tuyau de raccordement, les employés ont creusé jusqu’à deux pieds en-dessous des murs de sa maison. « Lorsque j’ai constaté ces dégâts, j’ai immédiatement fait stopper ces travaux et contacter la Waste Water Management Authority qui, après une visite des lieux, m’a donné l’assurance que tout sera réparé », dit-il. M.T déplore toutefois la durée des travaux. « Zot allé, zot vini, zot réalé, zot révini. Travay la pa fini. La poussière la zamé fini », s’indigne-t-il. Comme les autres habitants de la région, il dit comprendre la nécessité de ces travaux en vue d’obtenir un service essentiel. « Mais à quel prix? Nou la santé en danzé », dit-il.
Un peu plus loin, à Trèfles, une grand-mère remercie le ciel que sa petite fille ait pu être sauvée. Cette dernière, asthmatique, en vacances actuellement à Maurice, est tombée gravement malade il y a une semaine. « Elle a fait une crise d’asthme aigüe. Au départ, elle toussait un peu, puis son estomac a commencé à ronfler. Nous avons dû l’emmener en urgence à l’hôpital à 5h du matin », raconte la grand-mère. Immédiatement mis sous respiration artificielle, elle a dû par la suite passer plusieurs jours en clinique. « Si nous avions tardé un peu,  ses poumons, affaiblies par l’étouffement, l’aurait lâché, nous a expliqué le médecin », dit la grand-mère. De retour depuis peu à la maison, la petite doit restée confinée à l’intérieure, au risque de tomber à nouveau malade. Elle doit toujours avoir son inhalateur à portée de main.
Le Dr I. Jowahir qui a ausculté de nombreux patients de ces régions ces derniers temps est catégorique : « la poussière est un grand danger pour la santé ». Une exposition constante à une épaisse poussière met en danger la santé des asthmatiques, des personnes âgées, des enfants, des personnes alitées, de ceux qui souffrent de maladies chroniques telles le diabète ou le cancer… « Même ceux en bonne santé risquent de tomber malades », indique le généraliste.
« Zet delo pou lapoussiere pa levé »
Chez la famille L. à Plaisance, les problèmes de santé en raison de la poussière sont récurrentes depuis le début des travaux de tout-à-l’égout dans cette localité. Les quatre enfants, portant sans aucun antécédent allergique à la poussière, sont tous tombés malades. « Certains ont eu des infections pulmonaires, d’autres des picotements aux yeux, et à chaque fois, les médecins nous ont dit que c’était à cause de la poussière », raconte A.L. La famille a effectué plusieurs plaintes auprès de la WWMA. « Zot vini, zot arrose semin ek delo, mé apré lapoussière la relevé », expliquent les membres de la famille L. Pour éviter les risques de récidive des problèmes de santé, la famille a dû investir dans une bâche qu’elle a placé autour de sa maison. « Malgré sa, la poussière partou kot ou passé. Asoir pa kapav dormi. Nou touffé are sa. Pa koné sipa bizin ouvert la fenet ou soi ferme la fenet », déplore A.L. Outre la poussière qui s’incruste partout dans la maison, les ménagères déplorent qu’elles ne peuvent pas mettre leur linge à sécher. Le Dr. I. Jowahir fait ressortir que ce n’est pas non plus une solution de rester cloîtrer chez soi. « Les maisons à Maurice ne sont pas hermétiques. Cela peut provoquer une autre crise d’asthme », dit-il.
Des travaux qui s’éternisent
S’ils concèdent que ces travaux sont nécessaires, les citadins n’arrivent toutefois pas à comprendre pourquoi ces travaux s’éternisent. Et surtout le désordre dans le cadre de ces travaux. « Tantôt ils sont dans notre rue, le lendemain dans l’autre rue, tantôt ils reviennent dans la cour. Ils n’y a pas de coordination dans ces travaux. Pourquoi ne pas faire ces travaux rue par rue, et éviter ainsi que toute cette poussière ne soit soulevée de partout », disent-ils. Entretemps, les travaux piétinent, les routes ne sont toujours pas asphaltées et c’est la santé de certains résidents de ces localités qui en pâtissent. D’autant que la culture du kassé ranzé à Maurice fait partie des meours. « Si pa tout-à l’égout, ce CWA. Si pa CWA, ce téléphone, si pa téléphone, troitoir, tout létan semin pe kassé, pe ranzé, et nu ki soufer », disent les personnes dépités.
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Sunil Jaunky (WWMA) : « Les contracteurs essayent de minimiser les dégâts »
Les routes de Quatre Bornes et Rose Hill et des régions avoisinantes font effectivement l’objet de fouilles depuis plusieurs mois. Cela en marge des trois gros projets pour raccorder cette partie de Plaines Wilhems au réseau de tout-à-l’égout dans le cadre du Plaine Wilhems Severage Project (PWSP). Scindées en trois phases, ces fouilles, initiées par la WWMA, visent à prévenir la dégradation de nos nappes souterraines. Divisées en Lot IA, Lot 1B, et Lot 2  – allant de Jumbo-Quatre Bornes, à Mont Roches, en passant par Stanley, sodnac, Palma, Plaisance, le Vieux Quatre Bornes, Boundary, Trèfles, entre autres – les travaux, dépendant de la localité et du lot ont démarré depuis aout 2008. La mise en place du réseau, au coût de Rs9-10 milliards, confié à Sotravic Ltée, et d’autres partenaires étrangers, se fait par étape et les travaux se font progressivement et dureront sur une période de cinq ans. Quelques 32 000 maisons devraient par la suite être raccordées au réseau. Sunil Jaunky, Public Relations Director de la WWMA indique que l’organisme est consciente des inconvénients causés par ces travaux. « Mais les contracteurs essayent tant que possible de minimiser ces inconvénients. Ces inconvénients durent un temps. C’est un mal pour un bien, », dit-il. Sunil Jaunky soutient que la WWMA est constamment à l’écoute des habitants. Il fait remarquer que pour toute fouille, soulever la poussière est presque naturel. « Et surtout que ces derniers temps nous n’avons pas eu de pluies. Mais lorsqu’il pleut aussi nous recevons des plaintes, car cela provoque de la boue », dit-il. Pour éviter la poussière, les contracteurs arrosent les rues. Mais pas à la satisfaction des habitants, note-t-on. D’autant que dans certaines régions, les travaux ont accusé de sérieux retard. A cela, la WWMA et Sotravic, qui se disent très concernés par les problèmes que peuvent causés ces travaux, indiquent qu’il y a des conditions – telle l’entassement du sol avant de pouvoir asphalter la route – à respecter pour que les travaux soient convenablement effectués. Les travaux auraient aussi pris du retard en raison des tuyaux d’alimentation de la Central Water Authority qu’il faut remplacer dans certains endroits, dit-on.

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