Hommage au Dr Alex Boraine, ancien président de la Truth and Justice Commission

DR JIMMY HARMON

- Publicité -

Part Time – Truth & Justice Commission (2009-2011)

Cher Alex,

C’est avec peine que nous avons appris tardivement à Maurice que vous nous avez quittés le 5 décembre 2018 à l’âge de 87 ans. Au nom de mes compatriotes et des miens, je vous fais part de mon extrême embarras pour cet impair alors que vous nous avez aidés à faire la lumière sur notre histoire, notre lutte et nos combats pour avoir été président de la Truth and Justice Commission (TJC) de 2009 à 2011. Sans compter le rapport de la Commission et ses 290 recommandations que vous avez léguées à la postérité mauricienne. Nous tenons à vous remercier vivement pour cela. C’est l’occasion pour nous, Mauriciens, de relire les grandes étapes de votre vie et nous en laisser inspirer.

Après avoir été ordonné Pasteur Méthodiste en 1956, Alex Boraine poursuivit ses études à Rhodes University, Oxford University, au Royaume-Uni, et Drew University, aux États-Unis. En 1970, il est nommé plus jeune président de l’Église Méthodiste de l’Afrique du Sud. Aussi, il fut élu au Parlement comme député du Parti Progressiste en 1974. Le Parti fut fondé en 1959 par des dissidents du Parti Uni et a depuis été partisan de la charte des droits, des réformes constitutionnelles et du partage de pouvoir avec les noirs. En 1986, Boraine quitta le Parti Progressiste et fonda avec Van Zyl Slabbert un institut portant le nom Idasa (Institute for Democracy in South Africa). En tant que directeur de l’Idasa, Boraine fut l’architecte de la rencontre historique d’un groupe d’universitaires, d’enseignants, de journalistes et de professionnels blancs et noirs avec une délégation de l’ANC dirigée par l’ancien président Thabo Mbeki. Mais Boraine a acquis une notoriété internationale en tant que vice-président de la Commission Justice et Réconciliation aux côtés de l’Évêque anglican Mgr Desmond Tutu de 1996 à 1998. Cette commission a grandement aidé à mettre en place un système démocratique dans la nouvelle Afrique du Sud post-apartheid.

À l’annonce de votre décès, votre famille a émis un communiqué, vous décrivant comme “a loving and wise husband, father and grandfather. We salute his lifelong dedication to non-racialism, human rights, democracy and social justice in South Africa and around the world. Most of all he inspired us with his passion for life and his big heart”. À Maurice, tous ceux qui vous ont côtoyé et même pour un court instant au temps de la Commission Vérité et Justice ne diront pas le contraire. J’eus l’honneur de vous faire la conversation à deux ou trois reprises. Votre enthousiasme silencieux et votre détermination contagieuse avec les rides sur le visage en disent long sur l’homme. Certains dans le cercle du pouvoir avaient cru que la Commission Justice et Vérité allait être une autre de ses commissions qui ne connaissent aucun lendemain. Mais c’était mal vous connaître. Vous fîtes sortir le rapport comme prévu en 2011, au grand dam des conseillers en obscurantisme. Cependant, avant de rendre public le rapport, vous avez eu une session de travail avec tous les chercheurs, les consultants et autres collaborateurs. On comprit que cette Commission Vérité et Justice, obtenue de haute lutte, est unique en son genre dans le monde parce qu’elle est la seule qui ait enquêté sur l’histoire et les conséquences de l’esclavage et de l’engagisme. C’est dire comment tous ceux engagés dans cette lutte tiennent à ce que les recommandations soient mises en application.

Nous sommes à un mois de la commémoration de l’abolition de l’esclavage, le projet Intercontinental Slavery Museum, une des recommandations majeures du rapport de la Commission, reste dans les limbes avec le ministère des Arts et de la Culture depuis 2011. Vous en savez des choses et vous souriez sûrement là où vous êtes.

Nous présentons nos plus sincères
condoléances à vos proches.

Repose en paix, cher Alex.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour