LE FAIT DE LA SÉANCE: Des préoccupations socio-économiques en prime

Les préoccupations socio-économiques ont dominé les échanges lors de la seconde tranche des travaux de l’assemblée nationale, consacrée aux Parliamentary Questions, hier. Les dossiers évoqués par les parlementaires partaient du déroulement de la présente campagne pour la récolte sucrière, marquée par des pannes majeures notamment à Médine, avec des chambardements au programme de répartition de cannes à être broyées, à la situation financière catastrophique de la Corporation Nationale de Transport (CNT) en passant par les projections plus que positives du ministre des Finances, Vishnu Lutchmeenaraidoo, des principaux paramètres économiques, dont l’évolution du chômage ou encore le montant du Foreign Direct Investment. Toutefois, l’intervention du ministre Roopun est venue remettre les pendules socio-économiques à l’heure en révélant qu’un plan Marshall pour lutter contre la pauvreté est actuellement en voie d’élaboration par des consultants du Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD) avec les conclusions rendues publiques à la fin de cette année.Sur le plan de l’ambiance, les clashes verbaux, faisant monter la tension au sein de l’hémicycle, se sont poursuivis dans l’après-midi avec Madam the Speaker, Maya Hanoomanjee, ayant toutes les peines du monde pour mettre un terme à des échanges sulfureux entre le leader de l’opposition Paul Bérenger et le back-bencher de la majorité gouvernementale Ravi Rutnah, ou encore lors d’un accrochage verbal entre Paul Bérenger et le ministre des Services financiers, Roshi Bhadain, qui avait également croisé le fer avec le Whip de l’opposition, Rajesh Bhagwan, lors de la première tranche des travaux.
Le ministre de l’Agro-industrie, Mahen Seeruttun, qui répondait à une interpellation de Rajesh Bhagwan sur les difficultés des planteurs de cannes avec le déroulement de la récolte sucrière, s’est évertué à être rassurant dans la conjoncture. Il a fait comprendre que la Mauritius Cane Industry Authority (MCIA), de concert avec les autres partenaires de l’industrie, s’assure que la coupe prenne fin dans les meilleurs délais possibles. Il a indiqué que tout a été mis en place pour que la fin de la campagne sucrière intervienne en fin d’année.
Dans cette perspective, au début de la récolte, la MCIA a procédé à une répartition du tonnage de cannes estimé entre les différentes sucreries avec des transferts d’une Factory Area à un autre. Pour cette année, Alteo a informé la MCIA d’un surplus de 110 000 tonnes de cannes à être réalloué vers d’autres sucreries en vue de respecter le délai de 150 jours pour la durée de la récolte. Après un exercice de consultations entre partenaires de l’industrie, il avait été décidé de faire transférer 40 000 tonnes de cannes à Terra dans le Nord, 40 000 tonnes à Médine dans l’Ouest et 30 000 tonnes à Omnicane dans le Sud.
Propositions en ?faveur des planteurs
Néanmoins, le plan de travail a dû être modifié suite aux problèmes rencontrés par Médine avec l’entrée en opération de sa nouvelle centrale thermique et des pannes subséquentes. De ce fait, Médine a accumulé des retards dans le démarrage de la récolte sucrière. Les 40 000 tonnes additionnelles de cannes de Médine ont dû être revues, avec 30 000 tonnes redirigées vers Terra et 10 000 tonnes vers Omnicane. Au 5 septembre, 45 824 tonnes de cannes d’Alteo avaient déjà été envoyées à Terra et Omnicane.
De son côté, en vue de rattraper son retard, la sucrerie de Médine a pris la décision de maintenir la roulaison pendant les jours fériés et d’entamer la journée de travail plus tôt le matin. « As per the milling programme the harvest is expected to be completed by the end of December », soutient le ministre, qui a donné la garantie qu’il veillerait que la récolte ne soit pas étendue jusqu’à janvier 2016.
« Puis-je rappeler à la Chambre qu’une étude a été entreprise pour une évaluation de l’impact socio-économique de l’abolition des quotas de sucre internes au sein de l’Union européenne à partir de 2017. Cette étude a recommandé que les sucreries roulent sept jours sur sept. This measure would positively impact on the duration of the crop and the extraction rate as milling would be undertaken when the crop has the highest sucrose content », a ajouté le ministre, qui a annoncé que des consultations ont été initiées au sein de l’industrie pour la mise en application de cette mesure.
Bhagwan : Outre les décisions annoncées, le ministre envisage-t-il de nouvelles mesures pour venir en aide aux petits planteurs, qui font face à des difficultés dans la conjoncture ?
Seeruttun : L’industrie sucrière affronte une situation des plus difficiles avec l’ouverture du marché sucrier en Europe. Nous avons un rapport commandité de la firme Landell Mills avec une série de propositions. J’ai institué un comité pour étudier les conclusions de rapport et très bientôt, je viendrai à la Chambre avec une série de propositions en faveur des planteurs, des employés en général.
