L’Extradition Bill, qui définit les nouveaux critères pour l’extradition d’un ressortissant étranger, a été présenté à l’Assemblée nationale hier. Cette nouvelle loi, qui viendra remplacer l’Extradition Act de 1970, vise à ouvrir de nouvelles voies afin de faciliter l’entraide entre plusieurs pays et, surtout, de veiller à ce que les droits de personnes soient respectés. Cependant, Me Yahia Nazroo, de la firme Appleby, est d’avis qu’une nouvelle loi n’a pas sa raison d’être, soutenant que l’Extradition Act de 1970 comporte déjà tous les éléments nécessaires pour enclencher des procédures.
L’extradition est une procédure juridique par laquelle un État livre l’auteur d’une infraction à un État étranger qui le réclame, et ce afin qu’il puisse y être jugé ou exécuter sa peine. L’extradition est souvent permise par l’existence d’un accord préalable entre deux États, mais pas nécessairement. Différentes conditions sont nécessaires, telles l’existence de l’incrimination dans l’État au sein duquel se trouve la personne concernée par la procédure, la réciprocité de la procédure d’extradition dans le droit du pays émetteur de la requête, l’absence de motifs politiques ou encore l’impossibilité pour l’État requérant de condamner la personne pour d’autres incriminations que celle pour laquelle est demandée l’extradition. Les procédures d’extradition ont longtemps fait débat dans l’affaire de Nandanee Soornack, lorsque l’État mauricien avait voulu faire extrader la femme d’affaires, qui se trouve en Italie. N’ayant aucun traité avec ce pays, Maurice s’est butée à un jugement défavorable de la cour de Bologne. Le cas du couple Sicart, actuellement en cour pour leur extradition, est une autre affaire à suivre.
Comme le dit ainsi l’Attorney General dans sa présentation de l’Extradition Bill 2017, « the present Extradition Act, which dates back to 1970, has become outdated ». Ainsi, la nouvelle loi vise à faciliter les procédures d’extradition avec plusieurs pays en dehors du Commonwealth, même ceux avec qui Maurice n’a pas signé de traité. Cette nouvelle loi, si elle est votée, accordera aussi à l’Attorney General la prérogative d’accepter ou de refuser une demande d’extradition. Toutes infractions de nature fiscale, militaire ou terroriste seront prises en considération sous cette nouvelle loi. Ainsi, en l’absence d’un traité, deux pays pourront se concerter en vue de l’adoption d’une procédure d’extradition.
Me Nazroo explique qu’il existe déjà deux lois, soit l’Extradition Act 1970 (Act 21 of 1970) et l’Extradition (Commonwealth Countries) Act 1970 (Act No. 20 of 1970), qui sont des législations spécifiques pour ceux ayant commis des délits dans les pays du Commonwealth. « C’est une question très complexe et l’existence de traités contraignants avec Maurice est une question d’“expert evidence” », dit-il. L’homme de loi souligne qu’après l’indépendance, les traités signés avec la France et l’Angleterre ont continué à faire partie de nos législations. « En 1970 cependant, notre propre parlement a établi de nouvelles législations relatives à l’extradition » (Actes 20 et 21).
L’article 3 (1) de la loi préserve l’application de la loi aux États qui avaient déjà été spécifiés en vertu des “Orders in Council” au Royaume-Uni au sujet des lois sur l’extradition. Toutefois, l’application de notre loi à un tel État étranger est subordonnée non seulement à l’existence d’un traité d’extradition, mais aussi à son caractère contraignant. L’article 2 définit expressément un traité d’extradition comprenant un traité conclu avant le 12 mars 1968 qui s’étend et « is binding to Mauritius », fait ressortir Me Nazroo. Bien que cette nouvelle loi vise à faciliter les procédures d’extradition en l’absence de traité, notre interlocuteur dit noter que l’un des objectifs de cette loi est aussi de supprimer des lois qui créent une distinction entre les pays du Commonwealth et ceux non-membres du Commonwealth. En outre, la nouvelle loi vise à simplifier les procédures d’extradition et à promouvoir la coopération.
Me Yahia Nazroo observe qu’en fin de compte, la nouvelle loi fait certes une chose : « Elle remet en question la relation privilégiée que Maurice a avec d’autres pays du Commonwealth »”. Il poursuit : « Cela a été mis en évidence dans l’Act of Parliament qui existe à ce jour. En outre, la nouvelle loi comporte des lacunes, à la fois en substance et en termes de procédures, qui devront finalement être déterminées par notre Cour suprême. » Et Me Nazroo de conclure : « Si nous examinons de près la section 4 (2) de la nouvelle loi, nous avons une idée de la vraie raison pour laquelle cette nouvelle loi est introduite à ce moment précis. » La section en question stipule ainsi : « Subject to this Act, a person may, on the request of a foreign State, be extradited pursuant to an extradition treaty for the purpose of prosecuting that person for an extraditable offence, or imposing or executing a sentence of an extraditable offence against that person. (2) Notwithstanding subsection (1), a request for the extradition of a person by a foreign State may be considered by virtue of comity where that State gives assurances which, in the opinion of the Attorney-General, are sufficient to ensure that it would comply with a comparable request from Mauritius or where, in his opinion, it is otherwise in the interests of justice to do so. »
EXTRADITION BILL 2017—ME YAHIA NAZROO: « Cette nouvelle loi n’a pas sa raison d’être »
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