ENVIRONNEMENT | Sunil Dowarkasing : « Traiter le changement climatique au niveau des droits humains »

  • L’ancien directeur de la Commission Maurice Île Durable a écrit au Premier ministre, Pravind Jugnauth, demandant un amendement à la Constitution en ce sens

La résolution 7/23 du Conseil des Nations Unies sur les droits humains mentionne que le changement climatique affecte des populations à travers le monde et a des répercussions sur la « jouissance effective » de leurs droits. Dans ce contexte, il est demandé de traiter la question climatique au niveau des droits humains. C’est en se basant sur cette résolution que Sunil Dowarkasing a écrit au Premier ministre, Pravind Jugnauth, réclamant un amendement à la Constitution en ce sens. De même, alors que se tiennent les Assises de l’Environnement, l’ancien directeur de la Commission Maurice Île Durable, plaide pour une attention particulière à la gestion des eaux usées.

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Tout en disant sa déception que la COP25 n’ait pas été à la hauteur des attentes, Sunil Dowarkasing souhaite que les Assises de l’environnement organisées à Maurice déclenchent une synergie, et ce afin que le changement climatique soit abordé de manière holistique. « La COP 25, qui a eu lieu à Madrid du 2 au 13 décembre dernier, était considérée comme étant la COP de l’espoir, où les pays devaient venir avec un plan pour démontrer comment ils allaient réduire les émissions de carbone. Même si 70 pays ont souligné leur intention de passer sous une “low carbon economy” d’ici 2050, il n’y a pas d’engagement des plus gros pollueurs. Tous les observateurs disent que la COP25 n’a rien apporté de concret. C’est un peu chagrinant », dit-il.

Maurice étant classée parmi les pays les plus vulnérables face au changement climatique, la mise en place d’un plan d’urgence est donc essentielle. « Un peuple averti en vaut deux. La population doit savoir que nous aurons à faire face à des situations drastiques et dramatiques. Nous sommes le septième pays le plus vulnérable au monde. La température de surface a déjà augmenté par 1, 2°C. Le niveau de mer, entre 1988 et 2018, a augmenté par 14, 3 cm, à un rythme de 6, 8 mm par année. Qui est beaucoup plus rapide que “l’average global” qui est de 3, 6 mm. »

Il précise que « les plages sont en danger », d’autant que nous avons déjà perdu 17 %, soit 11, 34 km, sur les 67 km de nos “sandy beaches”. Ajouté à cela, poursuit-il, il y a 12 à 25 km de routes côtières qui sont aussi menacées, de même que 6 000 personnes dans ces régions côtières en cas de situation extrême. « On a déjà construit un centre à Quatre-Sœurs, qui va certainement aider, mais il faut voir le reste. Il faut qu’il y ait un plan d’urgence par rapport à cela. On a tendance à se concentrer sur les plages, mais il ne faut pas oublier qu’en cas de grosses pluies, il y a le “landslide” qui est un danger potentiel. Il y a 37 endroits très vulnérables à Maurice, pour lesquels il faut un plan d’action de “response” et des gens entraînés pour cela », précise-t-il.

Dans ce contexte, Sunil Dowarkasing souhaite que Maurice aborde la question de changement climatique par rapport aux droits humains, tel que recommandé par le Comité des Nations unies. « Aujourd’hui, le changement climatique est devenu un Human Rights Issue. Il y a la résolution 7/23 de la Human Rights Council des Nations Unies en ce sens. Je fais donc un appel au Premier ministre, Pravind Jugnauth, pour qu’il amende la Section 2 de la Constitution pour inclure le changement climatique, as a basic Human Right. » Une lettre a donc été envoyée au Premier ministre en ce sens.

Par ailleurs, Sunil Dowarkasing dit « accueillir favorablement » l’initiative des assises nationales sur l’environnement. Toutefois, dit-il, « il ne faut pas se concentrer sur le “mitigation factor” et aller plus vers l’adaptation ». Il ajoute : « Nous avons déjà notre National Climate Change Adaptation Policy Framework de 2012. Le ministre a dit qu’il faut faire une mise à jour. Il faut aussi développer ce que l’Afrique a déjà commencé, un Adaptation Gap Report technique. Cela permettra de voir ce qui a marché et ce qui n’a pas marché. À partir de là, on saura quels sont les défis qui nous attendent et développer un “eco-based adapation strategy and action plan”, qui déterminera ce qu’on doit faire dans les court et long termes. »

Traitement des eaux usées

L’ancien directeur du MID identifie ainsi trois points importants à prendre en considération. D’abord, la gestion des eaux usées. « Je suis allé dans les zones côtières et j’ai vu comment on faisait des canaux pour diriger les eaux usées dans la mer. Les eaux usées polluent nos écosystèmes et notre lagon. J’ai compris que seulement 35 % de Maurice est couvert par le “sewerage network”. Si on veut une île Maurice durable, il faut couvrir toute la région côtière d’ici 2030 », souligne-t-il. D’autre part, il souhaite que les autorités redéfinissent certains terrains exotiques en des terrains endémiques. « La couverture de forêt endémique doit passer de 2 % à 10 % d’ici 2030. Il y a beaucoup d’initiatives citoyennes, mais là, il nous faut une initiative gouvernementale », dit-il.

Sunil Dowarkasing plaide également pour que les bouteilles en plastique soient complètement bannies d’ici 2025, ainsi que les emballages en plastique dans les supermarchés. Il réitère également sa demande pour une étude très poussée pour voir comment le “coal ash” est traité et disposé à Maurice. De même, dit-il, « il nous reste à peu près 30 % de “live coral” à Maurice ». Il poursuit : « Il faut faire un “assessment” où ils se situent et de déclarer ces régions “mini-marine protected area”. Certainement, ils seront vulnérables au “bleaching” dû au réchauffement climatique, mais il ne faut pas que les activités humaines viennent accélérer le processus. » Finalement, il souhaite que les jeunes soient sensibilisés au développement durable à travers leurs études.

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