Le Premier ministre, Pravind Jugnauth, a fait un vibrant plaidoyer en faveur de la canalisation de ressources financières plus importantes vers les petits pays insulaires en développement.
C’était hier, à l’ouverture de la conférence sur le thème Supporting climate-smart development in Africa, organisée par trois institutions de premier plan, à savoir la Banque africaine de Développement, la Programme des Nations unies pour le Développement et la Commission économique africaine. Il a affirmé que le changement climatique est une préoccupation majeure pour son gouvernement.
« Nous respectons les obligations de tous les accords multilatéraux sur le climat. Ainsi depuis l’adoption de l’accord de Paris en 2015, des ressources considérables ont été mobilisées au niveau local. Nous avons dépensé l’équivalent de $ 150 millions pour soutenir le programme climatique durant les cinq dernières années », a-t-il fait ressortir. Ainsi en 2018 le National Environment and Climate Change Fund a dépensé quelque $ 50 millions pour des mesures de prévention contre les inondations, la réhabilitation des zones côtières dégradées et la gestion des déchets solides.
En fin de compte, Maurice consacre 2% du PIB à des politiques concernant le changement climatique et l’environnement. Il a aussi fait mention de la Climate Change Act qui est en vigueur depuis avril 2021. « Our Climate Change Act has become operational in april 2021. The objective of this legislation is to implement the obligations of Mauritius under the United Nations Framework Convention on Climate Change, the Kyoto Protocol, the Paris Agreement and other related instruments on climate change », dit-il.
Pravind Jugnauth a aussi cité en exemple la Banque de Maurice qui a créé un Climate Change Centre en 2021 avec le “regulatory framework for issuing sustainable bonds and guidelines to banks and non-bank deposit-taking institutions on climate-related and environmental financial risk management”.
Il a rappelé que Maurice envisage d’éliminer le charbon pour la génération d’électricité et de porter la contribution des énergies renouvelables à 60% d’ici 2030.
Fragilité face aux chocs extérieurs
Au début de son intervention, il s’est appesanti sur la vulnérabilité de Maurice en tant que petit État insulaire au titre du changement climatique.
Le niveau de la mer monte à un taux de 5,6 mm par an à Maurice et de 9 mm à Rodrigues alors que la moyenne globale est de 3,3 mm par an. Dans certaines régions de l’Île, la plage s’est érodée sur une distance de 20 mètres. « Le naufrage du Wakashio et la pandémie du Covid-19 ont mis en exergue la fragilité du pays face aux chocs extérieurs », ajoute-t-il.
De son côté, le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, a relevé que d’ici à 2030 quelque 132 millions de personnes dans le monde pourraient basculer dans l’extrême pauvreté en raison du changement climatique. Il dit constater qu’au niveau du continent africain, la productivitéé́ agricole a d’ores et déjà diminué de 34 % depuis 1960 à cause du changement climatique. Il a évoqué les mesures prises par le gouvernement dont la mise en place du Green Transformation Package qui engendrera des investissements durables à hauteur de Rs 20 milliards.
De plus dans le contexte de la hausse des prix des produits pétroliers et afin d’encourager la transition vers des moyens de transport neutres en carbone, le gouvernement a supprimé tous les Duties sur les véhicules hybrides et électriques et même introduit un régime de droits d’accise négatifs de 10% pour l’achat de véhicules électriques par les particuliers, jusqu’à un maximum de Rs 200 000. Enfin, Maurice se dote actuellement d’un cadre réglementaire pour l’émission d’obligations souveraines vertes, bleues et sociales.
« Alors que Maurice, à l’image du continent africain, se bat pour renforcer sa résilience face à des chocs exogènes, l’heure du rassemblement et de l’action contre le changement climatique a sonné. L’adoption cette année du Programme vert de l’Afrique par le Conseil exécutif de l’Union africaine ouvre la voie à un avenir meilleur pour notre continent. Pour faire de cet objectif une réalité, nous devons marcher en ordre de bataille face à une guerre climatique qui ne dit pas son nom. Nous devons nous mobiliser et nous accorder pour obtenir plus de financement et plus de capacités avec l’appui de nos partenaires multilatéraux tels que la Banque africaine de développement, le PNUD, l’UNECA ou encore la Banque Mondiale », affirme le ministre Padayachy.
Dans un message transmis à l’assistance, Akinwumi A. Adesina, président de la Banque africaine de Développement, note que l’Afrique souffre des effets dévastateurs du changement climatique, des sécheresses, des inondations, des précipitations irrégulières, des criquets et des chenilles légionnaires. « Les estimations montrent que l’Afrique subit des pertes de PIB de $ 7 à 15 milliards par an en raison du changement climatique, qui devraient atteindre 45 à 50 milliards de dollars par an d’ici 2040 », fait-il comprendre.
« À la Banque, nous avons pleinement aligné notre travail sur l’Accord de Paris, en consacrant 41% de notre portefeuille d’investissement total au financement climatique en 2021 et 67% de notre financement climatique à l’adaptation climatique, le plus élevé de tous les financements mondiaux et bilatéraux du développement établissements. Notre objectif est de doubler nos engagements de financement climatique pour la période 2020-2025 et d’engager au moins USD 25 milliards dans le financement climatique d’ici 2025 », révèle-t-il.
Ahunna Eziakonwa, directrice africaine du PNUD affirme que cette dernière s’est engagée à atteindre l’objectif audacieux d’offrir un accès à l’électricité à 500 millions de personnes supplémentaires dans le monde d’ici à 2025, dont environ 300 millions en Afrique. Elle affirme que le nouveau programme Africa Minigrids est une démonstration claire que le déploiement d’énergies renouvelables à grande échelle est possible.