Vol privé malgache : les dessous d’un atterrissage controversé à Maurice

Un rapport déposé par le Premier ministre, hier  le 28 octobre 2025 à l’Assemblée nationale détaille les circonstances de l’atterrissage d’un vol privé de Trans Ocean Airways, une compagnie enregistrée à Madagascar et appartenant au groupe Sodiat, dans la nuit du 11 au 12 octobre 2025 à l’aéroport SSR.
Ce vol a été autorisé à se poser à 00h44, par Jet Prime Ltd, filiale d’Airport Holdings Ltd (AHL), après plusieurs heures d’échanges tendus entre les autorités mauriciennes et le pilote bloqué dans l’espace aérien.

Une demande tardive et suspecte

Tout commence à 21h30 le samedi 11 octobre, lorsque le bureau du Department of Civil Aviation (DCA) pour s’enquérir auprès de  Jet Prime d’un éventuel vol d’évacuation médicale depuis Madagascar. Aucune demande n’avait alors été reçue.
À 21h58, Trans Ocean Airways envoie un courriel indiquant qu’une requête allait être soumise par Jet Prime. À 22h, le pilote à Antananarivo réclame une autorisation de décollage, mais le DCA lui rappelle que le vol ne peut pas décoller sans autorisation préalable.
Pourtant, à 22h19, selon la tour de contrôle malgache, l’appareil décolle déjà vers Maurice — avant toute approbation. Ce fait constitue, selon le rapport, une violation des règlements de l’aviation civile.

Procédure d’urgence et intervention politique

À partir de 23h12, une demande formelle de vol privé « pour raisons touristiques » est introduite par Jet Prime. Le DCA consulte alors Airports of Mauritius Ltd (AML) et le Passport and Immigration Office (PIO) pour les vérifications de routine.
Le PIO confirme à 00h13 que les cinq passagers et deux membres d’équipage n’apparaissent sur aucune base de données sensible (Interpol, World Check, etc.). Parmi eux figure Christian Ntsay, ancien Premier ministre de Madagascar, classé comme foreign politically exposed person.

Le pilote, affirmant n’avoir plus qu’une heure de carburant, insiste pour atterrir à Maurice ou à La Réunion. L’aéroport Gillot indique ne pas pouvoir accueillir le vol sans autorisation préalable. Finalement, l’Ag. Director of Civil Aviation donne le feu vert à 00h20, invoquant des raisons de sécurité aérienne. L’autorisation écrite est émise à 00h28 et l’avion atterrit à 00h44.

Un accueil planifié et des zones d’ombre

Les vérifications postérieures montrent que quatre personnes – dont Gilbert Noël, membre du conseil d’administration d’AHL et Jet Prime, et Louis Raymond Daryl Rivet – attendaient déjà les passagers avant même l’atterrissage, ce qui suggère un atterrissage planifié à l’avance.
Les passagers, dont Maminiaina Ravatomanga, homme d’affaires malgache déjà connu des autorités mauriciennes, ont déclaré résider à Belle Vue Harel, chez Andry Rabetokotany, détenteur d’un Occupation Permit à Maurice.

Les douaniers de la MRA ont scanné neuf valises et six sacs à main, sans rien de suspect. Une valise identifiée plus tard comme appartenant à Mamy Ravatomanga a été rouverte le 14 octobre : elle ne contenait qu’un accessoire de voiture.

Mesures annoncées

Le rapport indique que :

Les procédures du DCA seront révisées, notamment pour les vols privés non routiniers.

Toute demande politiquement sensible nécessitera désormais l’approbation du Premier ministre.

La poursuite des opérations de Jet Prime Ltd fera l’objet d’un examen.

Des conseils légaux sont demandés pour poursuivre le pilote et l’opérateur pour avoir décollé sans autorisation.

Une notification sera envoyée aux autorités malgaches pour signaler la violation des règlements internationaux.

Encadré : Séquence des événements