ÉCROULEMENT DE L’EMPIRE RAWAT: « Un long chemin parcouru dans le scandale BAI »

Le ministre des Finances Vishnu Lutchmeenaraidoo s’est appesanti sur le chemin parcouru pour sortir de la crise au vu de l’écroulement de l’empire Rawat avec des Assets surévalués à environ Rs 28 milliards et des Liabilities de l’ordre de Rs 16 milliards. C’est ce qu’il a indiqué en réponse à la Private Notice Question (PNQ) du leader de l’opposition, Paul Bérenger, au sujet du Bramer/BAI Mega-Financial Scam, à l’Assemblée nationale hier après-midi. Ces échanges au sein de l’hémicycle sont intervenus quelques minutes après l’annonce par le Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, d’un Package en faveur de ceux qui ont souscrit autour de Rs 19 milliards dans le Super Cash Back Gold de BA Insurance (voir texte plus loin). Le leader du MMM s’est assuré que les quelque 135 285 détenteurs de polices d’assurance régulières de BAI ne soient nullement pénalisés comme il avait été préconisé dans le rapport préliminaire des Conservators de PwC, André Bonieux et Oosman Mushtaq, soumis à la Financial Services Commission le vendredi 17 avril.
Par contre, le sort des employés des 38 compagnies, en particulier ceux d’Iframac, Courts et d’Apollo Bramwell, faisant partie du conglomérat de Dawood Rawat en faillite, n’est nullement rassurant. Le ministre des Finances a soutenu que ces emplois ne bénéficient d’aucune garantie dans la conjoncture contrairement aux employés à plein-temps de la défunte Bramer Banking Corporation Limited ou encore de BA Insurance. Ces derniers ont été absorbés respectivement par la National Commercial Bank Limited, qui est déjà opérationnelle, et par la National Insurance Company en voie de démarrage.
De son côté, le député Reza Uteem, qui a déclaré ses intérêts en tant que détenteur d’un volant d’actions d’une valeur de Rs 350 000 dans le temps au sein de la Bramer Banking Corporation Limited, s’est interrogé sur la décision de vendre la Bramer Bank à la National Commercial Bank Limited pour la roupie symbolique. Il voulait savoir ce que comptaient faire les autorités pour des porteurs d’actions de Bramer, une société cotée en Bourse de Maurice.
La réponse du ministre a été des plus cinglantes par rapport aux risques encourus lors des transactions sur le Trading Floor. Il a été encore plus tranchant quand interpellé par le leader de l’opposition au sujet de la prise de position de l’administrateur nommé par le groupe BAI, Sattar Hajee Abdoula. « L’administrateur de la BAI est le seul maître à bord d’un bateau qui coule… » a-t-il laissé échapper sur un ton encore plus pince-sans-rire.
À noter que pour les travaux d’hier, la configuration de l’hémicycle, notamment dans les rangs de l’opposition, a connu de profonds changements. Avec la démission d’Alan Ganoo et de Kavi Ramano, du MMM, le Front Bench a été remanié avec Reza Uteem en tant que N° 2. Puis suivent dans l’ordre Veda Baloomoody et Rajesh Bhagwan. De leur côté, les démissionnaires du MMM ont pris place dans la deuxième rangée des strapontins dans le dos des députés du Parti travailliste.
Bérenger : Eu égard aux affaires de la Bramer Banking Corporation Limited et de la BAI Co (Mtius) Ltd, le ministre des Finances peut-il obtenir les informations suivantes, soit si tous les employés de ces deux sociétés ont déjà été embauchés par la National Commercial Bank et la National Insurance Company et si le temps de service de ces employés a été retenu, à quelle heure est intervenue la révocation de la Banking Licence de Bramer et si le procès-verbal des délibérations du board de la Banque de Maurice sera rendu public, la date à laquelle le board de la Financial Services Commission a pris la décision de remplacer Clairette Ah Hen à la tête de cette institution et si les Conservators de BAI Co (Mtius) Ltd ont été informés de la position du gouvernement par rapport aux PolicyHolders ?
Lutchmeenaraidoo : D’emblée, puis-je rappeler à la Chambre qu’avec la révocation de la Banking Licence de Bramer, le gouvernement s’est consacré en priorité à trouver des solutions à cette situation de crise et à élaborer des mesures correctives appropriées dans l’intérêt national. Comme je l’ai expliqué lors de la PNQ du 7 avril, le gouvernement a adopté des mesures immédiates pour protéger les clients et les employés de la banque. Le gouvernement a même donné l’assurance que les dépôts de tous les clients sont sauvegardés. J’avais énuméré une série d’initiatives déjà prises.
