Israël mène des raids intenses à Téhéran, cible les Gardiens et la prison d'Evine

Israël a appelé lundi les habitants de Téhéran à s'éloigner des bases militaires, après d'intenses frappes sur la capitale iranienne ciblant des centres des Gardiens de la Révolution et la prison d'Evine, au 11e jour de la guerre entre les deux pays.
Au lendemain des frappes américaines qui ont, selon le Pentagone, "dévasté le programme nucléaire iranien", la Maison Blanche a pour sa part pressé le pouvoir iranien de reprendre les négociations nucléaires, s'il voulait se maintenir à la tête du pays.
Téhéran a menacé les Etats-Unis d'une "action ferme" après ces bombardements du site souterrain d'enrichissement d'uranium à Fordo et d'installations nucléaires à Ispahan et Natanz (centre).
Le directeur de de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, a jugé impossible à ce stade d'évaluer l'étendue des dégâts et réclamé lundi un accès aux sites nucléaires iraniens.
Israël a pour sa part annoncé avoir mené "des frappes d'une puissance sans précédent contre des cibles du régime et des organes de répression" à Téhéran, dont "la prison d'Evine, le quartier général de la sécurité intérieure des Gardiens de la révolution (armée idéologique de l'Iran, NDLR) et le quartier général du Bassidj", une milice de volontaires islamistes.
La justice iranienne a fait état de dégâts dans certaines parties de la prison d'Evine, où sont détenus des Occidentaux, prisonniers politiques et opposants.
Les deux Français, Cécile Kohler et Jacques Paris, qui y sont détenus depuis plus de trois ans, "n'auraient pas été touchés" a affirmé le chef de la diplomatie française, Jean-Noël Barrot, dénonçant une frappe "inacceptable".

L'armée israélienne a ensuite appelé les habitants de Téhéran à s'éloigner des infrastructures militaires et sécuritaires annonçant la poursuite de ses bombardements "dans les prochains jours".
Selon l'agence iranienne Fars, des explosions ont été entendues en fin d'après-midi près d'Ahvaz, dans le sud-ouest iranien.
Israël a aussi indiqué avoir mené des frappes pour "bloquer les voies d'accès" au site de Fordo enfoui sous une montagne, au sud de Téhéran.
- Les "boums" -
A plus de 1.500 km de là, en Israël, les sirènes d'alerte ont retenti dans plusieurs régions après des salves de missiles iraniens.
"Ici, on entend moins les +boums+", confie à l'AFP Muriel Azria, professionnelle du tourisme, qui comme de nombreux habitants de Tel-Aviv a pris l'habitude de se réfugier dans le métro et les parkings de la ville.
Des dégâts "près d'une installation stratégique" électrique ont perturbé la distribution de courant dans le sud, a indiqué la compagnie publique, sans en préciser la cause.
Les règles de la censure militaire en Israël interdisent de publier certains détails concernant les dommages.
En Iran, la guerre a fait plus de 400 morts et 3.056 blessés, en majorité des civils, selon un bilan officiel. Les tirs iraniens sur Israël ont fait 24 morts, d'après les autorités.
Affirmant que l'Iran était sur le point de se doter de la bombe atomique, Israël l'a attaqué le 13 juin, bombardant des centaines de sites militaires et nucléaires et tuant les plus hauts gradés du pays ainsi que des scientifiques du nucléaire.
L'Iran, qui riposte avec des tirs de missiles et de drones vers Israël, dément vouloir fabriquer l'arme atomique mais défend son droit à un programme nucléaire civil.
- L'Iran menace les Etats-Unis -
Le chef d'état-major des forces armées iraniennes, Abdolrahim Mousavi, a encore promis lundi une "action ferme" après l'"erreur américaine".
Téhéran avait menacé la veille d'actions contre les bases militaires américaines au Moyen-Orient.
Les Etats-Unis ont indiqué surveiller "activement la situation dans le détroit d'Ormuz", auquel "le régime iranien serait stupide" de s'en prendre.

Washington avait appelé dimanche Pékin à dissuader Téhéran de riposter à l'attaque américaine en fermant cette zone de transit maritime du cinquième du pétrole mondial.
La télévision d'Etat iranienne a par ailleurs annoncé l'arrestation d'un "ressortissant européen" soupçonné d'être un "espion" au service d'Israël, sans plus de précision.
Invoquant la "situation sécuritaire" dans la région, des compagnies pétrolières étrangères dans le sud de l'Irak ont "évacué" une partie de leur personnel étranger.
Des compagnies aériennes européennes, américaines et asiatiques ont suspendu ou réduit leurs dessertes du Moyen-Orient.
- Evaluation des dégâts -

Le président américain, Donald Trump, s'est prévalu dimanche de "dommages monumentaux" infligés aux sites nucléaires iraniens.
Mais des experts estiment que l'Iran pourrait avoir évacué le matériel nucléaire des sites visés.
Un haut responsable iranien, Ali Shamkhani, a affirmé que le pays possédait toujours des stocks d'uranium enrichi.
L'Iran a enrichi de l'uranium au niveau de 60%, selon l'AIEA, proche du seuil de 90% requis pour fabriquer une bombe atomique. Mais l'agence dit n'avoir décelé jusque-là aucun indice d'un "programme systématique" iranien de production d'une arme nucléaire.
Israël, qui maintient l'ambiguïté sur sa propre possession de l'arme atomique, détient 90 ogives nucléaires, selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri).
- "Changement de régime"? -

Donald Trump, qui avait relancé les négociations avec Téhéran pour encadrer son programme nucléaire - lancées en avril sous médiation d'Oman - est "toujours intéressé" par un règlement diplomatique, a affirmé lundi la porte-parole de la Maison Blanche.
Mais "si le régime iranien refuse de s'impliquer dans une solution diplomatique (...) pourquoi le peuple iranien ne retire pas le pouvoir à ce régime incroyablement violent qui le réprime", a-t-elle interrogé.
"Si le régime iranien actuel est incapable de RENDRE A L'IRAN SA GRANDEUR, pourquoi n'y aurait-il pas un changement de régime ???" avait écrit la veille M. Trump sur son réseau Truth social.
Un changement de régime "serait un résultat bienvenu — même si ce n’est pas un objectif militaire de l'État d’Israël", a pour sa part réaffirmé lundi un porte-parole du gouvernement israélien, David Mencer.