JOËL SÉVÈRE (président comité technique AMA) : « Retrouver le niveau mondial à partir de 2016 »

Exit Nice 2013, enter Glasgow 2014. Du côté de l’Association mauricienne d’athlétisme (AMA), les regards sont déjà bel est bien tournés vers les 20es Jeux du Commonwealth à Glasgow, voire plus loin, les Jeux des îles 2015, et surtout « le retour de l’athlétisme mauricien sur l’échiquier mondial à partir de 2016 », comme le dit Joël Sévère. L’entraîneur national des lancers et responsable du comité technique de l’AMA effectue dans l’entretien qui suit un retour sur la saison écoulée et s’arrête sur les grandes échéances à venir. Il commente également les solutions envisagées pour combler les lacunes relevées dans certaines épreuves.
Joël Sévère, dira-t-on que 2013 a été une bonne année ou bonne partiellement ?
Dans l’ensemble, ça a été une bonne saison par rapport aux Jeux de la Francophonie (Nice), qui étaient l’objectif principal. D’autant que nous nous trouvons dans une période de renouveau après l’épopée des Buckland, Milazar, Chimier et Casquette au niveau mondial. À l’évidence, nous n’avons plus d’athlètes de ce niveau, car les Jeux de la Francophonie représentent un niveau intercontinental. Donc, le but est surtout de retrouver à partir de 2016 des athlètes sur l’échiquier mondial. Je pense à ceux-là qui ont intégré les centres de haut niveau à l’étranger et d’autres sur place qui ont le même potentiel pour atteindre ce but, à l’image des Jonathan Permal, Thierie Ferdinand, Joanilla Janvier, Julien Meunier (Centre de l’IAAF à Kingston en Jamaïque) et Orwin Émilien, qui s’entraîne à Maurice. Mais il y a aussi huit jeunes qui ont réalisé l’an dernier les minima des mondiaux cadets. Nous devrions pouvoir compter sur un ou deux d’entre eux pour atteindre le niveau international en 2016 ou 2019. Bien sûr, des problèmes surgiront en cours de route. Mais le but a été fixé. 2013 a été une année bien remplie.
Résultats et performances ont été conformes aux attentes ?
Résultats et performances ont été conformes aux attentes par rapport aux moyens disponibles. À Nice, on s’attendait à obtenir deux médailles et on en a eu trois de bronze avec Jessika Rosun (javelot), Jonathan Permal (200 m) et Guillaume Thierry (décathlon). La médaille de Rosun était inattendue vu qu’elle était assez difficile à conquérir dans les épreuves de concours. On peut ajouter les deux médailles de bronze obtenues aux premiers championnats d’Afrique cadets au Nigeria par Mélissa Arlanda (marteau) et Stevenson François (octathlon). Donc, le potentiel est là. Reste à le développer.
À bien y voir, l’athlétisme est de loin la discipline ayant vraiment répondu présent à Nice l’an dernier ?
Chaque discipline mauricienne est arrivée à Nice avec ses propres objectifs et son niveau. Pour les athlètes, il y avait les minima qui avaient été établis. Et ces minima sont de nature à pousser les athlètes à se surpasser. À chaque discipline ses réalités. Mais il y a aussi eu le cas d’un athlète dont la performance a été de loin en deçà des attentes au lancer du marteau hommes. On le déplore d’autant que l’image qu’il a envoyée est mauvaise vis-à-vis des sponsors et des partenaires.
Avec Jonathan Permal qui s’est déjà révélé aux championnats d’Afrique juniors avec une médaille d’argent au 4×100 m et deux de bronze aux 100 et 200 m à Maurice puis à Nice, peut-on penser que le sprint reprend de l’essor ?
Il faut surtout le voir de façon globale en considérant aussi les cadets qui réalisent les minima des mondiaux. Mais reste à savoir comment ces derniers vont aborder la catégorie juniors en même temps que leurs études, une fois en SC et en HSC. Car malgré le bon travail du Trust Fund for Excellenec in Sports (TFES), certains parents et même certains entraîneurs n’ont toujours pas compris de l’importance d’une compatibilité entre les études et le sport.
Le problème reste donc entier ?
Fort heureusement, il ne l’est plus car le TFES aide certains sportifs-collégiens à intégrer des classes spéciales et même ceux qui sont hors de la filière éducative normale mais qui ont été placés dans des centres d’apprentissage et vocationnels. Le seul obstacle qui reste à franchir est l’éducation de la grande majorité des parents et même des entraîneurs pour qu’ils croient aussi au projet de la filière sport-études. Dans la région de l’ouest au stade de Bambous, trente jeunes ont été choisis pour bénéficier d’un projet semblable financé par Innodis et axé sur le sport et le social pour 2014. La même opération sera conduite dans d’autres régions.
