CORONAVIRUS (COVID-19) – SÉQUELLES : La résilience du marché touristique italien mise à toute épreuve

  • 60% des touristes italiens visitant Maurice viennent des régions infectées par le virus
  • Le ministre Bodha : « Les passagers issus de toutes les régions infectées traités de la même manière »

Les répercussions de l’épidémie de coronavirus (covid-19) en Italie, et par extension en Europe, font que l’industrie touristique se met à douter de sa résilience pourtant vantée jusqu’à récemment par des ténors. Avec au dernier pointage, le nombre de cas porté à 400, l’inquiétude s’empare les opérateurs touristiques à Maurice. Si les mesures sanitaires prises par les autorités mauriciennes ne concernent depuis lundi que trois régions au nord de l’Italie, l’éventualité que cette mesure soit étendue à tout ce pays est actuellement à l’étude. Par ailleurs, les autorités se préparent à accueillir demain le Costa Meditteranea, actuellement à La Réunion, alors que trois autres navires de croisière sont attendus au pays d’ici lundi avec des mesures de Screening renforcées.

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Dans son intervention à l’occasion de la célébration du 170e anniversaire de la MCCI hier soir, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, a indiqué que l’épidémie de covid-19 « impactera définitivement sur le taux de croissance économique qui était de 3,6% l’année dernière ». Le ministre des Finances, Renganaden Padyachy, a réuni ce matin les différents Stakeholders de l’économie pour un tour d’horizon. Au niveau de l’Association des Hôteliers et Restaurateurs de l’ÃŽle Maurice (AHRIM), le CEO Jocelyn Kwok concède que la situation est devenue « très sérieuse » suite aux développements intervenus depuis le début de semaine et le rallongement de la liste des territoires désormais interdits. Il estime que le cas de l’Italie est « encore plus inquiétant » au vu de nos relations commerciales et historiques existantes, ainsi que de l’étendue et le succès du tourisme mauricien sur ce marché.

« Les développements en Europe sont forcément suivis de près et, en l’absence de bonnes nouvelles, l’inquiétude s’empare rapidement de nos opérateurs. Les demandes d’annulation deviennent significatives et certaines réservations sur le segment MICE, par exemple, qui devaient attirer des mix de voyageurs interdits et autorisés tous confondus, ont été tout simplement annulées », a-t-il dit. Dans une communication de l’AHRIM adressée aux hôteliers mauriciens, il leur est demandé de ne pas appliquer les frais d’usage imposés normalement pour cause d’annulation. Ce qui ne sera pas sans effet sur les revenus des opérateurs.

Arvind Bundhun, directeur de la Mauritius Tourism Promotion Authority (MTPA), abonde dans le même sens, soulignant que l’extension de l’épidémie en Europe, en particulier en Italie, qui est le pays le plus affecté pour moment, est l’origine d’une grosse appréhension dans les milieux touristiques. « Il faut savoir que les trois régions concernées par les mesures sanitaires représentent 60% des arrivées touristiques en provenance de l’Italie », dit-il.

Au niveau des opérateurs hôteliers, François Venin Chief Sales & Marketing Officer, Beachcomber Resorts & Hotels, qui a de gros contrats avec les opérateurs italiens, ne cache pas son inquiétude. « L’Italie est notre sixième plus important marché », souligne-t-il. D’ailleurs, une trentaine des 40 touristes italiens, qui avaient choisi de regagner l’Italie lundi au lieu d’entrer en quarantaine, étaient des clients de Beachcomber. Les couples sud-coréens, qui sont repartis dès leur arrivée à Maurice, ne souhaitant pas être mis en quarantaine, avaient fait des réservations dans les hôtels de ce même groupe.
Des premières indications dans le circuit hôtelier confirment que depuis le début de la semaine, des annulations de réservation venant de la clientèle italienne sont venues s’ajouter à celles de Chine. Les groupes hôteliers se penchent déjà sur des stratégies de Marketing de rechange pour la prochaine période de pointe coïncidant avec les vacances de Pâques en vue de limiter la casse causée par le coronavirus.

Au niveau d’Air Mauritius, on prévoit que la suspension des vols sur Hong Kong et la Chine « impactera définitivement sur les revenus » de la compagnie durant le prochain et dernier trimestre de son année financière. « Avec le développement de l’épidémie en Italie et en Europe, la situation devient de plus en plus compliquée », fait-on ressortir au niveau de la compagnie. On observe que les revenus de l’aviation au niveau international enregistreront une baisse estimée entre USD 27 et 30 milliards de dollars, dont 95% de la baisse est due à la situation en Chine.

