Je suis un die-hard du Labour, mais…

MANAND BALDAWOO,

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Entrepreneur et citoyen engagé

Notre pays se trouve aujourd’hui dans une situation catastrophique avec un gouvernement dont la ligne de communication est tellement illisible, voire inexistante, et dont la gestion discutable de la crise sanitaire – mais aussi économique – a poussé à une perte de confiance du peuple. De l’autre côté, Navin Ramgoolam aurait dynamité le rassemblement des forces de l’opposition et propose le Parti travailliste comme seul adversaire du MSM et de ses alliés. Un scénario qui ne peut que réjouir Pravind Jugnauth et remettre sur le tapis la question du départ de l’ancien Premier ministre, deux fois battu aux récentes législatives.

Certes, l’Alliance de l’Espoir est plutôt celle du désespoir avec un rassemblement hétéroclite incapable depuis des décennies de se poser en alternative. Les fidèles du MMM ont de plus en plus de mal à digérer les compromissions de son leader historique, qui s’allie aujourd’hui à l’ennemi historique, le coq déplumé, et peinent à accepter le surambitieux, qui hier encore baisait la main de son PM.

Le Parti travailliste peut se poser en alternative mais pas avec Navin Ramgoolam à la tête car c’est un poids lourd qui traînerait trop de casseroles. « The guy must go », écrivait un éditorialiste lors du premier mandat de Ramgoolam fils à la fin des années 90. Cette injonction est toujours d’actualité malheureusement. C’est à ce prix que le Parti travailliste pourra reconquérir son électorat et s’ouvrir à la population.

Je suis un die-hard du Labour. Candidat et élu pour le parti aux municipales à Quatre-Bornes dans les années 80 au moment où le parti peinait à se relever de sa cuisante défaite de 1982 face au MMM-PSM. Colistier de Siram Sakaram, j’ai fait campagne pour Oumajee Saccaram, Harrydev Ramchurn et Tirvengadum. Pendant ce temps, Ramgoolam se la coulait douce sur les berges de la Tamise. Il aura fallu que Sir Satcam Boolell accepte de céder le leadership pour qu’il se décide enfin. Il sera un des seuls trois élus du parti avec Vasant Bunwaree et Arvin Boolell aux élections de 1991.

S’opposer à Navin Ramgoolam

Plus présent à Londres que sur les bancs de l’Assemblée nationale, son premier mandat aura été une disgrâce et il aurait pu perdre son siège, n’étant Paul Bérenger, en disgrâce auprès de SAJ, qui va faire capoter la motion visant à punir son absence du Parlement. Son mandat de Premier ministre à partir de 1995 va être entaché de scandales mais aussi d’inactions gouvernementales s’agissant des chantiers dont le pays avait bien besoin pour s’embarquer dans le XXIe siècle. Comment aussi ne pas mentionner sa gestion honteuse des événements de Février-99 qui devaient mettre le pays à feu et à sang? Une conduite sanctionnée par une amère défaite aux élections de 2000.

Son deuxième mandat à partir de 2005 sera aussi marqué par d’autres délicates situations (Jeetah et les universités, Baichoo et la construction des routes) et aussi une inaction criante de différents ministres. Il n’empêche qu’il se présente de nouveau face à l’électorat en 2014 en s’alliant une nouvelle fois avec Bérenger, en l’appâtant avec un poste de Premier ministre et se promettant à lui-même celui de président avec des pouvoirs exécutifs. Une ambition qui ne sera pas cautionnée par le peuple, qui va désavouer un tandem qui se posait vraisemblablement comme les propriétaires de ce pays.

Après sa défaite, Ramgoolam a joué solo; il allait dans les congrès et ne rencontrait pas les membres du parti et encore moins les sympathisants. On parlait de rupture mais il n’y a eu aucun changement. Personne n’a eu le courage de s’opposer frontalement à Ramgoolam, qui se poserait en tant que propriétaire du parti. On se souviendra de l’épisode humiliant pour Arvin Boolell quand Ramgoolam débarqua au comité exécutif du Ptr et le poussant à battre en retraite.

À l’époque, j’avais proposé une direction collégiale avec 10 deputy-leaders qui pourraient éventuellement aspirer à prendre le leadership du parti un jour. Mais cette formation continua à être un one man show. Même la victoire d’Arvin Boolell à la partielle du numéro 18 en 2017 a été « hijacked » par Ramgoolam. Ce qui devait arriver arriva en 2019 avec une nouvelle défaite pour le parti mais aussi Ramgoolam, qui avait honteusement essayé de trouver refuge au numéro 9. Car la population n’a pas voulu cautionner le retour des politiquement honnis d’hier, les Jeetah, Bundhoo, Baichoo et autres transfuges, dont Martin.

Le Parti travailliste peut représenter l’alternative crédible au MSM et au gouvernement en place mais pour cela, il est temps que les dinosaures qui ont fait tant de mal au parti et au pays, Navin Ramgoolam en tête, laissent la place à une nouvelle génération de politiciens plus en phase avec les aspirations des Mauriciens et en particulier des jeunes qui en ont marre de la politique des dynasties. Si Navin Ramgoolam persiste à rester à la tête du parti, cela ne pourra que jouer en faveur de Pravind Jugnauth et du MSM. Si le Parti travailliste ne fait pas partir Ramgoolam, c’est une nouvelle défaite qui pourrait s’annoncer pour les prochaines législatives. Yes, the guy must go. Il y va de l’avenir du parti et de notre pays.

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