ENTREPRISE : Foods Worth Ltd et l’agrotourisme

Lancé en mai 2017, l’agrotourisme développé par Foods Worth Ltd, spécialiste de la transformation de la banane, attire en moyenne une centaine de touristes étrangers mensuellement. Son directeur, Ved Luchmun, croit fermement que ce secteur prendra de l’ampleur à Maurice dans les années à venir. « De plus en plus d’étrangers veulent découvrir l’intérieur de notre pays. Ils veulent voir autre chose que le soleil, la plage, le sable et le lagon », dit-il. D’où sa démarche de proposer aux touristes une visite guidée dans son entreprise, sis Nouvelle-France, où leur est racontée toute l’histoire de la banane.
L’idée de développer un concept d’agrotourisme à Maurice lui est venue en parlant à des touristes. Ces derniers confièrent à Ved Luchmun, directeur de Foods Worth Ltd, leur désir de connaître l’intérieur du pays. Et pas seulement la mer, la plage, le lagon et le soleil. « Nous-mêmes lorsque nous voyageons dans d’autres pays nous voulons voir son intérieur », observe-t-il. « Ça a fait un déclic dans ma tête, d’autant plus que nous attirons beaucoup de touristes européens, et aussi des Arabes, qui ne connaissent la banane que comme un fruit. Ils n’ont jamais vu un bananier, si ce n’est en photo. Ils ne connaissent pas ses caractéristiques. Ils ne savent pas qu’après avoir donné son régime de bananes, le bananier est abattu pour laisser la place à une autre plante qui sortira à côté et à son tour, lui aussi donnera ses fruits une seule fois, avant d’être abattu à son tour », déclare l’entrepreneur de renom opérant dans le sud de l’île. Selon Ved Luchmun, beaucoup d’Européens croient qu’un bananier continue à rapporter des bananes année après année.
Il a donc développé le concept d’agrotourisme pour montrer aux touristes ce qui est fait avec la banane dans son entreprise. Un guide les fait visiter l’usine, leur parle de la banane, de sa culture, de la récolte, de sa transformation, de l’empaquetage et de l’exportation. Tout cela contre un paiement d’un droit d’entrée de Rs 200 par personne. On leur raconte aussi comment l’usine a été créée, comment sont développés les nouveaux arômes et comment cette entreprise aide les agriculteurs à cultiver la banane au lieu d’abandonner leurs terres. « Nous leur démontrons aussi que rien ne va à la poubelle dans la banane ». En effet, les pelures et les feuilles et les troncs servent à la fabrication de compost, et l’huile utilisée dans la transformation de la banane est recyclée. « Les touristes visitent les plantations et dégustent les “banana chips” sur place », souligne notre interlocuteur, qui se dit satisfait de la centaine de touristes qui visitent son usine mensuellement. Un nombre en croissance constante. Non seulement les touristes achètent ses produits, mais, d’après Ved Luchmun, certains d’entre eux souhaitent même développer un business avec lui. « C’est un plus que nous n’attendions pas. Je suis ravi de cette possibilité d’avoir de nouveaux clients à l’étranger. Je pense que nous allons dans une bonne direction et que nous développons très bien le secteur de l’agrotourisme », fait-il ressortir.
Manque de matière première
Foods Worth Ltd est une entreprise engagée dans la transformation et l’exportation de “banana chips”, et évolue actuellement sur une bonne base malgré un manque de sa principale matière première, soit banane. « À cause de la maladie qui affecte les bananiers depuis 2014, nous avons subi un manque d’environ 10% dans notre fourniture de cette matière première. Si cette situation persiste, nous serons obligés de nous tourner vers l’importation », lance Ved Luchmun. Selon lui, nombreux de ses fournisseurs se plaignent de la maladie — le “banana freckle disease” (tache noire) — qui affecte la qualité de ce fruit.
Cette maladie empêche la banane de grossir, et elle fait apparaître des taches noires sur sa peau. Cette maladie est apparue en 2014 et, selon notre interlocuteur, rien n’a été fait pour arrêter sa progression pendant un bon bout de temps. De ce fait, les planteurs sont découragés et ne veulent pas investir dans cette culture. Ved Luchmun souhaite que les autorités prennent des mesures adéquates au plus vite pour contrer cette maladie. « Sinon nou riske perdi banann osi kouma nou pe perdi dite », prévient-il. « Je pense que la situation deviendrait catastrophique dans les deux à trois années à venir. Si j’arrive à manquer de banane, il me sera alors très difficile de produire des “banana chips”, un produit qui a déjà une bonne image sur le marché mondial », dit-il.
Autre difficulté évoquée par Ved Luchmun: le coût du fret aérien vers les pays du Golfe, qui représentent de nouveaux marchés pour son entreprise. « Les commandes venant de cette région augmentent, mais le coût du fret est trop onéreux par rapport à nos moyens. Le gouvernement doit faire quelque chose à ce sujet sinon nous risquons de perdre un marché porteur », soutient notre interlocuteur.
Innovation
Qu’importe les difficultés présentes, Ved Luchmun continue d’innover. Il a lancé récemment trois nouvelles saveurs à ses “banana chips”: épices, fromage et oignon et poulet. Depuis sa création, il y a environ deux décennies, l’entreprise ne produisait que des “banana chips” au goût naturel. Environ 40% de sa production est exportée et le reste est vendu sur le marché local. Livré auparavant dans des sachets en plastique, les “banana chips” arrivent maintenant dans du papier en aluminium, renfermés dans une boîte en plastique, qui lui donne un nouveau cachet, plus pratique et moderne. Ce qui a plu aux consommateurs locaux et étrangers, car, selon Ved Luchmun, les ventes de son produit ont augmenté. D’une production de deux tonnes de bananes vertes mensuellement, il y a dix ans, celle-ci s’élève à quinze tonnes actuellement. Le nouvel emballage tient aussi les consommateurs informés de la provenance du produit et de ses valeurs nutritives. Les “banana chips” sont disponibles en 40, 150 et 500 grammes.
Ved Luchmun estime que les Mauriciens n’apprécient pas assez l’importance de la banane dans leur alimentation. « Ils ne la cultivent que pour la consommer mûre et un peu pour en faire du “vindaye” chez soi », constate-t-il. D’où le fait qu’il encourage toute la population, surtout les planteurs, à cultiver ce fruit et à le vendre à son entreprise, qui a « besoin de grandes quantités de bananes vertes ».
Après la banane, Foods Worth Ltd souhaite transformer, à des fins d’exportation, d’autres fruits tels que l’ananas, le letchi, le fruit de Cythère, le bilimbi, entre autres, qui sont disponibles à Maurice. Cette entreprise emploie environ 25 personnes.

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