À la mémoire de Dayanand Thacoor

KAVINIEN KARUPUDAYYAN

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« Pourquoi inventons-nous des robots alors que nous devrions inventer des cloches à souvenir, des attrape-émotions, des filets bien serrés pour préserver ces petits riens qui tressent une vie ? » [Une année Lumière, Nathacha Appanah].
Il y a de ces personnes qui marquent notre enfance, et qui, soudain, s’en vont sans que l’on puisse leur adresser quelques mots, les tenir par la main le temps de leur faire part de notre affection, pour parler des vécus enfouis en nos souvenirs ; il ne suffit que d’un mot, d’un parfum ou d’une image.

En apprenant le décès de Dayanand Thacoor (âgé de 73 ans), survenu le 25 mars 2020, une chose m’est venue à l’esprit : sa voix si particulière. Dayanand Thacoor, ou « Grand Misie » pour les intimes, est l’un des premiers chauffeurs du village de Surinam. Autrefois, le mot chauffeur revêtait un certain charme, car il n’y avait pas beaucoup de gens qui pouvaient se vanter d’avoir un permis de conduire. Voiture, camion, autobus et même le roller – par la suite – n’avaient aucun secret pour lui. Ce dernier, jugé intimidant pour beaucoup, n’était pas un véhicule si difficile à manipuler à en croire « Gran Misie ». Il avait même cette blague qu’on l’avait pris en excès de vitesse sur ce bolide qui, pourtant, ne pouvait pas dépasser les 10 kilomètres par heure ! Employé comme chauffeur au conseil de district de Grand-Port/Savanne, Dayanand Thacoor adressait ses chefs hiérarchiques comme « Grand Misie » si tant qu’eux à leur tour l’appelaient ainsi. D’une bonhomie au grand cœur, il l’a été tout au long de sa vie avec une joie de vivre extraordinaire partageant la bonne humeur autour de lui, même si la vie ne lui a pas fait que de cadeaux.

La dernière fois que je l’ai rencontré, il avait une santé qui se fragilisait, notamment avec des problèmes de vue qui l’ont forcé à diminuer ses activités. Mais sa verve était toujours là. Il s’enquérait toujours de la famille. « Pa bliye fer lafami konpliman ! » À défaut de pouvoir lui faire offrande d’un bouquet de fleurs pour son ultime voyage, ces quelques mots en guise d’adieu. Au revoir et merci !

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