GLOBAL BUSINESS – EU Blacklist – Pierre Dinan : « Les régulateurs n’ont pas fait leur travail »

-Amédée Darga : « Notre Blacklisting par l’UE n’est pas un accident » -Sridhar Nagarajan : « We have created a strong ecosystem for the investors »

La décision de l’Union européenne de placer Maurice sur la liste noire des pays à risques concernant le blanchiment d’argent et la lutte contre la fraude et le terrorisme fait encore parler. Cela a été le cas lors d’une conférence organisée par Cybernaptics. L’économiste Pierre Dinan, qui était invité sur un panel dédié au “global business”, est catégorique : « From what we have seen, it looks as if the regulators have not done their job – at least on time – responding to FATF, etc… COVID has been an excuse… It is most unfortunate. I am not well placed to talk about what is going on in management companies – I used to be – but obviously there is a need from MC to do the job properly. » L’économiste a poursuivi en ces termes : « We are being closely watched by international institutions and sometimes we are more closely watched by them, but this is another mater… »

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La conférence organisée par Cybernaptics était sur le thème de la robotisation des procédures concernant la conformité (compliance) dans le secteur du “global business”. Elle a permis à des observateurs et opérateurs de s’exprimer. Amédée Darga, directeur de Straconsult, estime : « We have to understand that the EU blacklisting is not an accident. We can blame ourselves certainly, but on the other way, you all know that we dont throw stones at mangoes un less they are ripe enough to be eaten. There is something about our financial sector that is perceived as a problem for others… »
Sridhar Nagarajan, Managing Director d’IQEQ (Mauritius) Ltd, souligne que le secteur du “global business” mauricien a bien progressé et que « there is a high recognition of the level of services in the financial services sector today from our cutomers from India, Africa and the US and we need to be proud of this ». Et de poursuivre : « We have created a very strong ecosystem for the investors who truly invest into several jurisdictions. » Il s’agira, selon lui, de bien gérer la période de “blacklisting” qui débutera à partir du 1er octobre et qui devrait durer pas moins de huit mois, c’est-à-dire jusqu’en mai 2021. Sridhar Nagarajan estime cependant que le volume d’attention et d’efforts de différentes institutions et organisations durant ces 12 derniers mois pour protéger la juridiction mauricienne a eté « significatif ». Déjà, la décision du GAFI de placer Maurice sur la liste grise a représenté un « good pressure » pour Maurice, affirme sans ambages le Managing Director d’IQEQ, qui demeure optimiste pour Maurice : « As a operator who is constantly speaking to clients, we see a very positive future for our global business sector. We started playing in the second division, but since the last five years, we have been playing in the first division wihout even realising it », explique le responsable d’IQEQ et cela a apporté davantage de compétition pour Maurice.
Pierre Dinan a un avis plus nuancé : « I am concerned about your reference to first division. First division players must delivrer first division service. We are offering good service but for this to continue in the future, we will need to deliver first class service and we have to reflect on the availibility of people in the financial industry with digital knowledge. » Pour l’économiste, si Maurice a perdu son avantage fiscal, il faut maintenant miser sur l’éducation même si « nous sommes déjà en retard. » Pierre Dinan d’insister qu’il faut embrasser pleinement la révolution fintech, cela d’autant que Maurice doit être “at par” avec d’autres juridictions européennes et régionales, à l’exemple du Rwanda. « We know we have the capacity to adapt so we must adapt, but it starts with training, éducation and attitude ; and it starts at school. »

« Extremely painstaking »

