Dimanche 11 Juin 1978 : L’enquête judiciaire sur l’incendie du Mauricien

Puisés dans nos archives, ces extraits se proposent de faire revivre aux uns et découvrir aux autres, chaque dimanche, les faits marquants qui ont fait la UNE de notre hebdomadaire il y a quarante ans, tels qu’ils furent rapportés alors dans nos colonnes.

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Deux coups de théâtre cette semaine : un ex-pompier municipal vient faire de graves allégations contre le député du MMM, Amédée Darga, et le gardien Yves Bedos, lance de son côté, une accusation sérieuse contre Sydney Selvon, ex-rédacteur en chef du Militant. Appelé en cour par Me Duval, l’avocat des membres du State Security Service (SSS) impliqués dans l’enquête judiciaire, l’ex-pompier I. Edoo affirme que Amédée Darga était au courant de l’incendie avant que celui-ci n’éclate et que le député lui aurait demandé de saboter l’équipement et le téléphone du service des pompes le jour de l’incendie.

L’affaire prend donc une nouvelle tournure et on s’attend à ce qu’elle dure plusieurs semaines encore.

Lindsay Rivière, rédacteur en chef du Mauricien

Lundi 5 juin

Paul Bérenger, secrétaire général du Mouvement Militant Mauricien, est encore une fois appelé devant le tribunal, où il est contre-interrogé par Me Gaëtan Duval, avocat des membres du SSS, impliqués dans l’enquête, MM. Fulena, Sénéque, Venkatachellum et Ramiah.

Les questions de l’avocat portent sur deux photos où Jean-Paul Sheik Hossen aurait identifié des personnes qui auraient, selon lui, joué un rôle dans l’incendie du Mauricien. Le témoin fait état d’une contradiction entre les versions de Sheik Hossen et le gardien Yves Bedos, mais maintient qu’il croit les points fondamentaux des « révélations » de Sheik Hossen sur les activités du SSS et l’incendie du Mauricien.

Me Duval cite des extraits de jugements où des déclarations de Paul Bérenger devant des cours de justice ont été rejetées.

 

Mardi 6 juin

Un certificat de moralité de Jean-Paul Sheik Hossen par lequel celui-ci voulait prouver qu’il n’a aucun dossier criminel en Belgique est rejeté par le tribunal. Me Robert Ahnee ayant objecté, le document n’a aucune valeur juridique, car il ne porte pas l’apostille requise pour tout document reçu de l’étranger.

Jean-Paul Sheik Hossen, interrogé par Me Duval, affirme qu’il n’a jamais déjeuné à l’hôtel Casuarina, le 27 mars 1978, donc qu’il n’a jamais remis de chèque au barman et que Mlle Imbert, du journal Le Cernéen, ne lui a pas confié son carnet de chèques.

Le surintendant de police Ecosse Marcel a témoigné également ce jour-là. M. Dahal, inspecteur du Securicor, affirme que le gardien Yves Bedos était sobre le jour de l’incendie du journal Le Mauricien (le 8 janvier 1978).

Paul Fleuriau-Chateau, administrateur du journal Le Cernéen, donne des détails sur les dettes contractées par Jean-Paul Sheik Hossen au journal et déclare que Mlle Imbert, qui avait perdu son carnet de chèques, a reçu une lettre de l’hôtel Casuarina, accompagnée d’un chèque que la banque a refusé pour « signature irrégulière ».

L’inspecteur Mahon, de la police, affirme que, selon lui, le feu avait commencé à l’extérieur du bâtiment du journal Le Mauricien, sur un tas de détritus.

Arrivée en Cour de Jean-Paul Sheik Hossen et Amédée Darga

Mercredi 7 juin

Un « témoin-choc », Idrak Edoo, ex-pompier à Port-Louis, vient affirmer en Cour, après avoir juré un affidavit dans le même sens, que le député du Mouvement Militant Mauricien, Amédée Darga, lui aurait dit, quatre jours avant l’incendie, de saboter le téléphone et l’équipement des pompiers et lui aurait « précisé » qu’un incendie éclaterait le dimanche 8 janvier.

Autre point saillant de cette audience : le barman de l’hôtel Casuarina identifie Jean-Paul Sheik Hossen comme celui qui lui avait remis le chèque retourné à Mlle Imbert.

Le commissaire de police Rajarai, appelé lui aussi à la barre, confirme avoir reçu Sheik Hossen dans son bureau, en septembre de 1979, alors qu’il était commissaire adjoint, et que ce jour-là il y a eu une conversation en sa présence entre MM. Sénéque et Sheik Hossen. Il déclare que c’est le ministre des Affaires étrangères, Harold Walter, qui lui avait référé Jean-Paul Sheik Hossen, lequel avait affirmé au ministre avoir d’importantes informations à lui communiquer concernant la sécurité de l’État.

Rajarai déclare aussi qu’il n’est pas en mesure de savoir si M. Sénéque ou un autre officier de la Special Branch avait pris des dispositions pour maintenir le contact avec Jean-Paul Sheik Hossen.

Paul Bérenger est de nouveau appelé à la barre, et est interrogé par Me Gaëtan Duval au sujet de la teneur d’une conversation téléphonique entre Finlay Salesse et Jacques Rivet et qui lui avait été communiquée par Finlay Salesse.

Jeudi 8 juin

Il n’y a pas d’audience. Jean-Paul Sheik Hossen, arrêté mercredi après-midi, suite à certaines allégations faites en Cour au sujet d’un chèque volé, est remis en liberté conditionnelle.

Vendredi 9 juin

Nouveau coup de théâtre : le gardien Yves Bedos vient affirmer en Cour qu’il avait « menti » dans la déposition faite à la police en présence de Jacques Rivet, directeur du Mauricien, et devant le tribunal parce qu’il aurait été « persécuté » par Sydney Selvon, rédacteur en chef du journal Le Militant.

Lindsay Rivière, rédacteur en chef du Mauricien, dépose pour la première fois et déclare n’avoir jamais demandé à l’assistant-commissaire Jugernauth de faire une prise de sang sur la personne de Yves Bedos.

Alain Gordon Gentil, journaliste au Cernéen, explique au tribunal dans quelles circonstances son père a garanti un emprunt contacté en banque par Jean-Paul Sheik Hossen.

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