The situation in the new bank is stable
À ce jour, tous les clients de la défunte Bramer ont accès à des services bancaires de la nouvelle banque et tous les déposants peuvent accéder à leurs comptes. Pour rappel, la National Commercial Bank Ltd a été incorporée le 6 avril avec l’octroi de la Banking Licence de la Banque de Maurice le 10 avril. Le transfert des avoirs et des obligations a été effectif le samedi 11 avec l’entrée en opération le lundi 13. Toutes les 20 branches de même que les 28 guichets automatiques fonctionnent normalement.
The situation in the new bank is stable and the element of trust of the clients in the National Commercial Bank is now well entrenched. Ces actions promptes ont permis d’avorter des risques systémiques découlant de l’échec de la Bramer avec des crises sociales, qui auraient pu être générées.
Les employés transférés à la National Commercial Bank sont encore sous la responsabilité de la Bramer Banking Corporation Ltd (in receivership). Je dois réitérer l’engagement du gouvernement pour sauvegarder les emplois. Les employés ont déjà bénéficié de leurs salaires d’avril depuis le 20. Les procédures pour le transfert des employés devront être mises au point la semaine prochaine avec « the National Commercial Bank reckoning their years of service ».
La Banking Licence de la Bramer a été révoquée par la Banque de Maurice aux termes de l’article 17 de la Banking Act après la fermeture des bureaux le 2 avril. Le conseil d’administration de la Banque Centrale s’était réuni le même jour, à partir de 19 h 50, et fut informé de la décision de la révocation. Le board avait également approuvé la nomination d’André Bonieux et de Mushtaq Oosman en tant que Receivers.
Compte tenu des obligations de confidentialité sous l’article 26 de la Bank of Mauritius Act, la Banque Centrale n’est pas en mesure de pouvoir divulguer les Minutes of Proceedings des réunions du board des directeurs.
Pour ce qui est des questions relevant de la National Insurance Co. Ltd. la responsabilité appartient au ministre des Services financiers. Par conséquence, je considère qu’il n’est pas de mon ressort de répondre aux questions sur le secteur des assurances ou encore sur la Financial Services Commission. Le leader de l’opposition pourrait bien adresser ces questions au ministre de tutelle.
Bérenger : Pourtant, la dernière fois, le ministre a répondu à des questions sur les assurances. Tout comme ce fut le cas lors de la dernière PNQ, il n’a rien dit sur le temps de service des employés de Bramer Bank et de la BAI. Peut-on savoir de quoi il en retourne ?
Lutchmeenaraidoo : Yes. In fact, this question was answered. C’est tout à fait naturel que le temps de service des employés soit reconnu qu’il y ait une pension portable ou pas.
Bérenger : Il a répondu pour Bramer. He gave a foolproof guarantee for BAI. Est-il un fait que tel est le cas pour tous les employés à plein-temps de la BAI ? Cette garantie est-elle applicable à tous les membres du personnel de la trentaine de sociétés sous le contrôle de l’administrateur nommé par la BAI, Sattar Hajee Abdoula ?
Lutchmeenaraidoo : En ce qui concerne la National Insurance Company, cette garantie pour le transfert des employés est de mise. The commitment of government is limited to Bramer and BAI. Cet engagement ne concerne que ces deux sociétés. We have gone a long way. C’est un long chemin parcouru dans le scandale BAI. I think that we are walking out of a major crisis. Le conseil des ministres du jour a approuvé une solution pour les victimes du Ponzi BAI…
Bérenger : We are talking about employees now ?
Lutchmeenaraidoo : Well ! If you don’t mind. Je dirai que le gouvernement compte rembourser la tranche initiale des Rs 500 000 aux déposants du Super Cash Back Gold. We are covering 50 % of the Ponzi victims. This is something extraordinary ; I must congratulate my colleague Honourable Roshi Bhadain…
Bérenger : Ki to pe guet sa boug-la ? Li mem inn met li dan trou…?Bhadain : Toi ki dan trou avec to parti…
Bérenger : Et ta koz to souval lekours to fer bien… Taler to alle coule…
Intervention de Madame la Speaker pour éviter tout dérapage en rappelant que la parole est au ministre des Finances.
Bérenger : Dois-je comprendre que les employés de cette trentaine de sociétés sous l’administrateur Hajee Abdoula ne sont pas couverts par cette garantie ?
Lutchmeenaraidoo : Non, ils ne sont nullement concernés par ces arrangements.