Bhagwan : Toutefois, les petits planteurs sont les plus à plaindre. N’y a-t-il moyen de revoir à la hausse le Bagasse Transfer Price, car il ne faut pas oublier que le Central Electricity Board réalise des profits par milliards sur le prix de l’électricité ?
Seeruttun : Je viendrai avec des mesures bientôt.
Bhagwan : Le ministre a annoncé la fin de la récolte pour décembre. Mais a-t-il un plan d’urgence au cas où la récolte sucrière se prolonge jusqu’en janvier prochain ?
Seeruttun : We are monitoring the situation very closely. Avec les difficultés rencontrées par Médine, nous avions déjà procédé à une réallocation. Si le besoin se fait sentir, nous allons revoir la situation.
De son côté, le ministre des Finances, Vishnu Lutchmeenaraidoo, a adopté un ton résolument optimiste en répondant à l’interpellation du député du MMM Reza Uteem au sujet de l’évolution des paramètres économiques depuis le début de cette année. Il a fait état de la baisse du taux de chômage d’un trimestre à un autre, soit de 8,7 % à la fin de mars dernier à 7,8 % à la fin de juin. « Il ne faut pas oublier que les projections de Statistics Mauritius misent sur un taux de chômage de 8 % en 2015. En plus, il y a les projets d’investissements devant le Fast Track Committee sans oublier ceux des Smart Cities », a-t-il dit en annonçant le recrutement de 250 diplômés chômeurs et de 700 non-détenteurs de diplômes sous le programme de placement et également l’embauche de 7 000 personnes pour remplir les postes vacants dans le Service civil.
Au chapitre de la dette, le Grand argentier a révélé le chiffre de Rs 222,1 milliards, représentant 56,1 % du PIB, une détérioration de trois points par rapport à l’exercice précédent. « Cette dégradation est imputable à la ligne de crédits de Rs 3,5 milliards allouée à la National Property Fund Ltd dans le sillage de l’affaire BAI », a-t-il fait comprendre en substance. Une autre cause est l’appréciation du taux de change de la roupie par rapport au dollar américain et autres devises.
De janvier à juin, ?le FDI a été de Rs 4,8 milliards
Uteem : Le ministre a confirmé que le taux de chômage sera de 8 % en 2015, en hausse comparativement aux 7,8 % de l’année dernière. Sur la base de l’évolution, croit-il pouvoir créer les 10 000 emplois annoncés à la fin de cette année ?
Lutchmeenaraidoo : L’année dernière, le taux de chômage a été de 7,8 %. Mais pour les années précédentes, la moyenne a été de 8 %. The good news, the great news est qu’il y a eu un renversement de tendance au cours du premier semestre, passant de 8,7 % à 7,8 %. C’est substantiel. I have no doubt that in 2015, we will have 8 %.
Meea : BAI ladan !
Uteem : Le ministre se félicite de l’évolution du chômage. Peut-il confirmer si cette tendance concerne ceux se trouvant dans la tranche d’âge de moins de 25 ans ?
Lutchmeenaraidoo : What is clearly shown is that unemployment is going down. C’est un signe positif.
Uteem : Il a fait état de FDI de Rs 4,8 milliards. Nous sommes maintenant au neuvième mois de l’année. Est-il satisfait que d’ici la fin de l’année, nous allons atteindre l’objectif déclaré du Premier ministre de Rs 100 milliards de FDI en cinq ans ?
Lutchmeenaraidoo : Les chiffres cités sont pour les premiers six mois. Et je suis d’avis que d’ici la fin de cette année, nous devrons être en mesure d’atteindre les Rs 10 milliards… It will be a bumper year in terms of FDI…
Uteem : Peut-il nous donner une idée de la répartition du FDI en pourcentage de Real Estate et d’investissements productifs ?
Lutchmeenaraidoo : These figures are quite indicative. I don’t have the breakdown by sector.
Pour sa part, le ministre des Infrastructures publiques, Nando Bodha, répondant à une PQ du député de Grand-Baie/Poudre-d’Or Rughoobur, n’a pas caché ses inquiétudes devant la situation financière catastrophique de la CNT. Il rappellera d’emblée que les bilans financiers de 2014 et de 2015 n’ont pas été complétés vu que la CNT ne dispose pas des services d’un Full-Fledged Financial Comptroller. Au 30 juin 2013, le Net Cash Flow se montait à Rs 217,35 millions. Toutefois, les comptes audités à cette dernière date confirment des pertes de Rs 89,1millions.
