Bonne gouvernance et mesures anti-corruption 

Dr GEETANEE NAPAL

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Associate Professor

Faculté de Droit et de Gestion

Université de Maurice

Au cours des cinq à six dernières décennies, plusieurs pays ont mis en place des organismes dont la mission principale consiste à combattre la corruption. Corruption,

DR GEETANEE NAPAL
Associate Professor
Faculty of Law and Management
University of Mauritius

mauvaise gouvernance, instabilité économique, sociale ou politique sont potentiellement les caractéristiques des démocraties qui n’ont pas de système de contrôle bien structuré. La corruption est parfois la conséquence de mauvaise gouvernance résultant d’incompétence ou de manque de vision. Là où le citoyen accepte diverses formes de corruption de manière passive, cela ne fait qu’ajouter au problème. Que faut-il pour lutter contre des phénomènes qui nuisent au développement économique ? L’état actuel des choses au niveau mondial nécessite un bilan des valeurs existantes afin d’établir un plan d’éducation fiable qui aiderait à surmonter le problème de corruption qui prédomine dans le contexte des affaires.

L’importance de l’éducation

Il est impossible de changer des traditions de comportement, bon ou mauvais, du jour au lendemain. Cependant, nos différentes agences ayant enquêté sur la corruption existent depuis de longues d’années. La lutte contre la corruption va au-delà de l’identification des coupables et de leur comparution en justice. Il s’agit surtout de changer les attitudes des citoyens à l’égard de la corruption et du comportement qui ne respecte pas les règles morales. Dix-neuf ans après la création de l’ICAC, alors que la division Education de la commission s’implique à fond dans des campagnes de formation anti-corruption, la corruption prédomine et constitue un obstacle majeur à la croissance économique. Ce serait utile d’identifier les secteurs affectés, c’est-à-dire là où la corruption prime, et d’instituer une stratégie appropriée par rapport au bilan obtenu. Nous sommes sur la liste grise de la FAFT et la liste noire de la Commission européenne, ce qui nous impose le besoin impératif de trouver une solution de nature holistique au problème de corruption si nous tenons à avancer sur le plan international. La solution la plus fiable, c’est l’éducation. Une éducation efficace doit cibler tous les citoyens et toutes les couches sociales à travers l’île. Il nous faut revoir nos pratiques, notre éthique, nos valeurs existantes afin de nous refaire une réputation. Faute d’une stratégie soigneusement formulée pour renforcer l’éthique, la corruption peut causer bien des dommages conséquents aux démocraties vulnérables. La démocratie offre le potentiel de gouverner avec un minimum de contrôle, ce qui risque d’encourager les mauvaises pratiques. Toute démocratie peut stimuler la corruption en l’absence de système de contrôle adéquat et d’un plan bien défini pour éduquer le peuple. Une agence anti-corruption munie d’une unité d’éducation focalisant sur l’éthique est essentielle si l’idée est de se mesurer aux pays plus développés que le nôtre et d’attirer les investisseurs. Une bonne infrastructure est une condition nécessaire afin de réaliser ce projet d’éducation de masse. En ayant recours à l’éducation, une Commission anti-corruption s’engage à assister la société à retrouver son équilibre au niveau de l’intégrité nationale. Avec la communauté, la commission s’engage à lutter contre la corruption à l’aide d’une infrastructure bien définie, incluant les lois et l’éthique. Le but est d’offrir une éducation préventive, en appliquant les lois de manière efficace, faire un usage judicieux des techniques pédagogiques visant à éduquer un peuple qui tient à éradiquer le fléau alors que dans la pratique il y en a pas mal qui font l’impasse sur le règlement qu’ils appliquent aux autres. Et c’est là le problème car l’attitude du citoyen moyen qui choisit de corrompre est comme suit : « si je ne le fais pas, un autre le fera », ou « ce n’est pas défendu, c’est légal » et encore « personne ne le saura », parmi tant d’autres arguments dérisoires.

Efforts collectifs requis

L’objectif est de maintenir la justice, la stabilité et la prospérité au sein de la société, et pour atteindre ce but, l’effort de tout un chacun est requis. Sans solidarité et esprit collectif, on n’y parviendra pas. L’éducation et la stratégie de prévention offrent une solution idéale pour aider à maintenir un équilibre au sein de la société. Un service adéquat d’éducation préventive a une importance vitale dans cette démarche anti-corruption. Le rôle du service des relations communautaires de la Commission anti-corruption est de fournir des services d’éducation préventive sur-mesure aux divers secteurs de l’économie – secteur public, organisations non gouvernementales. La formation doit être dispensée aux jeunes, dans les écoles, entre autres. La corruption comme un mode de vie persiste si les gens tolèrent des actes de corruption qu’ils considèrent comme « dans les normes ». D’autre part, dans une société où l’intégrité, la droiture, honnêteté, bref, la moralité priment, les gens sont plus susceptibles d’apprécier une concurrence loyale. Ils rejetteraient une culture de corruption et soutiendraient les forces de l’ordre si jamais ils étaient confrontés à la corruption. La coopération du public est indispensable pour le succès d’une campagne anti-corruption. Les pays qui sont parvenus à combattre la corruption tout en maintenant de bons résultats ont dû affronter le problème d’attitude à un moment donné. Changer l’attitude des gens à l’égard de la corruption afin de passer de « l’acceptation passive » à la « tolérance zéro » demande beaucoup d’efforts et de persévérance. Hong Kong est un modèle de réussite dans ce domaine. La mission de la Commission indépendante contre la corruption de Hong Kong, créée en 1974, est de mobiliser le public, encourager leur soutien dans la lutte contre la corruption tout en éduquant la population contre les méfaits de la corruption. Tout ce chemin parcouru – changement d’attitude, la promotion des bonnes pratiques dans les secteurs public et privé, la participation active de la société – est à la base de la réussite de Hong Kong. L’éthique est primordiale pour tout pays qui aspire à se faire une place sur le marché mondial et s’assurer une survie saine à long terme.

La corruption est un problème d’ordre institutionnel et pour s’en débarrasser, il y a toute une éducation à refaire. Les conditions nécessaires pour que cette stratégie marche incluent la coopération de tout un peuple, le soutien politique, le leadership éthique d’où découle le bon exemple. Si tout le monde y croit et s’y met avec ferveur et sincérité, on pourra y arriver.

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