Bérenger : L’administrateur a été très dur dans ses commentaires en public… Comment réagit le ministre à cela ?
Lutchmeenaraidoo : Je ne sais pas si l’administrateur est le seul maître à bord d’un bateau qui coule. Thanks to my colleague Roshi Bhadain…
Bérenger : Puis-je savoir à quelle heure de la nuit la Banque de Maurice a révoqué le permis de la Bramer Bank?
Lutchmeenaraidoo : Le gouvernement avait à agir très vite. Nous avons eu à travailler la nuit. Je crois que la décision a été prise vers les 22 heures…
Bérenger : Le ministre peut-il déposer sur la table de l’Assemblée des extraits du procès-verbal de cette réunion de la Banque de Maurice ?
Lutchmeenaraidoo : It would not be proper under the Banking Act.
Bérenger : Puisqu’il n’est pas disposé à divulguer ces détails, peut-il révéler si tous les membres du board étaient présents à la réunion et également confirmer si le gouvernement a fait usage de la pression sur les membres du board de la Banque Centrale ?
Lutchmeenaraidoo (d’un air candide) : How can government exert pressure on members of the board ? La réunion avait été convoquée en toute urgence. La décision a été prise de manière unanime. All members were present.
Bérenger : Deux éléments d’informations émanant de la réponse de la PNQ du 7 avril. Dans une correspondance en date du 22 février, la Banque de Maurice avait demandé à la Bramer d’injecter des fonds frais de Rs 350 millions au 31 mars au plus tard. Peut-on avoir une copie de cette lettre ? Puis il y a eu la réaction de Bramer à cette demande ?
Lutchmeenaraidoo : Tout ce que je peux dire c’est que la Bramer avait soumis une requête pour des fonds de l’ordre de Rs 1 milliard suite à des difficultés rencontrées sur le marché inter-bancaire. Suite à une investigation des officiels de la Banque Centrale, une injection de capitaux de Rs 2,5 milliards s’est avéré nécessaire…
Bérenger :… Tout cela, nous le savons…
Lutchmeenaraidoo : La Banque de Maurice avait imposé une première injection de Rs 350 millions…
Bérenger :… Donnez-nous une copie de la correspondance…
Lutchmeenaraidoo : This I can’t..
Bérenger : Nous voulons aller au fond des choses de ce qui s’est passé…
Lutchmeenaraidoo : Bramer avait à injecter Rs 350 millions. Cela ne s’est pas réalisé. A un certain moment, la BAI est venue de l’avant pour les Rs 350 millions à condition de rehausser le niveau des Related-Party Transactions. No one will go against that principle. La Banque de Maurice était disposée à accorder le Rs 1 milliard à condition de cette injection de Rs 350 millions. Cela ne s’est pas matérialisé…
Confiance en la Banque de Maurice
Bérenger : La réponse du ministre constitue une perte de temps. Le 27 mars, Bramer a écrit à la Banque de Maurice pour faire état de retraits de fonds massifs. Can we have a copy of that letter ?
Lutchmeenaraidoo : Then if you have a copy, you don’t have to ask for it…
Bérenger : Je n’en ai pas. Vous-même en aviez fait état…
Lutchmeenaraidoo : If I said so…
Bérenger : Give us a copy of the letter..
Lutchmeenaraidoo : I have nothing to hide. J’ai entière confiance en la Banque de Maurice, qui m’a fourni les informations…
Bérenger : Avec la Bramer, au lieu de révoquer la licence, réduisant littéralement à zéro la valeur des avoirs de la banque, les autorités auraient dû procéder autrement au lieu de révoquer le permis tout simplement ?
Lutchmeenaraidoo : You are talking about other ways of dealing with this case. There is none. Sous la Banking Act, il n’y a que la révocation ?
Bérenger : Mais il y a d’autres options comme la nomination d’un administrateur…
Lutchmeenaraidoo : Je ne dis pas que nous sommes parfaits. Mais nous avions le devoir d’agir vite. It’s fine to be wise after the event. We were dealing with a crisis situation. There might have been other alternatives. Nous avons fait ce qu’il fallait faire…
Bérenger : La dernière fois, le ministre avait répondu sur la FSC. Aujourd’hui, il refuse de le faire. Mais je compte revenir sur les détenteurs de polices d’assurance régulière, soit autour de 138 000 et quelque. Dans leur rapport du 17 avril, les Conservators de PwC avaient identifié ces deux catégories de polices d’assurance, soit la formule régulière, et le Super Cash Back Gold. Le rapport avait évoqué une perte de valeur d’un tiers de la valeur des avoirs et que les détenteurs de polices d’assurance régulière allaient en faire les frais avec une perte de valeur de leurs assurances. Peut-il confirmer si tel est le cas ?
