NISHAL JOYRAM
‘Special Consideration’ de Cambridge! Cela veut dire quoi ? Est-ce une méthodologie fiable ? Pourquoi ceci avait fait polémique en Angleterre l’année dernière ? Essayons de comprendre…
‘Cambridge never errs.’ C’est ce qu’on dit, et cela me rappelle encore plus « Le Loup et l’Agneau » de La Fontaine.
Les résultats du SC sont tombés récemment et comme chaque année, cela aurait dû faire des heureux et des déçus. Sauf que cette année-ci, Cambridge nous a tous rendus perplexes. On se demande toujours comment l’université aurait fait pour attribuer une note aux candidats, pour les deux questionnaires annulés pour le SC :
1. Anglais P1 (English Language P1 writing)
2. Arabe P1.
Un autre sujet de discorde est le Paper 3 d’anglais ‘English Language P3 Oral’. Cet examen n’était même pas programmé et par conséquent n’a pas eu lieu. Par contre, pour ce papier, certains élèves ont obtenu une note, alors que d’autres n’ont pas. La question qui se pose est : sur quoi Cambridge s’est basé pour attribuer une note uniquement à certains? Et pourquoi les autres n’ont pas eu le même privilège ? Y avait-il une autre manière de procéder ? On aura l’occasion de réfléchir à tout cela, mais avant tout voyons ensemble la pondération de chacun des trois papiers d’anglais :
Examen tenu (44%) :
English Language P2 Reading – 44%
Examens non-tenus (56%) :
English Language P1 Writing – 44%
English Language P3 Oral – 12%
Donc, pour l’anglais 44% aurait servi de référence pour noter l’enfant sur 100%. Comment Cambridge aurait-il procédé avec ce tour de passe-passe ? A-t-on fait usage d’une boule de cristal ? En effet ! On se serait servi d’une chose semblable ; un algorithme simulant les résultats. Cet algorithme aurait été utilisé pour la première fois l’année dernière pour simuler les résultats du ‘GCSE A level’.
Comment marche ce fameux algorithme ? C’est tout simplement un logiciel informatique développé sous l’égide de ‘l‘Office of Qualifications and Examinations Regulations (Ofqual)’ en Angleterre. Ce logiciel se serait servi de différentes variables pour prédire les résultats. Cela aurait fait polémique à la ‘House of Lords’ en Angleterre. Pourquoi donc ?
La Baronne Berridge, s’appuyant sur l’avis des experts, aurait qualifié cet algorithme de débâcle qui aurait entraîné deux hauts gradés à la démission. La Baronne fait ressortir qu’une des variables qu’utilisait le logiciel serait ‘l’établissement scolaire que fréquente un enfant’, le rendant ainsi partial. Le logiciel préjugerait de facto que tous les enfants d’un certain établissement scolaire travailleraient mieux que ceux d’un autre établissement ! La Baronne Berridge précise : « My Lords, the most frustrating element of the algorithm was that it assumed that schools could not improve on previous years’ best performance. That seems contrary to what any Education Minister should believe about the power of schools to improve and change children’s lives. Did that element of the algorithm come from an external expert? If so, why was it accepted?»
Prenons le contexte mauricien. Nous savons que même au collège Royal de Curepipe, un enfant a échoué. Si l’algorithme était appliqué à toutes les matières, cet enfant aurait brillamment réussi alors qu’un enfant plus méritant, venant d’un collège plus modeste, aurait tout simplement échoué… Cela paraît absurde! Mais, selon toute probabilité, c’est ce qui se serait passé. Sur quoi cette conclusion, que l’algorithme serait inadapté, est-elle fondée ? Sur trois points qui sont comme suit :
1. Le premier est fondé sur les révélations sans équivoque, faites par La Baronne Berridge dans la ‘House of Lords’.
2. Le deuxième repose sur des anecdotes. En discutant avec un parent d’élève la semaine dernière, j’ai découvert que sa fille avait eu un ‘B’ comme note en Anglais et en Arabe. Pour les autres matières elle a excellé avec des ‘A+’. Simple coïncidence ou aurait-elle été victime du fameux algorithme? Comment peut-on présumer que l’algorithme l’aurait rétrogradée ?
La fille, « une surdouée », fréquentant l’académie la plus prisée de l’île, a pris les examens du SC comme candidate privée. Étant toujours en G 10, elle n’a pas eu l’autorisation de prendre les examens au nom de son école. Le fait d’être une candidate privée aurait été préjudiciable pour la fille ? Ses professeurs d’anglais sont unanimes; la fille est excellente et mérite un ‘A+’ en anglais.
D’autres parents m’ont fait part de leurs histoires qui se résument plus ou moins de la même manière. Leurs enfants, toujours très brillants et ayant toujours des distinctions en anglais durant les examens internes, ont eu un ‘D’ en anglais pour les derniers examens du SC. Serait-ce toujours des coïncidences ?
