Eneida Ferdandes (Banque mondiale) : « Air Mauritius est une compagnie solide »

Eneida Ferdandes, spécialiste principale du secteur privé/tourisme à la Banque mondiale, qui était récemment de passage à Maurice dans le cadre de la conférence sur la connectivité dans l’océan Indien, explique que la clé est de savoir quelle est la stratégie réelle du gouvernement en termes de connectivité aérienne afin de pouvoir aller de l’avant. Elle soutient également que le gouvernement doit travailler en accord avec le secteur privé, « qui connaît le marché ». Elle évoque aussi les contraintes des lignes aériennes, dont le coût du carburant. Le transporteur national reste toutefois « une compagnie solide », selon elle, malgré ses déboires financiers.

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Diriez-vous que l’accès aérien est problématique à Maurice ?

Maurice est déjà très avancée en termes de transport aérien, mais il y a toujours une possibilité d’optimisation des routes existantes.

Il y a eu un “blame game” à Maurice pour pointer du doigt la connectivité comme responsable de la baisse des arrivées touristiques. Dans quelle mesure une mauvaise connectivité aérienne peut affecter la compétitivité d’une destination ?

Il est clair que sans la connectivité, on n’a pas de touristes. D’abord, il y a le service, la disponibilité des routes, mais aussi le prix, parce que vous êtes en compétition avec le reste du monde. Un exemple, à Madagascar, avec le travail effectué sur l’ouverture du ciel, en trois ans, on a vu la disponibilité de sièges disponibles augmenter de 33% et le prix du billet Paris-Tana a baissé de 35%, mais ce sont des décisions politiques. Alors je crois que la clé, c’est d’avoir bien en tête toutes les données et de savoir quelle est la stratégie réelle du gouvernement. Alors là, on pourra améliorer la connectivité. La clé est aussi de travailler ensemble, parce que le secteur privé connaît le marché, et aussi d’avoir de bonnes dessertes sur de bonnes destinations. Il faut aussi tenir compte du fait que ce n’est pas seulement une question de chiffres et de sièges, mais aussi de savoir si les sièges en question sont sur de bonnes destinations, sur des destinations stratégiques pour le pays.

Pour une destination comme Maurice, très éloignée de ses principaux marchés émetteurs, quelle est l’importance d’avoir des vols directs ?

On dit toujours que les vols directs sont essentiels pour développer l’industrie touristique…
On sait que plus vous avez des vols directs et plus vous avez la possibilité d’être compétitifs par rapport à d’autres destinations. Mais il s’agit d’une décision commerciale. Les compagnies aériennes ne vont pas mettre de vols directs tant qu’elles n’ont pas un volume suffisant leur permettant de survivre commercialement. À Maurice, vous avez déjà 33 destinations déjà connectées en direct. Vous êtes déjà très avancé. Et vous faites très bien de connecter certaines destinations avec des escales, le but final étant d’avoir le vol direct. Je pense que ce processus est déjà très bien enclenché à Maurice.

Quels sont actuellement les défis réels des compagnies aériennes, mis à part le carburant ?

Le carburant reste une des plus grandes contraintes des compagnies aériennes . Mais aussi comment s’assurer qu’on a un prix de carburant qui permette d’assurer la compétitivité d’un pays.

Air Mauritius est en difficulté, affichant des pertes massives de Rs 800 millions. Diriez-vous que la stratégie de la compagnie est la bonne ou y a-t-il des choses à améliorer ?

Je ne connais pas très bien la stratégie d’Air Mauritius. Ce que je sais, c’est qu’il y a deux ans, la compagnie était très profitable. Alors, il faut s’assurer que le problème, ce sont vraiment les routes. La compagnie était profitable et il n’y a pas de raison de ne pas l’être à nouveau. Il s’agit d’être sûr qu’on a les bons avions sur les bons marchés. Air Mauritius est une compagnie solide qui a signé des partenariats avec d’autres compagnies en termes de “code sharing” d’une façon très intelligente. C’est possible de redresser la compagnie.

Les arrivées touristiques étaient en baisse au premier trimestre. Est-ce nécessairement la connectivité qui est responsable ou y a-t-il d’autres facteurs ?

Il n’y a jamais un seul facteur pour expliquer la baisse des arrivées. Il y a une concurrence énorme avec les autres destinations et Maurice est assez éloignée des marchés émetteurs, européens et américains. Anecdotiquement, Maurice n’a pas une connectivité très claire avec les Etats-Unis alors que d’autres pays de la région l’ont. Peut-être est-ce un marché potentiel. Quoi qu’il en soit, il faut que la stratégie, le marketing et la connectivité fonctionnent ensemble.

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