Élections générales 2019 : Quand le citoyen lambda se porte candidat

Ces élections générales vont surprendre tant par la multiplicité et l’hétérogénéité des 200 candidats et plus inscrits. En dehors des grands partis habituels, quelques citoyens ont décidé de prendre les choses en main et de participer aux élections. Eux, ce sont des éco-entrepreneurs, des défenseurs des droits des animaux ou encore des jeunes investis dans leur localité.

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Week-End a rencontré quatre candidats atypiques qui, élus ou pas, ont la ferme intention d’aller jusqu’au bout pour faire passer leurs messages. Candidat indépendant ou membre d’un jeune parti, Oliver Thomas, Linley Moothien, Vashil Jasgray et Raj Ragoonath se préparent à la mêlée du 7 novembre.

Déjà très présents sur le terrain, ces citoyens lambda ont choisi de n’intégrer aucun parti traditionnel par principe. Oliver Thomas est l’un de ceux qui veulent y « krwar. » Candidat indépendant au N°20, ce jeune Beau-Bassinois de 26 ans est parvenu à se construire une popularité solide dans la région, et même au-delà, en à peine quelques mois sur les réseaux sociaux. Une popularité qui lui a d’ailleurs valu d’être contacté par tous les grands partis traditionnels pour briguer les suffrages à leurs côtés. « J’ai refusé, car je pense que ce que le citoyen mauricien recherche le plus en ce moment c’est l’intégrité. Aussi, je veux surtout montrer aux jeunes que l’on peut faire de la politique et aimer en faire sans argent ou agents. Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux, tout change. Avec une simple caméra, vous pouvez impacter tellement plus de gens que dans un congrès ou un meeting, par exemple. »

Ainsi, pour lui, faire de la politique et participer à ces élections générales est le meilleur moyen pour faire bouger les choses « à grande échelle ». « Mon équipe d’ambassadeurs et moi, nous travaillons déjà avec de petits entrepreneurs dans la localité pour les aider à grandir. Avoir en plus de cela l’approbation du peuple nous permettra de faire plus de choses. Ce sera une des premières mesures que je prônerai si je devais être élu », dit-il, étant lui-même un éco-entrepreneur engagé dans le recyclage de plastique, entre autres. « Et si je suis élu, ce sera une vraie révolution idéologique », dit-il.

Sanctuaire pour  chiens errants

De nouvelles idées et un changement de comportement, c’est aussi ce que souhaite Linley Moothien. Connu pour son combat pour la protection des animaux, notamment des chiens errants, ce chef d’entreprise de 44 ans sera candidat indépendant au N°1. « J’ai décidé de participer aux élections car j’en ai ras le bol de taper à la porte de X, Y ou Z pour faire bouger les choses. Il est temps de mettre la main à la pâte », confie-t-il à Week-End. Très impliqué dans le social depuis les inondations de Canal Dayot il y a quelques années, cet habitant de Sable Noir est lui aussi très connu dans la localité.

« Les inondations ont été le déclic, car c’est dans ces moments que vous prenez conscience de la fragilité de notre écosystème. J’ai alors commencé à travailler avec les gens de la localité. Puis, je me suis vite rendu compte que des gens venaient souvent jeter des chiots dans la région. Il fallait que quelqu’un s’en occupe. C’est pour cela que nous avons, quelques proches et moi, décidé d’ouvrir le sanctuaire de La Brasserie, où nous nous occupons tous les jours de 200 chiens. C’est le modèle que nous souhaitons que l’État mette en place dans les quatre coins de l’île. » Linley Moothien, aussi fondateur de l’ONG 4 Tilapat, est persuadé que tout commence par cela, soit par le respect et la protection des animaux et des plantes endémiques. « Nous n’avons pas le temps de nous asseoir tous les samedis pour faire des conférences, car pendant ce temps-là, nous nourrissons 200 chiens et plus au sanctuaire », dit-il.

En effet, coûte que coûte, le travail doit être fait. À 31 ans, Vashil Jasgray, leader du parti Mouvman Zeness Morisien, a décidé avec son groupe d’amis de représenter la débrouillardise et la détermination d’une jeunesse mauricienne qui veut s’en sortir. Project Manager pour le Kolektif Rivier Nwar, cet habitant de Plaine-Magnien sera le seul candidat de son parti au N°12. « Nous voulions aligner plus de candidats, mais nous avons eu trop peu de temps pour tout organiser », dit-il. Vashil Jasgray a un parcours des plus élogieux, mais le jeune homme détenteur d’une licence en Social Work et d’une maîtrise en Project Planning & Management n’a pourtant pas eu la vie facile.

Distribution de serviettes hygiéniques

« Ma mère m’a élevé seule. Elle travaillait à l’usine et fabriquait des sacs que je vendais au marché pour pouvoir payer mes examens et m’acheter des vêtements, etc. » Après le décès de sa mère en 2014, il se retrouve seul et sans boulot. « Je travaillais au National Women Council et ai été injustement licencié, car l’on pensait que j’étais un nominé politique. Sauf que non, j’avais été choisi pour mes compétences. J’étais second sur la liste des postulants. Le premier ayant refusé l’emploi, j’ai été retenu automatiquement. J’ai subi une injustice alors que je n’avais que 25 ans et que j’avais travaillé dur pour en arriver là. Avec le décès de ma mère, j’ai dû travailler comme maçon pendant pas mal de temps pour payer les factures. Donc, la misère et le chômage, je connais et je ne veux pas que d’autres jeunes subissent la même chose », confie-t-il.

C’est pourquoi il s’engage. Il veut, au travers de sa participation aux élections générales, encourager et inspirer plus de jeunes à ne pas baisser les bras malgré toutes les difficultés. « Je sais très bien comment cela se passe. J’ai travaillé pour la National Empowerment Foundation (NEF) et je sais que ce sont souvent les députés de la région qui prennent les plus grosses décisions, et les travailleurs sociaux qui voient comment vivent les gens dans les poches de pauvreté ne font qu’exécuter les ordres. S’intéresser à la politique est le meilleur moyen pour se faire entendre et pour faire bouger les choses », dit-il. Vashil Jasgray, lui aussi très populaire dans le Sud, est un « zanfan lakour » qui veut œuvrer pour la création d’une école de la mer, d’un village touristique à proximité de l’aéroport pour les artisans de la région, mais aussi pour la distribution de serviettes hygiéniques dans les collèges pour filles.

Par ailleurs, parmi ces nombreux citoyens lambda, l’on retrouve aussi Raj Ragoonath. Membre du Mauritius National Congress, le sexagénaire sera candidat au N°18. Président de la Mauritius Telecom Employees Association (MTEA), il veut se faire entendre. « Je souhaite utiliser cette plate-forme pour dénoncer plusieurs projets, dont le Safe City », dit-il. Ainsi, comme lui, de nombreux Mauriciens iront s’inscrire dans quelques jours, dans l’espoir de se faire entendre enfin.

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