À 7H CE MATIN – AVEC UN BUS AUX FREINS PERCÉS : 3 morts à Pailles

  • 3 blessés graves en salle d’opération à l’hôpital Jeetoo ce matin et une cinquantaine d’autres blessés aux urgences
  • Le chauffeur, Nishal Goorapa : « Frin inn perse, mo pa finn kapav fer naryen »

Trois morts et une cinquantaine de blessés. Tel est le grave bilan de l’accident dramatique survenu vers 7h ce matin sur l’autoroute à hauteur de Pailles, lorsqu’un autobus, transportant environ 70 ouvriers bangladais de la compagnie Hyvec Partners Ltd, avec des freins percés, a terminé sa course contre un abribus. Le chauffeur, Nishal Goorapa, a déclaré au Mauricien alors qu’il recevait des soins à l’hôpital Jeetoo : « Frin inn perse, mo pa finn kapav fer naryen. » La police l’a d’ailleurs interrogé ce matin sur les circonstances de cet accident fatal.

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De leur côté, les employés déplorent être « entassés comme du bétail » dans un bus. « Nous avons dit à notre employeur de nous donner un deuxième bus à maintes reprises, mais on nous transporte tous dans un seul bus. Une douzaine de travailleurs doivent même rester debout durant le trajet tous les jours. »

Mohammad Haq, un des employés, avance que le bus les ont pris à leur dortoir, à Trianon, afin de les amener sur un chantier à Pailles. « Le chauffeur roulait assez vite dans un premier temps. Nous savons qu’après nous avoir déposés, il doit faire une autre course. » Selon lui, c’est peu avant Sorèze que le bus a ralenti. « Nous ignorions qu’il y avait un problème », explique ce témoin. Et d’ajouter que peu avant d’arriver à la hauteur de la compagnie Mauvillac, « sofer ti pe inn evit loto inn tap ek bis-stop ».

L’avant du bus s’est en effet encastré dans une partie de cet abribus. Notre interlocuteur dit ne pas se souvenir de ce qui s’est passé par la suite, car plusieurs personnes se sont retrouvées « sens dessus dessous », tandis que d’autres ouvriers, eux, avaient été projetés à l’extérieur du véhicule du fait de la violence de l’impact. Un autre employé, Shafik, explique pour sa part, dans un kreol approximatif : « Sofer ti pe roul vit. Pe fer drwat gos. Banglade ki ti dan bis ti pe dir li roul dousma. Ti ena boukou standing dan bis. »

Des automobilistes descendant vers Port-Louis ont été les premiers à porter les secours à ces ouvriers, dont certains se trouvaient carrément au milieu de la route, blessés. Des bons samaritains n’ont d’ailleurs pas hésité à emmener les blessés légers à l’hôpital Jeetoo. Quant à la police et aux pompiers, ils sont rapidement arrivés sur place pour prendre le relais, des ambulances faisant alors le va-et-vient entre Pailles et l’hôpital.

À l’hôpital Jeetoo, la majorité du personnel soignant était mobilisé pour cet accident, des infirmiers attendant devant la porte principale pour un premier “assessment”. « Nous dirigeons les cas les plus graves vers les salles d’opération, alors que d’autres victimes sont emmenées vers les départements “casulaty”, X-Ray ou chez un médecin si leurs blessures ne sont pas importantes », nous confie un médecin. Vu le nombre de blessés qui ne cessaient d’arriver, des Mauriciens venus à l’hôpital ont apporté leur aide aux Bangladais, parfois en les transportant dans leurs bras.

Mohamed Austir, un autre employé, est sous le choc. « Je travaille au sein de cette compagnie depuis trois ans. Mo pa ti atann mo viv sa kosmar-la enn zour », dit-il. À 10h, la police de l’hôpital confirmait trois décès et était dans l’attente des pièces d’identification données par l’employeur des victimes.

Champa, une Bangladaise travaillant dans une usine de Baie-du-Tombeau, était, elle, en larmes à l’hôpital après avoir appris le décès de son frère, un dénommé Sanjay. « Nou vinn travay Moris ansam. Azordi, mo frer inn mor », dit-elle. Le chauffeur, Nishal Goorapa, blessé aux pieds, devait, lui, subir une opération, soit avant de glisser quelques mots au Mauricien en évoquant le problème de freinage.

Ce matin, la police ignorait toujours le nombre exact de blessés ou de personnes qui se trouvaient à bord de l’autobus. Elle confirme cependant que l’état de trois Bangladais est jugé grave, et que tous trois étaient en salle d’opération. Une enquête est en cours pour faire la lumière sur cet accident, laquelle a commencé ce matin par un premier interrogatoire du chauffeur du bus, Nishal Goorapa.


Dominique René (Hyvec Partners Ltd) :
« Un accident n’est jamais facile »

Dominique Rene, un des responsables de Hyvec Partners Ltd, a estimé qu’un accident « n’est jamais facile » dans une déclaration au Mauricien. « Mais il s’agit cette fois de nos employés », poursuit-il. Il était d’ailleurs à l’hôpital ce matin pour rencontrer les blessés. Interrogé sur le nombre d’ouvriers à bord du véhicule, il a contredit les témoignages des ouvriers en soutenant : « Il y avait 54 ou 55 employés dans le bus. Le véhicule a récupéré ces travailleurs à Trianon pour se rendre à Pailles. »


Kailesh Jagutpal : « Le personnel de
nuit est resté à l’hôpital »

« Les médecins qui ont travaillé durant la nuit sont restés à l’hôpital pour prendre en charge les blessés », a expliqué le ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal. « Le “shift” du matin a renforcé le nombre de membre du personnel. Les spécialistes et les chirurgiens étaient sur place pour prendre soin des patients. »


FEYZAL ALLY BEEGUN : « Que les corps soient
rapatriés au plus vite ! »

Le syndicaliste Feyzal Ally Beegun invite les autorités et l’employeur des victimes à assumer leurs responsabilités et à rapatrier les corps des trois Bangladais décédés au plus vite. « Il y a deux semaines, deux ouvriers bangladais avaient trouvé la mort sur un chantier, à Grand-Gaube, et leurs corps sont toujours à la morgue. J’espère qu’il n’en sera pas de même pour ceux décédés dans l’accident de ce matin. »
Feyzal Ally Beegun rappelle qu’il est « écrit noir sur blanc qu’en cas de décès, le corps d’un travailleur étranger doit être rapatrié ». Il ajoute : « Mais le coût pour cela a considérablement augmenté depuis la COVID-19. Pour les deux corps, qui sont toujours à la morgue, on réclame Rs 600 000 alors que c’était entre Rs 65 000 et Rs 75 000 auparavant. Donc, à ce jour, personne ne veut en assumer la responsabilité. » Le syndicaliste souligne également que les Bangladais sont des musulmans et que, selon l’Islam, « un enterrement doit être fait au plus vite ». Garder les corps indéfiniment à la morgue, précise-t-il, équivaut à un « non-respect de leur religion ».
Il invite également le gouvernement à enquêter sur le transport des travailleurs étrangers et à veiller qu’il soit aux normes. Il rappelle qu’il y a neuf ans, 11 travailleurs bangladais avaient trouvé la mort dans un accident de la route.

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