COMMISSION D’ENQUÊTE: Lauthan évoque le droit au silence et d’éventuelles situations conflictuelles

Lundi 31 juillet, durant l’audition de Me Neelkanth Dulloo, Sam Lauthan, ancien ministre, travailleur social engagé depuis de longues années dans le combat contre la drogue, et un des assesseurs de la Commission d’enquête, a partagé ses craintes avec Me Neelkanth Dulloo sur l’élément du droit au silence brandi par de nombreuses personnes trouvées coupables d’importation de drogue. « Vous risquez de vous retrouver dans une situation très conflictuelle ». La question a été soulevée quand l’avocat a déclaré que son client, en l’occurrence la “star witness in waiting”, Navind Kistnah, était prêt à déposer devant la Commission d’enquête sur la drogue.
D’entrée de jeu, Sam Lauthan devait indiquer à Me Neelkanth Dulloo que « la position où vous êtes en tant qu’avocat de Navin Kistnah sera une situation difficile, voire conflictuelle, à gérer ». « Vous aurez beau donner les garanties que votre client souhaite faire son grand déballage, à quel point pouvez-vous faire confiance à votre client ? Jusqu’à quel point pensez-vous qu’il dira toute la vérité ? Car, il ne faut pas l’oublier, une personne comme Navind Kistnah, qui est impliquée dans une affaire d’importation de 157 kg d’héroïne, ce n’est pas du menu fretin ! Il doit bien réaliser les conséquences de ses dires et ses dénonciations. Peut-il aller jusqu’au bout et tout donner ? Ou ne va-t-il pas taire certains détails qui risqueraient d’entraîner sa propre chute… » L’avocat rebondit sur l’argument, concédant qu’« effectivement, dans certains cas, certains clients invoquent leur droit au silence ». Il fait ainsi mention de sa propre expérience avec l’un de ses clients évoqués par le président de la Commission ce jour-là, à savoir Angelo Thomas. « M. Thomas, par exemple, avait demandé de faire valoir son droit au silence. Il faut savoir que c’est toujours au client de réclamer ce droit. Dans un tel cas, je fais bien comprendre au client qu’à aucun moment je ne vais interférer dans le déroulement de l’enquête, que ce soit bien clair que moi, en tant qu’avocat, je ne vais pas me laisser influencer », explique-t-il.
S’agissant de la déposition de Navind Kistnah devant la Commission d’enquête sur la drogue, Me Dulloo a donné sa garantie que les procédures « seront respectées » en vertu de l’intégrité de la Commission. « J’en prends l’engagement car nous sommes en effet arrivés à une étape cruciale dans cette affaire. » Sam Lauthan lui a rappelé qu’« il ne faut pas oublier qu’un client tel que le vôtre ne fait pas uniquement face à des pressions venant des autorités, telles les enquêteurs ». « Il sait très bien que, là où il se trouve et de par ses dépositions, il est dans le viseur de très nombreuses personnes qui n’hésiteront pas à l’éliminer… Celles-ci ont certainement déjà mis un contrat sur sa tête et dès qu’elles trouveront l’occasion propice, elles passeront à l’acte. » L’ancien ministre a utilisé, à cet effet, la formule « silver and lead » qui concerne le choix ultime de la personne en cause de soit se taire et accepter d’aller en prison, « protégeant » ainsi ses autres complices dans le réseau, soit passer à table, pour reprendre l’expression, et « donner » ceux impliqués dans le circuit. « Ce qui n’est pas sans risques », devait-il rappeler à Me Neelkanth Dulloo, « vu que même en prison, il sait que si sa tête est mise à prix, nul ne lui fera de cadeaux ! »
Sam Lauthan a également repris l’argument selon lequel un avocat ne doit pas « laisser son client dicter sa conduite ». Précédemment dans sa déposition, Me Dulloo devait indiquer que « certains clients sont définitivement très, très dangereux ». L’avocat reprend : « Je peux vous assurer que jusqu’ici, dans ma carrière, cela ne m’est jamais arrivé. Mais je n’écarte pas le fait que cela puisse effectivement se produire et que je subisse des pressions. » L’ancien ministre a ainsi achevé sa partie des débats avec Me Dulloo en lui faisant remarquer que « le cas de votre client peut servir aux autres qui contemplent l’idée de tremper dans le business de la drogue ». Il conclut : « Il faut que d’aucuns réalisent ce qui est impliqué une fois qu’on plonge dans le trafic. On n’en sort jamais indemne ! »

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