Économie : après les promesses électorales, place à l’action !

Les clameurs de la campagne électorale se sont tues, place maintenant aux choses sérieuses. Le nouveau gouvernement issu des urnes, en particulier le nouveau ministre des Finances, aura la lourde tâche de redresser l’économie, remettre le pays sur les rails d’une croissance forte et durable, et assainir les finances publiques, notamment le compte courant et la dette.

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Ce qui vient compliquer la tâche, ce sont les promesses farfelues faites pendant la campagne, concernant surtout la hausse de la pension de vieillesse. Les vrais enjeux économiques, eux, ont été quasi absents de la campagne. C’est maintenant l’heure d’établir une vraie feuille de route pour redynamiser l’économie, mettre de l’ordre dans les finances publiques et s’attaquer surtout au déficit du compte courant, qui ne cesse de grimper, et à la dette publique, qui atteint des proportions alarmantes. Le chômage des jeunes et la croissance stagnante, qui peine à atteindre la barre des 4%, sont également des sujets d’inquiétude, et ce alors que la récession mondiale pointe le bout de son nez. Pour certains observateurs, il serait judicieux pour le nouveau gouvernement de faire un état des lieux économique et, même, possiblement d’envisager la présentation d’un mini-budget.

Cela fait près de dix ans que le pays n’a pu réaliser de croissance de 4%. Il faut remonter à 2010 pour voir un taux de croissance de 4,1%. Depuis, la croissance moyenne est restée aux alentours de 3,5%. Pour l’année en cours, Statistics Mauritius a encore une fois abaissé ses estimations, prévoyant maintenant un taux de croissance de 3,8%. « Il faut d’abord relancer la croissance et, pour ce faire, il faut une stratégie, tout en assurant une répartition équitable des richesses. Il faudra un plan d’action pour le secteur touristique, l’industrie manufacturière et le secteur cannier. Pour celui-ci en particulier, il faut trouver les moyens de le pérenniser, car il est en difficulté et notre pays ne peut vivre sans canne à sucre », estime un économiste. Celui-ci s’interroge aussi sur le Portable Retirement Gratuity Fund, qui entre en vigueur en 2020. « Je me demande comment le secteur sucrier et le secteur manufacturier/textile pourront le mettre en application… Le secteur sucrier est déjà en difficulté, idem pour les PME. Toutes ces questions devront être rediscutées avec le nouveau gouvernement. »

Il insiste également sur la nécessité de réduire le déficit du compte courant. « La balance extérieure continue de se détériorer. Nous devons impérativement booster l’export et parvenir à plus d’autosuffisance. Aujourd’hui, environ 85% des produits que nous consommons sont importés, c’est énorme. Il faut absolument dynamiser la production locale tout en encourageant la consommation de produits locaux. En outre, l’importation est sujette aux fluctuations de change, etc. ce qui contribue à faire grimper la facture. »

En plus de ces défis, la promesse de hausse conséquente de la pension de vieillesse a mis l’État au pied du mur… Si cette promesse est tenue, l’État devra casquer davantage sur le plan des prestations sociales. D’où viendra cet argent ? L’économie peut-elle absorber une telle hausse ? Des questions qui soulèvent l’inquiétude de nombreux économistes et observateurs, d’autant que la dette publique a augmenté de 49% ces dernières années. En 2014, elle était en effet à Rs 243 milliards et au 30 juin 2019, avait atteint Rs 320,7 milliards. Il en est de même pour le poids de la dette par habitant, qui a connu la même tendance à la hausse. Le Fonds monétaire international prévient d’ailleurs que « public debt is projected to stay elevated over the forecast horizon, with the debt outlook being susceptible to a range of macro-fiscal shocks ». 

Autre problème à gérer pour la nouvelle équipe en place : la baisse de la population, qui interviendra d’ailleurs durant le présent mandat gouvernemental, c’est-à-dire à partir de 2023, d’après l’United Nations Population Census. « C’est un problème qui doit être pris au sérieux, car la population active va dégringoler et il y aura moins de personnes qui entreront sur le marché de l’emploi. Et la dynamique économique peut s’en trouver affectée. Pour résoudre cette équation, il y a des solutions à court, moyen et long termes. Il faudra attirer des talents étrangers, avoir une politique de fertilité et créer un écosystème de travail flexible et qui encourage les femmes actives à élever des enfants. Il faudra aussi une politique de rétention des Mauriciens qualifiés et une stratégie pour faire revenir au pays certains éléments de notre diaspora », observe un observateur du secteur privé.

En outre, ce problème de baisse de main-d’Å“uvre vient se greffer sur un problème structurel de notre économie : le manque de qualifications. Aujourd’hui, les faits sont brutaux : 40% de la main-d’Å“uvre ne sont même pas détenteurs du School Certificate. « Comment augmenter leurs compétences ? Quels métiers leur proposer ? Il faut également réformer le système éducatif pour limiter le nombre de jeunes qui sortent du système trop tôt », observe-t-on. Il y a aussi le chômage des jeunes, qui atteint un niveau alarmant. Sur toutes ces questions, le gouvernement est attendu au tournant…

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