Sur la conformité, Amédée Darga dira que cela représente une partie importante du “global business” et implique des coûts énormes pour le secteur : « We have to live with it but it is extremely painstaking and represents an annoyance for clients. » Pour Sridhar Nagarajan, l’évolution de la conformité reflète l’évolution du “global business”. Sridhar Nagarajan estime que la technologie, en particulier la robotisation des procédures, peut justement contribuer à faire chuter le “cost of compliance”. Maurice peut se positionner, dit-il, sur la conformité par rapport aux autres jurisdictions. Le Managing Director d’IGEQ observe que beaucoup de grandes management companies (MC) se sont aujourd’hui internationalisées et que la pression est plus forte sur les plus petites MC s’agissant de la mise en conformité.
Gavish Seetohul, Senior Compliance Manager du groupe MCB, est intervenu pour expliquer que ces deux dernières années ont été « two years of hardship as we, as compliance practionners, have been overloaded with regulations, to off the pressure on the regulator. » S’il reconnaît que « much pressure bas been put on the regulators » ces derniers temps que ce soit dans le secteur bancaire et le non-banking financial sector, il met l’accent sur les obstacles en termes de conformité, parce que les régulateurs ne sont pas « supportive » eu égard à la digitalisation des procédures. Gavish Seetohul estime que les banques et MC – surtout celles avec une large base de clients – ont besoin de procédures robotisées pour faciliter la conformité mais les régulateurs n’encouragent pas ce processus. Il dit que ces derniers doivent changer de “mindset” : « If we are not supported by regulators, digitalisation is quite a difficult journey. »

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Gavish Seetohul (Senior Compliance Manager – MCB Group) : « Le régulateur doit changer de “mindset” »
On parle désormais de “bots”, de robotisation des procédures de conformité dans les banques et management companies. Maurice est-elle prête pour ce changement ?
Il faut voir le contexte dans lequel nous évoluons depuis 2018. Les régulateurs sont sous pression et doivent montrer à l’ESAAMLG, au GAFI et à l’UE qu’ils sont en train de faire le nécessaire pour être en ligne avec les normes requises. Dans la foulée, beaucoup de pressions sont exercées sur les opérateurs et nous avons l’impression que certaines mesures sont prises à la va-vite et cela met encore plus de pression sur nous. Il faut nous donner du temps pour adapter nos systèmes et “process”. Depuis 2018, il y a tellement de législations qui ont changé – des fois sans concertation, ni communication préalable avec les opérateurs – et qui ont eu un impact particulièrement lourd de conséquences sur les activités.
Pourquoi dites-vous que le régulateur n’est pas “supportive” en matière de robotisation des procédures ?
Leur priorité, ces derniers mois, est ailleurs ; ils doivent monter que Maurice fait tout pour être conforme aux exigences du GAFI, et par ricochet de l’UE. Entre-temps, de notre point de vue et pour des questions de coûts et de rationalisation des procédures, nous investissons dans la digitalisation de nos opérations et nous ne pouvons que constater que les régulateurs ne sont pas suffisamment dans une approche de soutien par rapport à cela. Le ressenti, lors des échanges, est qu’ils sont parfois trop réservés par rapport à des choses que l’on veut mettre en place. Par exemple tout ce qui est documentation et information peut se faire via la robotisation et des “bots”, mais je ne suis pas sûr si les régulateurs, en ce moment, sont prêts à accepter cette façon de travailler. Il y a un “mindset” à changer ; surtout si nous voulons faire de Maurice un hub en matière de Fintech.
La robotisation des procédures est-elle en cours dans d’autres juridictions ?
Il y a certaines qui sont beaucoup plus matures que nous. Il y a des juridictions comme Singapour, Jersey et Guernsey, qui ont pris le temps petit à petit d’intégrer le côté technologique dans toutes leurs opérations et procédures de conformité.
La RPA (Robotics Process Automation) est déjà utilisée au sein du groupe MCB ?
Ça démarre. L’année dernière, nous avons lancé un “process” d’“on-boarding” au niveau des petites et moyennes entreprises. Il s’agit d’un “process” qui est totalement digital sauf que le client doit se présenter en banque au moins une fois, avec tous ses documents, pour se conformer à la loi et aux exigences du régulateur. Sinon, le “process” est entièrement digitalisé du début à la fin. La MCB a aussi investi dans des outils qui vont dans cette mouvance de la digitalisation. Nous sommes déjà installés dans cette transition mais on aimerait justement que les régulateurs soient un peu plus en accompagnement, et même un peu plus prescriptifs, je dirais, en venant encourager les opérateurs financiers à se tourner davantage vers la digitalisation et la robotisation. De notre côté, nous voulons accompagner l’évolution et pas être uniquement sur la “receiving end”. Il faut néanmoins reconnaître certaines initiatives prometteuses du côté des autorités, on parle maintenant de Digital Assets, d’e-KYC et de Central KYC Registry. Mais certaines de ces initiatives ne doivent pas tarder à se concrétiser.

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