Tous les opérateurs hôteliers et de l’aviation sont « unanimes » à reconnaître l’importance de prendre des mesures pour protéger le pays. « La rigueur imposée par nos services sanitaires est tout de même saluée ainsi que la position zéro-risque du gouvernement. Cet élément demeure central dans notre démarche vers des solutions alternatives possibles en vue de limiter les dégâts et maintenir notre industrie », affirme Jocelyn Kwok.

Pour sa part, Arvind Bundhun « salue les mesures prises par le gouvernement », tout en exprimant des réserves concernant les mesures sanitaires prises au niveau des pays de la région.

Quant au ministre des Affaires étrangères, Nando Bodha, il rappelle que Maurice est un petit État vulnérable avec autour de 1,2 million d’habitants. « Nous ferons tout notre possible pour éviter qu’il y ait ne serait-ce qu’un cas à Maurice prenant en compte le risque que cela représente pour nous », a-t-il dit. Il a expliqué que les mêmes mesures prises contre les trois régions italiennes, la Corée du Sud et la Chine seront prises contre toutes les régions du monde qui se retrouvent dans la même situation. « C’est ce que j’ai expliqué aux diplomates sud-coréens qui m’ont rencontré. Il en va de la sécurité des touristes qui font confiance au pays et à celle de toute la population mauricienne », a-t-il dit.
Par ailleurs, le port se prépare à accueillir le Costa Meditteranea qui doit accoster en rade demain matin. Le navire avait accosté au Port Est, à La Réunion, mercredi. Selon le responsable des contrôles sanitaires aux frontières de l’ARS, « aucun des passagers du paquebot n’a présenté le moindre symptôme pouvant laisser suspecter une infection liée au coronavirus ». Le paquebot AidaBlu est attendu à Maurice samedi.

Selon le président de la MPA, Ramalingum Maistry, ces deux paquebots ont l’habitude de tourner dans la région. « Deux autres paquebots, dont un en provenance de Singapour, sont attendus au pays lundi. Nous suivrons les mêmes procédures prévues pour tous les navires. Ces procédures sont approuvées par l’Organisation mondiale de la santé et l’IMM. Les capitaines des navires devront informer le Port Master de la situation sanitaire à bord du navire avant que l’autorisation d’accoster ne soit accordée. Des vérifications seront effectuées par les autorités sanitaires mauriciennes au moyen des caméras thermiques », souligne-t-on officiellement.

Selon les derniers chiffres diffusés par le ministère de la Santé, à ce matin 43 personnes sont actuellement en observation dans les centres de quarantaine du pays. À Souillac, 21 sont en quarantaine et quatre en isolation. Deux personnes ont été autorisées à quitter le centre hier. Au centre d’Anse-La-Raie, 18 personnes sont en quarantaine.


François Venin (Beachcomber ) : « Les mesures sécuritaires qui s’imposaient… »

Alors que l’épidémie de Covid-19 commence à toucher l’Italie, le groupe Beachcomber est-il directement affecté par les mesures sécuritaires prises par le gouvernement ?

Le gouvernement a pris les mesures sécuritaires qui s’imposaient. Cela dit, nous sommes bien évidemment affectés car Beachcomber a une part importante du marché italien.

Quelle est l’importance du marché italien pour le groupe ?

L’Italie est notre sixième marché.

Comment le groupe a-t-il été affecté depuis l’éclatement de l’épidémie ?

Une trentaine de clients qui étaient arrivés sur le vol d’Alitalia lundi dernier sont repartis sur le même vol. Il faut rappeler qu’en termes de poids économique, les régions touchées par ce virus représentent 80% de l’économie italienne.

Y a-t-il eu beaucoup d’annulations ?

Douze couples sud-coréens qui avaient des réservations dans nos hôtels sont repartis dès leur arrivée à Maurice car ils ne souhaitaient pas être mis en quarantaine.

Quelles sont vos appréhensions pour l’avenir ?

Notre principale préoccupation serait que le virus se propage partout dans le monde.

Comment peut-on limiter les dégâts ?

Il est important que les autorités continuent de bien communiquer sur le sujet. La communication doit se faire de manière prudente et rassurante. Maurice a toujours été une destination refuge et chaque mot compte.

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