Lutchmeenaraidoo : Nous avons fait mieux. They will not lose anything. Leurs polices d’assurance resteront intactes à 100 %. Puis, nous avons les 24 000 autres avec des contributions de Rs 21,6 milliards. Le Premier ministre vient d’annoncer une solution pour cette catégorie. I’m quite impressed by the team work. Nous avons travaillé d’arrache-pied pendant deux semaines pour trouver des solutions. Ce qui n’était nullement évident.
Bérenger : I wanted to be reassured. Les polices d’assurance régulières demeurent intactes ; je suis surpris. Le ministre des Finances en avait parlé. Le Premier ministre a corrigé. Mais le ministre des Finances est revenu là-dessus. Il parle de 24 000 alors qu’en fait il y a quelque 14 000 clients. Il faut cesser de parler de 24 000…
Lutchmeenaraidoo : En fait, au début, il était question de 24 000… Puis, nous nous sommes rendu compte qu’il y avait 24 000 polices d’assurance souscrites par quelque 14 000.
Bérenger : The law provides… This is a national issue. Sous l’Insurance Act, il est question d’un fonds de compensation alimenté de contributions venant des opérateurs pour compenser les victimes du genre de situation que nous vivons ? Quand est-ce que le gouvernement envisage une telle initiative qui fait défaut depuis des années ?
Lutchmeenaraidoo : Le principe de ce fonds de compensation a déjà été approuvé. Il devait être intégré dans le dernier budget. Mais nous nous sommes rendu compte qu’il y avait du travail à abattre.
Uteem : Je déclare mes intérêts. Je suis actionnaire de la Bramer avec un volant d’actions d’une valeur de Rs 350 000. Cette banque a été vendue pour une roupie symbolique. Que comptent faire le gouvernement, la Banque de Maurice et la NCB pour compenser ces milliers d’actionnaires de cette société cotée en Bourse avec cette décision ?
Lutchmeenaraidoo : Quand vous faites des placements en Bourse, vous prenez des risques. Il vous faut faire face aux conséquences… They have taken the risk in investing in a bank which has crashed. That’s their problem…
Uteem : Le ministre compte-t-il réclamer l’ouverture d’une enquête sur le National Pension Fund, le Port-Louis Fund et la State Investment Corporation, qui ont eu recours à des ventes massives de titres depuis le début de l’année. Probablement, 2,5 millions d’actions ?
Lutchmeenaraidoo : We should not mislead the House. Ce sont des courtiers qui opèrent à la Bourse avec des achats et ventes de titres. SIC has invested and is losing money. Il n’y a pas que des individus qui sont dans cette situation.
À ce stade, le député Ganoo revient avec une interpellation supplémentaire, qui a déjà été répondue.
Uteem : La Banque de Maurice avait prévu des injections de capitaux de Rs 3,5 milliards par phase, dont Rs 350 millions immédiatement. Aujourd’hui, le ministre a parlé de Rs 2,5 milliards. Mais ce qui est drôle est que pour la National Commercial Bank, la Banque de Maurice se contente de Rs 200 millions ?
Lutchmeenaraidoo : Ce n’est pas seulement Rs 200 millions. Nous avons apporté d’autres garanties à cette banque… We have gone a long way. Il aurait pu avoir été des risques portant sur des multi-milliards. Nous avions un engagement et nous l’honorons.
Bérenger : Nous sommes unanimes à reconnaître que l’affaire Bramer/BAI ternit l’image de Maurice en tant que centre financier international. Mais il y a encore le Ponzi de Belvedere Management avec pour préjudice des « multi-billion dollars ». La FSC a pris des mesures. Il y a eu des arrestations à Londres chez le partenaire de Belvedere Management le 3 mars dernier. All this is damaging. Que font le Premier ministre et le ministre des Finances pour mettre un terme à cela ?
Lutchmeenaraidoo : I appreciate that when you put order, there is disorder. Nous avons pris l’engagement de nettoyer le pays. A cet effet, dans un premier temps, tout est ce qui est sale remonte à la surface. We have discovered on one side coffers and on the other side coffins. Is that affecting the image of Mauritius ? It’s very funny. Pas plus tard que ce matin (ndlr : hier), j’ai eu une séance de travail avec des banquiers du Luxembourg. Ils m’ont dit qu’ils sont intéressés à investir à Maurice… You might get the impression of chaos. The chaos is the consequence of putting order. Après ce sera mieux…

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