« Depuis 2007/08, la CNT a essuyé des pertes sauf pour 2011 et 2012 où des profits ont été enregistrés suite à des changements dans les Accounting Standards. I consider that the situation at the NTC to be a catastrophic one for a number of years », s’est appesanti le ministre. Il a attribué cette détérioration aux révisions salariales de 2013 et de 2015. « Le Collective Agreement de 15 % en janvier 2013 et de 2 % en janvier 2014 et de 2 % en août 2015 et les 15 % du NRB en janvier de cette année se traduisent par une somme additionnelle de Rs 14 millions par mois, soit Rs 183 millions depuis 2013 », a-t-il dit.
Nando Bodha a annoncé un appel de candidatures pour remplis les postes stratégiques vacants au niveau du management, un programme de renouvellement de la flotte dans les délais les plus courts avec la mise en service de 100 Semi low-floor buses dès mars prochain pour atteindre 500 en cinq ans, un plan d’optimisation sur les plans des recettes, de la consommation de carburant, de l’entretien des véhicules et de la main-d’oeuvre de même que l’introduction d’un « modern fare collecting system based on Smart Cards ». Il a aussi évoqué une proposition de la société FleetAfrica pour le leasing des autobus dans le cadre du renouvellement de la flotte.
À l’envers du décor, le ministre Roopun est venu rappeler que le problème de la pauvreté au sein de la société mauricienne ne peut être occulté. Profitant du Statement Time, il est venu remettre la pendule socio-économique à l’heure en annonçant que le gouvernement en collaboration du PNUD s’est embarqué dans la préparation d’un plan Marshall pour combattre la pauvreté. Un consultant a été recruté avec la venue prochaine d’une mission d’experts pour des consultations sur le terrain et le plan Marshall complété vers la fin de cette année.
Plan Marshall
En termes d’ambiance, il y a eu une véritable poussée d’adrénaline quand le ministre de la Santé, Anil Gayan, a été acculé par Adil Ameer Meea au sujet de sa mission d’une journée à Agalega le 27 juillet dernier. Dans sa réponse liminaire, le ministre a soutenu que les habitants d’Agalega ne connaissent même pas l’identité de leurs représentants à l’Assemblée nationale, et en particulier le député de l’opposition, qui ne s’est nullement laissé faire.
Meea : Ce qui s’est passé avec le déplacement du ministre Gayan à Agalega est sans précédent. Il n’a pas eu de contact avec les habitants de l’archipel, soit 291. D’habitude, lors de chaque déplacement de ministres, une rencontre avec les habitants est organisée ; Pourquoi tel n’a pas été le cas le cas cette fois-ci ?
Gayan : Unless my English is very poor, j’ai fait état d’une rencontre avec les habitants et j’ai même déposé une photo sur la table de l’Assemblée…
Meea : Li koz manti…
Bérenger : Ou inn deza trouv sa ou. Enn minis pe tir foto…
Meea : Voyez l’édition du Mauricien, qui donne un compte rendu de cette visite où il n’y a aucune mention de rencontre avec les habitants…
Gayan : I am not guided by press article.
Entre-temps, la tension commence à monter au sein de l’hémicycle avec les parlementaires de la majorité demandant au député du MMM de se rétracter car il aurait traité le ministre de menteur. La situation connaîtra une nette détérioration avec l’intervention de Madam the Speaker.
Hanoomanjee : Honourable Meea, just withdraw what you have said…
Bérenger : Madam Speaker, you have better ears than mine. Je suis assis devant l’honorable et je n’ai pas entendu les propos incriminés.
Les autres députés, dont Ravi Rutnah, se mêlent de la partie avec un affrontement verbal entre ce dernier et le leader de l’opposition.
Bérenger : (rétorquant à une remarque de Ravi Rutnah) : Taler sa bann fam dezorder dan Londres pou vinn rod twa… Ta Ti-Roke
Rutnah : Sa mem to maler sa…
Madam the Speaker doit intervenir de manière ferme pour ramener le décorum au sein de l’hémicycle.
Meea : Le ministre a laissé croire que les habitants d’Agalega ne connaissent pas leurs représentants à l’Assemblée nationale, dois-je comprendre que cela inclut le ministre Husnoo ?
Gayan : Je n’ai fait que poser la question aux habitants d’Agalega…
Bérenger : Cheap. Li telman arrogant…
Un autre éclat de voix devait également éclater lors des échanges sur le Double Taxation Agreement Treaty avec l’Afrique du Sud. À l’heure des interpellations supplémentaires, le ministre Roshi Bhadain devait déclarer : « I don’t know whether the leader of the opposition understands… »
Cette remarque devait mettre de nouveau le feu aux poudres avec Paul Bérenger soutenant avec force auprès de la présidence de l’Assemblé nationale que « he can’t go on like that. Ar mwa pa rod lamerdman. Ti fezer, arogan » et Madam the Speaker intervenant pour limiter les dégâts…

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