Chaude rentrée parlementaire…

Les travaux de l’Assemblée nationale reprendront ce mardi sur l’ère post-Ameenah Gurib-Fakim, qui a quitté définitivement la State House hier après deux ans et demi à la tête de l’État et dans le sillage d’une crise constitutionnelle ayant soufflé violemment à la tête de l’État. Les séquelles de ces deux épisodes qui ont troublé tout le pays pendant plusieurs semaines, voire pendant plusieurs mois, subsisteront pendant encore longtemps, de même que de nombreuses questions à ce sujet.

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En ce qui concerne le passage d’Ameenah Gurib-Fakim à la présidence, force est de reconnaître qu’elle a été une digne représentante du pays dans de nombreux forums internationaux. Elle a su attirer l’attention des médias internationaux sur Maurice, présentée comme un pays moderne, et s’engager dans la promotion de la science et de l’esprit d’entreprise en Afrique. Cela s’est fait quelquefois au prix de quelques exagérations, comme en se projetant comme une des 100 femmes les plus puissantes d’Afrique, même si, en vérité, elle ne détenait pas les pouvoirs exécutifs dans les affaires du pays. Toutefois, l’erreur de la carte de crédit du PEI restera pendant longtemps dans la gorge de beaucoup de Mauriciens. Elle a d’ailleurs reconnu, dans sa dernière déclaration, avoir fait « une erreur », qu’elle a corrigée en remboursant les dépenses effectuées à partir de ses fonds personnels. Toutefois, les achats luxueux qu’elle a effectués étaient, de l’avis de toute personne bien pensante, nettement inappropriés dans un pays où la fracture entre les riches et les pauvres va grandissant et où on multiplie encore d’efforts pour aider des milliers de familles de l’extrême pauvreté. C’était loin de contribuer à créer l’image d’une présidente compatissante. Elle a peut-être été présente sur le plan éducatif et de l’entreprenariat, de même que sur le volet des effets du changement climatique, mais elle s’est manifestée très peu auprès des femmes battues et des réfugiés des récentes inondations et des problèmes climatiques. Elle a finalement fait preuve d’un manque de maîtrise en ce que concerne l’institution présidentielle. Elle aura voulu, à tort ou à raison, réinventer le rôle présidentiel, mais a finalement fait preuve de méconnaissance en ce qui concerne sa fonction constitutionnelle, ce qui lui aura finalement coûté sa fonction présidentielle.

Il faudra maintenant vivre avec les séquelles d’une crise constitutionnelle, qui risque de déboucher sur une révision des mesures concernant la destitution d’un président ou d’un vice-président.

D’autre part, le départ d’Ameenah Gurib-Fakim laisse le pays sur sa faim en ce qui concerne le degré d’infi ltration à Maurice d’Alvaro Sobrinho, qui a maille à partir avec la justice de plusieurs pays. L’annonce du Premier ministre de ne pas inclure ce volet particulier dans les attributions de la Commission d’enquête sur la crise constitutionnelle et la violation de la Constitution a provoqué de vives réactions au sein de l’opposition. « La décision du gouvernement se résume à l’institution d’une commission d’enquête sur ceux qui voulaient mettre une commission d’enquête », lance d’ailleurs le leader de l’opposition, et ce alors qu’au niveau du MMM, on dénonce un « cover-up énorme » du gouvernement sur toute la saga Sobrinho. Visiblement, le Premier ministre, en annonçant l’institution d’une commission d’enquête, a voulu d’une part acculer l’ancienne présidente afi n de prévenir toute dénonciation éventuelle, mais aussi voulu dans le même temps anticiper la vague qui s’annonce dans les rangs de l’opposition, même divisée, en faveur de l’institution d’une commission d’enquête sur toute l’affaire Sobrinho au Parlement mardi. Il ne serait pas étonnant que cette question fasse d’ailleurs l’objet de la première Private Notice Question du leader de l’opposition lors de la rentrée parlementaire. Xavier- Luc Duval a annoncé qu’une décision concernant une action concertée mardi prochain a été prise lors d’une réunion de trois partis de l’opposition.

De son côté, Pravind Jugnauth a indiqué hier qu’il n’a aucun doute sur la possibilité que quiconque, dans son gouvernement, ait bénéficié des largesses d’Alvaro Sobrinho, mais a pris la précaution de préciser qu’il n’est pas disposé à mettre sa main au feu pour personne. Tout cela en dit long sur l’ambiance qui s’annonce à l’Assemblée nationale mardi.

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