3. La troisième est ma correspondance à ‘Cambridge International Education (CIE)’ qui est restée lettre morte.
J’ai envoyé un courriel à Cambridge, le 10 mai dernier, exprimant nos craintes comme Mauriciens, déballant nos interrogations sur la ‘Special Consideration’ et proposant des alternatives. Je n’ai reçu qu’un ‘accusé de réception’ qui serait préprogrammé. Je vous invite à prendre connaissance du courriel annexé (voir plus loin).
Que peut-on déduire devant l’absence de réponse? Sommes-nous sommés à tout accepter ?
Cette démarche aurait dû être faite par le ministère de tutelle. Ce dernier a plus d’autorité pour questionner la méthodologie, exiger des réponses et proposer des solutions alternatives.
Les questions que je me pose aujourd’hui sont :
1. Que font ceux qui devraient poser ces questions?
2. Sont-ils assez proactifs pour anticiper ce genre de scénario?
3. Si non, à quoi servent les gros salaires qui leur sont versés aux dépens du contribuable ?
4. Jugent-ils plus intelligent de faire profil bas car ils ont été les auteurs de cette situation ? Rappelons-nous que nombreux ont été les Mauriciens qui ont tiré la sonnette d’alarme concernant les défis à venir relatifs au calendrier scolaire se terminant en avril.
Il faut noter qu’un ‘remarking’ comme proposé par la ministre est assez onéreux. Cela reste une solution inaccessible pour beaucoup et rien ne garantit un traitement adéquat.
Comment avoir confiance à ce jour dans le système éducatif ? Si l’actuel calendrier scolaire est maintenu, des situations similaires dues aux examens annulés resurgiront. Quelles leçons va-t-on en tirer ?
Étrangement, au moment d’accoucher ce texte, un ami m’envoie l’interprétation « d’ine sanson de Zean Zak Golmaal » par un ‘komik local’. Et au même moment, sur les ondes d’une radio, passe ‘Golmaal Hai Bhai Sab Golmaal’. Si le titre ‘Cambridge never errs’ ne m’était pas fortement recommandé par mon ami RR, Vicomte de Quatre-Bornes, je me serais incliné devant les signes que m’envoie la Providence et j’aurais titré le papier ‘ Golmaal Returns’, la franchise ‘Golmaal 1’ étant déjà réservée à la Comtesse du Triangle de Phoenix.
Le courriel envoyé à
Cambridge le 10 mai dernier
May 10, 2021
The Chief Examiner
Cambridge International Education
Dear Sir/ Madam,
Cancellation of examinations due to bad weather
I am referring to the papers that were cancelled in Mauritius on April 28, 2021 due to bad weather:
School Certificate :
English Language P1
Arabic P1
Higher School Certificate:
Design and Textiles P3
Design and Technology P4
Asian Languages P4 (Hindi, Urdu, Tamil, Marathi, Telugu and Chinese)
Mauritians are very much concerned with the cancellation of those papers and the more so that during the month of March and April, we usually have bad weather conditions and in years to come, we are bound to having more examinations cancelled due to the caprices of nature.
We have been informed by the Ministry of Education in Mauritius that CIE proposes a ‘Special Consideration’ as a solution. We are quite apprehensive of that solution as we are unacquainted to the methodology behind the ‘Special Consideration’.
On the other hand, I have learnt that in the 80s, there was a case of leakage and CIE reorganised the whole examinations for Mauritius within a month. The coordination between CIE and the Mauritian government was remarkable. Communication was a real issue then. Therefore, the government at that time hired the services of ‘Police Bikers’ to ensure on time delivery time tables to students.
Furthermore, in a recent interview, the ex-director of the Mauritius Examinations Syndicate pointed out that CIE always has a second set of paper ready. He stated that he has himself made use of a second set on a particular instance where an envelope containing exam papers was damaged.
In order to mitigate the trepidation of the citizens of my country I shall be grateful to you if you could provide an answer to our interrogations:
1. Is there any contingency plan for such situations?
2. Could you provide us with another set of papers for the examinations cancelled on April 28, 2021? Since in the past CIE did.
3. If not, are you open to proposals?
4. Will CIE make provision for such unexpected events in the future?
5. Could you kindly elaborate on the ‘Special Consideration’ and the approach that will be used?
6. Will forecasts sent by educators prior to exams be used?
7. If that is the case, how will biases be eliminated? The forecasts are highly subjective since they are based on individual ‘Mock Exams’ organised by every school, each setting its own standard based on the abilities of its students.
8. If ever it is final that CIE will not be providing another set of paper, will you be sensitive to the idea that Mauritius sends you a new forecast. It would be based on a standardised paper that we could set ourselves. Shall CIE be agreeable to the idea, we would convince the Mauritian government to act in that direction.
Looking forward to a prompt reply, I thank you in advance for the kind consideration given to my plea.
Kind Regards,
Nishal Joyram.