BATAILLE LÉGALE : ID Card, un projet national contesté en Cour suprême

Le 1er octobre 2013 a été marqué le début des procédures d’enregistrement pour la nouvelle carte d’identité mais aussi le début d’une bataille légale. Les avocats des deux parties, l’État et les contestataires, ont multiplié les échanges d’affidavits et de contre-affidavits pour réfuter les points soulevés par chacun, pour d’une part contester le projet de la nouvelle carte d’identité électronique et pour rassurer quant à l’utilité d’un tel projet.
Exit la carte laminée qui date de 1985. Les autorités ont décidé de la remplacer par une nouvelle carte plus robuste et durable, faite en polycarbonate. La nouveauté est qu’elle contiendra des informations biométriques de son détenteur, ce qui éliminera toute tentative d’usurpation d’identité. Mais la soumission des empreintes digitales fait polémique. Tandis qu’une campagne de sensibilisation se poursuit, des militants anti ID Card contestent principalement l’obligation d’avoir à soumettre leurs empreintes digitales et le coût du projet de Rs 1,1 milliard. Deux plaintes ont été logées en Cour suprême à la veille du début des procédures d’enregistrement, l’une par le leader du MSM Pravind Jugnauth et l’autre par Rajah Madhewoo de la plateforme No to New Id Card.
Le début des procédures a été placé sous le signe de la protestation avec des membres de la plateforme n’hésitant pas à manifester devant le centre de conversion de Port-Louis pour montrer clairement leur opposition au projet. La campagne sur le terrain prend de l’ampleur avec distribution de tracts, signatures de pétitions et autres meetings. La campagne de protestation se déroule également sur les réseaux sociaux. D’autres mouvements comme Lalit et Rezistans ek Alternativ se positionnent également contre le projet. Des interrogations et craintes subsistent surtout autour d’éventuelles utilisations abusives des données de la nouvelle carte d’identité électronique.
Pravind Jugnauth et le Dr Rajah Madhewoo ont d’abord juré un affidavit en Cour suprême pour contester le projet de nouvelle carte d’identité. Ils avaient réclamé une injonction auprès de cette instance judiciaire pour contester la constitutionnalité de la nouvelle carte électronique et le fait que celle-ci contienne les empreintes digitales du citoyen. L’État devait répliquer par le biais d’un contre-affidavit, soutenant qu’un cadre juridique suffisant a été mis en place pour le Mauritius National Identity Scheme, ajoutant qu’il agit dans les paramètres de la loi et que la collecte et le traitement de toutes les informations biométriques, effectués en vertu de la loi, sont soumis aux provisions de la Data Protection Act, qui fournit des garanties suffisantes pour toutes les données. L’État a assuré que des mesures de sécurité physique, de même que des mécanismes techniques de sécurité, ont été mis en place afin de sauvegarder et sécuriser les données biométriques des citoyens détenant la nouvelle carte d’identité électronique. Les données biométriques « collected and processed under the National Identity Card Act », affirme-t-il, ne seront pas partagées « with any third party or authority unless a Court so orders or the disclosure is required under any enactment ».
Le juge David Chan Kan Cheong, après délibérations, a décidé de « set aside » les deux demandes d’injonction, estimant dans le cas de Rajah Madhewoo que ce dernier n’a pu démontrer l’urgence d’une quelconque violation/infraction de ses droits constitutionnels nécessitant l’intervention du juge. David Chan Kan Cheong a statué que le plaignant a jusqu’au 15 septembre 2014 pour s’enregistrer en vue d’obtenir la nouvelle carte d’identité et pour soumettre ses empreintes digitales comme le préconise la National Identity Card Act. Ce qui a mené les avocats du Dr Rajah Madhewoo à faire appel contre le rejet de la demande d’injonction. Les deux plaignants, qui ne baissent pas les bras et qui ont la ferme intention de faire stopper le projet, répliquent cette fois-ci en logeant un « main case » en Cour suprême. Un des arguments avancés : la nouvelle carte d’identité est anticonstitutionnelle et ne respecte pas le droit à la vie privée des citoyens et à la liberté de mouvement. Affaire à suivre…
Il convient de souligner qu’à ce jour, plus de 100 000 Mauriciens se sont déjà enregistrés en vue d’obtenir la nouvelle carte d’identité. Dix centres de conversion ont été déployés et des unités mobiles sillonnent l’île auprès des entreprises pour faciliter les procédures sur place. D’ici septembre 2014, 920 000 cartes seront remises à l’ensemble de la population…

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