Identités : distinguons les arbres parasités de la forêt endémique

SAMAD RAMOLY

Il ne s’agit pas ici de minimiser l’impact des situations de dérives, mais d’essayer de les expliquer avec détachement. Stigmatiser telle ou telle « communauté » sans apporter du relief notamment historique, anthropologique, socio-économique ne fait qu’alimenter et accentuer le clivage entre la tribu « eux » et la tribu « nous ». Notre vivre ensemble est aussi précieux qu’il est vulnérable à la malveillance de notre classe dirigeante et à notre manque de discernement. Nos ressources humaines, et par extension notre productivité au travail et notre compétitivité sur le marché mondial, sont ultra-sensibles à l’intensité de notre bien-être.

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Que des missiles en toc dans une manifestation contre l’oppression puissent interpeller est tout à fait compréhensible ! Pourquoi certains binationaux votent pour Le Pen? Pourquoi d’autres se retrouvent dans la « mission » de Modi ? Choisit-on volontairement de vivre en mode « bwar-amize« ?  En vérité, à moins de prétendre être sur la voie de l’ascétisme, nous avons besoin de nous identifier à plusieurs communautés (et de naviguer entre) qui se juxtaposent, qui s’affirment et se replient selon les circonstances de notre vécu et selon notre personnalité. Par exemple, notre identité peut osciller entre une appartenance teintée d’indianité, d’islamité, d’africanité, d’européanité, de « sinolité » (ou de cosmopolitisme (avec une forte empreinte occidentale certes); de féminité ou de transgenrisme; de catholicisme ou d’agnosticisme; de patriotisme mauricien ou de citoyenneté sans frontières; bref, d’innombrables permutations saines aussi bien que malsaines sont possibles. En revanche, ce n’est pas le pluralisme de notre identité multiculturelle qui peut porter atteinte au respect mutuel et au civisme, mais son instrumentalisation. La déchéance de l’identité est révélatrice d’une souffrance insoutenable par rapport à l’existence de l’individu.

Si nous ne vibrons pas invariablement pour ce que nous proposent nos élites dirigeantes comme projet de société, c’est qu’il est, entre autres, profondément miné par l’absence de leadership cohérent et visionnaire. Dans ce contexte, nous avons tendance à nous accrocher à d’autres « forces » souvent fantasmées, peu importe si elles sont exclusives et néfastes à l’Autre. Pour évacuer les sentiments de désespoir, les canaux malsains se transforment souvent en refuge. Or, pour construire une histoire commune, les politiques publiques doivent intégrer toutes les composantes de la nation. L’obstacle dressé par les partisans du statu quo pourra être renversé quand « I love Lazistis » devient viral. C’est-à-dire, avec une masse critique, qui transcende les « tribus » contre les injustices, le mépris et la connerie.

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