Environnement – Projet Sunref : Rs 3 milliards déboursées pour des projets verts

Le projet Sunref en est à sa troisième édition. Un fonds de 75 millions d’euros, soit Rs 3 milliards, a été mis à la disposition de la State Bank of Mauritius et la Mauritius Commercial Bank pour le financement des projets qui doivent répondre aux trois thématiques établies, soit l’atténuation du changement climatique, l’adaptation au changement climatique et le genre. Des primes à l’investissement peuvent représenter jusqu’à 16% du montant global des emprunts et une assistance technique gratuite.

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Pour faire état de cette troisième édition du projet Sunref (Sustainable Use of Natural Resources and Energy Finance) aux acteurs intéressés comprenant des membres du secteur privé et des particuliers, l’AFD a organisé une journée de discussions jeudi dernier à l’hôtel Westin à Balaclava. Durant un premier round de discussions réunissant l’AFD, les représentants des deux banques commerciales et une représentante de Business Mauritius, André Pouillès-Duplaix, responsable chez l’AFD a expliqué les raisons de ce plan de financement. « Par des financements directs au secteur privé, Sunref encourage le plan d’action national de lutte contre les effets du changement climatique et d’autre part accompagne les acteurs économiques sur le terrain », a-t-il dit. Ce dernier est aussi d’avis que la transition écologique ne peut se faire qu’avec les banques locales. Élaborant sur cette troisième édition de financement, il dira que « cette nouvelle phase se veut encore plus ambitieuse que les deux précédentes ».
Ce financement de Rs 3 milliards s’adresse aux petites et moyennes entreprises et aux acteurs économiques importants tout comme aux particuliers. Sunref Maurice se décline en deux catégories d’investissements. Pour la première catégorie, les prêts pourront s’étendre jusqu’à Rs 10 millions. Et pour la seconde catégorie, les prêts pourront atteindre Rs 200 millions.
Pour l’ambassadeur de l’Union européenne à Maurice, Vincent Degert, ce projet de financement s’inscrit dans le contexte de l’engagement et la mobilisation de l’UE en faveur d’une mise en œuvre réussie de l’Agenda de développement durable à l’horizon 2030 et dans la lutte contre le changement climatique. « Suite aux résultats probants obtenus dans le cadre des deux premières lignes de crédit Sunref, l’UE se réjouit de contribuer au projet Sunref Maurice pour continuer à accompagner Maurice et ses entreprises dans la transition vers une économie plus verte et plus résiliente face au dérèglement climatique », a-t-il souligné.
Ce projet de financement mis en place l’Agence française de développement et financé par l’Union européenne vise à aider Maurice à financer ses projets verts en vue de protéger l’environnement. Pour les deux précédentes éditions, l’AFD a déboursé au total 100 millions d’euros pour des projets à Maurice et les îles des Mascareignes. Depuis 2009, l’AFD accompagne la transition de Maurice vers une économie basse carbone, résiliente au changement climatique et inclusive.
Par la mise à disposition d’une ligne de crédit de Rs 3 milliards (75 millions d’euros) de l’Agence française de développement (AFD), SUNREF Maurice vise donc à encourager les entreprises et particuliers mauriciens à investir dans l’atténuation au changement climatique (énergies renouvelables, efficacité énergétique, mobilité électrique, bâtiments verts), l’adaptation au changement climatique (consommation et traitement d’eau, gestion des zones côtières, agroécologie) et l’égalité des genres (suite à l’élaboration d’un plan d’action découlant d’un exercice d’autodiagnostic), grâce notamment à des primes à l’investissement pouvant représenter jusqu’à 16% du montant global des emprunts et une assistance technique gratuite.
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André Pouillès-Duplaix : « La vulnérabilité de Maurice est un grand défi »

Le projet Sunref de l’Agence française de développement (AFD) en est à sa troisième édition cette année. Un montant de 75 millions d’euros a été mis à la disposition de deux banques mauriciennes pour le financement de projets verts. À ce jour, plus de 100 millions ont été investis à travers Sunref I et Sunref II. L’engouement des entreprises du privé et de certains individuels se manifeste pour ces financements.

Est-ce que les objectifs fixés par Sunref I et Sunref II ont pu être atteints ?
Pour le projet Sunref I, nous avions déboursé 40 millions d’euros et quatre banques étaient impliquées pour des financements à Maurice, à Madagascar et aux Seychelles. Nous avons financé 180 projets essentiellement sur l’atténuation du changement climatique qui concerne l’efficacité énergétique et l’énergie renouvelable. Notamment, les fermes photovoltaïques. S’agissant du projet Sunref II, nous avons augmenté la somme à 60 millions d’euros et deux banques locales, la State Bank of Mauritius et la Mauritius Commercial Bank, ont financé 350 projets grâce à ce montant. Pour les deux projets de Sunref, nous avons déboursé un total de 100 millions d’euros, soit environ Rs 3 milliards. Et pour le projet Sunref III, nous avons mis à la disposition de ces deux banques 75 millions d’euros au total pour financer des projets relatifs à l’efficacité énergétique et aux énergies renouvelables. Ce montant servira aussi pour la thématique adaptation qui concerne des économies d’eau, l’agriculture intelligente, la restauration des zones côtières et la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes.

Vous avez lancé la troisième édition du Sunref où un montant de 75 millions d’euros est déboursé pour des projets verts. Êtes-vous confiant que ce montant sera complètement épuisé pour les différents projets que seront reçus ?
Nous avons déboursé 75 millions d’euros suite à la demande des banques. Des financements ont déjà été octroyés par les banques dont l’éligibilité à été agréée par l’AFD. Une fois que l’investissement a été contrôlé par un certificateur qui vérifie qu’il est conforme à ce qui été prévu dans le dossier, on financera les “investment grants”. Nous augmentons le montant de Sunref en fonction des besoins. C’est une discussion avec les banques. Elles nous disent que les acteurs privés mauriciens sont de plus en plus demandeurs et qu’ils souhaitent avoir davantage de financements. Ces financements permettent de financer une ligne de crédit qui apporte les premiers 5% d’“investment grant”. De plus, nous avons une subvention de l’Union européenne qui permet de compléter cette “investment grant”.

Nous observons qu’il y a davantage d’entreprises qui demandent ce financement des deux banques principales du pays. Qu’en est-il des individuels ?
Les entreprises et certains particuliers connaissent Sunref. Nous aurons aussi des actions de conscientisation bientôt.

Depuis que vous êtes à Maurice, pensez-vous que les Mauriciens sont assez conscients de la vulnérabilité de l’île ?
C’est vrai que les Mauriciens doivent être aidés par les politiques publiques. Ces politiques publiques devraient accorder une incitation fiscale ou financière et donner plus d’autonomie à l’énergie mauricienne. Donc, il y a ce besoin de politiques publiques mais aussi cette transformation par les municipalités. Et tant que citoyen, il nous faut être responsable au quotidien des déchets, de l’eau, de l’énergie. Lorsque nous quittons une salle, on arrête la climatisation. Peut-être qu’on doit construire différemment en prenant en compte les aérations naturelles. Si nous construisons avec des matériaux qui sont plus isolants, nous aurons moins besoin de climatisation. Il y a toute une éducation à faire. Nous sommes tous embarqués, les Mauriciens comme les Français ou les Américains, sur cette question. Mais il est vrai que Maurice est très vulnérable car il y a les côtes et les cyclones. Le pays est entouré de mer et le territoire est plutôt petit. La vulnérabilité de Maurice est un grand défi.

Outre les deux thématiques phares du projet Sunref qui sont l’atténuation et l’adaptation, nous notons que l’égalité homme-femme est aussi intégrée. Quelle est la raison d’inclure cet aspect ?
Je me réfère toujours aux dernières informations de l’Organisation internationale du Travail qui estime que s’il y avait une égalité entre homme et femme sur le plan professionnel en 2025, la richesse mondiale aurait augmenté de USD 28 000 milliards chaque année. Cette somme équivaut à la richesse américaine et chinoise cumulée. Si nous arrivons à promouvoir cette égalité, l’ensemble de l’économie se portera mieux et elle sera beaucoup plus durable. Il me semble que, pour faire face à ce défi qui est la lutte contre le changement climatique, l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes est un acte fort pour apporter cette transformation au niveau des politiques publiques, des entreprises, des banques et des citoyens. Le changement climatique, c’est aussi des économies sur l’eau en prenant une douche à la place d’un bain, en fermant le robinet pendant qu’on se brosse les dents. On sait déjà qu’il existe des inégalités à travers le monde. Donc, pour nous, il est important de promouvoir l’égalité à Maurice.

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Le BEC dit non à un autre prêt du Sunref

Alors que le projet Sunref est vanté pour les avantages qu’il offre, le Bureau de l’éducation catholique (BCE) qui a été financé par une certaine somme pour l’achat et l’installation des panneaux photovoltaïques et la production d’énergie ne veut plus de financement de Sunref. La raison serait la difficulté de rembourser le prêt obtenu.
Il est à noter que 40 écoles sur un total de 67 du BCE sont pourvues de panneaux solaires pour la production d’énergie. Ces panneaux solaires ont une capacité de 6, 12 ou 18 kilowatts. « Ce n’est pas suffisant pour toute la consommation d’un établissement. Car notre contrat avec le Central Electricity Board était un tiers pour l’établissement et deux tiers pour la vente », soutient Gilberte Chung, directrice du BCE. C’est en 2013 que les premiers panneaux solaires ont été installés dans l’une des écoles appartenant au BCE. Le coût total du projet, révèle-t-elle, était de Rs 65 millions. Un chiffre qui avait créé une certaine inquiétude. Après des discussions avec différentes instances, la somme a pu être recueillie. Une somme de quelque Rs 80 millions était nécessaire pour la préparation des toits avant de poser les panneaux solaires. Une fois les panneaux installés, le remboursement de la somme est enclenché. La période de remboursement est de 2012 à 2020. À ce jour, le BCE doit rembourser Rs 5,9 millions. « Notre revenu mensuel pour la vente de l’électricité est de Rs 225 000 et notre remboursement mensuel est de Rs 606 000 », dit-elle. La production d’énergie est toutefois satisfaisante. À ce jour, les panneaux solaires installés ont produit 3 893 mégawatts d’énergie verte. « Nous avons pu réduire l’émission de 3 215 tonnes de CO2 », fait-elle ressortir. Si plusieurs avantages ont été notés sur le plan éducatif et environnemental, les défis sont quand même importants.
« Si demain, on me dit d’installer encore des panneaux solaires avec le même plan, je dirai que cela coûte trop cher », lâche-t-elle. Le fardeau financier, selon la directrice, est la facturation nette de la phase une et deux, le BCE étant en déficit. Selon elle, alors que le contrat avait été signé avec le CEB pour vendre à Rs 7 pour la première phase, le prix a augmenté à Rs 12,75. Et pour la seconde phase, le prix a baissé à Rs 2,68 alors que le contrat signé pour la vente de l’électricité était de Rs 4,50. Malgré les panneaux solaires, le BCE se voit dans l’obligation d’acheter de l’électricité avec le CEB et paie Rs 10 pour chaque unité. Elle fait ressortir qu’elle doit aussi payer 15% de la TVA à la Mauritius Revenue Authority.
Depuis 2011, le BCE est sur un projet écologique. « Il ne s’agit pas d’un projet mais plus d’un cursus scolaire. Cela est compris dans ce que nous enseignons à nos élèves », explique la directrice. Pour elle, éduquer à la cause écologique était un défi et nager à contre-courant. « Avec une société surconsommatrice, il fallait apprendre aux enfants comment vivre autrement et avoir des gestes différents », dit-elle. Cette démarche, ajoute-t-elle, est l’eco-engagement du BCE pour Maurice et pour la planète. Pour la directrice, c’est la lettre pastorale de 2011 de Monseigneur Maurice Piat qui a motivé le BCE à aller dans cette direction pour la protection der l’environnement. Grâce à cette lettre pastorale, un programme scolaire a été initié par le BCE pour ses établissements intitulé, « Education for sustainability programme ». À la fin de ce parcours, les éducateurs ont été formés, l’empreinte écologique des écoles appartenant au BCE a été mesurée. « Nos élèves ont compris que vu la façon dont nous consommons à Maurice, nous avons besoin de 2,4 planètes », dit-elle. Et d’ajouter que nous consommons trop à Maurice. À travers leur enseignement écologique, elle avance que les enfants ont changé leur mentalité et pensent en termes plus écologiques.
Le BEC est en charge de 58 établissements, soit 46 écoles primaires, 10 collèges diocésains, un collège technique. Dix autres collèges appartiennent à l’Institut de Lorette et à la Fondation de filles de Marie.

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Unité de gestion de projet à Business Mauritius

La gestion de l’assistance technique (AT) de SUNREF Maurice a été confiée à Business Mauritius, entité responsable de la coordination des institutions du secteur privé. L’AT a pour tâche de soutenir les porteurs de projets et les banques dans l’identification d’opportunités en matière d’investissements verts, l’évaluation de l’éligibilité des projets, la promotion de la finance verte et le renforcement des capacités de toutes les parties 6 prenantes. Dans cette optique, BM a mis sur pied une Unité de Gestion de Projet dans ses bureaux et aussi recruté le consortium AETS-ARTELIA, une équipe d’experts externes.
Le président de Business Mauritius, Vidia Mooneegan, souligne l’importance de créer à la fois l’offre et la demande : « SUNREF est une offre de financement très intéressante via les banques dans un contexte mauricien où les mesures d’incitation vers les projets-climat doivent de plus en plus voir le jour. Face à cette offre, il est aussi important de créer la demande. Business Mauritius compte bien mobiliser son retour d’expérience du Programme national d’efficacité énergétique pour faire émerger des projets des entreprises vers les banques. L’émergence des projets nécessite bien souvent une approche partenariale et systémique avec les services de l’Etat sur des thématiques précises. Il s’agit là d’une valeur ajoutée forte de Business Mauritius pour capitaliser sur la relation de travail avec les ministères et d’engager de nouvelles discussions pour identifier les solutions à mettre en place afin de faciliter l’investissement du secteur privé via SUNREF ».

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