Vous avez été nommé président du comité technique de l’AMA et donc responsable de l’entraînement et du suivi des athlètes, des compétitions nationales ainsi que des centres régionaux et du Kids Athletics (l’initiation des jeunes à la pratique de l’athlétisme dans les écoles). Comment comptez-vous procéder ?
Le premier travail que nous avons effectué avec l’arrivée de ce nouveau comité technique a été la création d’une commission jeunes en collaboration avec la présidence de l’association. Cette commission est présidée par Georges Vieillesse, qui est lui-même éducateur et entraîneur. Il est épaulé par Éric Milazar, Giovanni Devaley, Nancy Cheekoussen, tous détenteur de niveau 1, et Khemraj Naiko, qui a déjà été très actif au centre national de formation. Ils sont tous expérimentés et capables d’agir. Leur premier responsabilité sera d’établir une présélection nationale en vue des 2es championnats d’Afrique cadets qui auront lieu en 2015 à Maurice. Ils travailleront de concert avec tous les entraîneurs qui auront des athlètes dans la présélection. Cibler le bas pour commencer, nous rendra sûr de pouvoir améliorer l’élite pour palier au gros problème du manque d’athlètes dans certaines épreuves. Ce schéma nous fera rester au contact des entraîneurs régionaux et les clubs. On aura ainsi moins de chance de perdre des athlètes.
Dans certaines spécialités, nous manquons d’effectif depuis 2010. Il faut trouver des jeunes pour combler cette lacune, par exemple aux 100 m haies, 400 m haies, perche, poids et en partie en demi-fond. Si les athlètes minimes pratiquent avec succès le quadrathlon, pourquoi ces mêmes athlètes ne sont-ils plus présents lorsqu’ils passent chez les cadets et les juniors ? Il existe donc une disparité dans certaines spécialités. Nous allons donc cibler des entraîneurs qui seront chargés de ces spécialités.
Quid des lancers et des sauts ?
Le triple saut tant masculin que féminin a besoin d’être redynamisé. Par contre, il n’existe pas de grosses difficultés dans les lancers.
Les perspectives de 2014 se déclinent en plusieurs volets dont les Jeux d’Afrique Jeunes (27-30 mai au Botswana), les Jeux du Commonwealth (27 juillet-2 août à Glasgow) et les Jeux Olympiques Jeunes (Nankin 20-26 août). Comment comptez-vous aborder ces échéances ?
Disons que pour Nankin les chances de qualification chez les jeunes sont pour moi très difficiles, à moins qu’un ou deux d’entre eux ne se surpassent pour décrocher une place dans l’équipe africaine par rapport au changement apporté par l’IAAF au mode de sélection. Par exemple, on constate qu’il y a certes plus de places disponibles en demi-fond, mais Maurice est assez faible dans cette spécialité contrairement au Kenya, à l’Éthiopie et aux pays d’Afrique du Nord. Idem en sprint et lancers où le Ghana, le Nigeria, l’Afrique du Sud et les pays du Maghreb sont les meilleurs. Par contre, nous aurions eu une chance aux 400 m haies, triple saut et même au saut à la perche si on avait des athlètes possédant le niveau nécessaire. Ces épreuves sont moins visibles dans certains pays d’Afrique à cause du manque d’infrastructures.
Pour Glasgow, le fait d’arriver en finale sera déjà un aboutissement. C’est pourquoi nous miserons sur les épreuves individuelles plutôt que sur les relais. Le passage des athlètes à Glasgow tant en masculin qu’en féminin risque d’être plus remarqué qu’à Nice. D’ailleurs dans le passé, certains athlètes ont déjà réalisé les minima des Jeux du Commonwealth. Une présélection y a même déjà été établie en novembre dernier bien que personne n’aura à ce jour réalisé les minima. Mais avec les sprinters évoluant en Jamaïque et d’autres qui sont sur place telles Fabrice Coiffic, Jonathan Bardotier, Élodie Pierre-Louis, Aurélie Alcindor, Stéphanie Guillaume, Amélie Anthony et Florianne Lisette, nous pourrons compter sur deux équipes de relais à Glasgow. Aux Commonwealth, les courses de relais atteignent le niveau mondial.
Au lancer du disque, Elvino Pierre-Louis est tout proche des minima. Mais il est rentré à Rodrigues. Espérons que Sylvain Pierre-Louis (poids) et lui bénéficieront de stages et compétitions à l’étranger pour peaufiner leur forme. Ils avaient effectué douze jours de stage à Maurice en décembre. J’ajoute aussi le nom de Bernadette Ravina (javelot) qui fait partie de la présélection.
Pour conclure, on dira que 2014 est le passage obligé vers 2015, synonyme des 9es Jeux des îles à La Réunion…
Certainement. À cet effet, une présélection de 65 athlètes a déjà été établie. Mais elle sera prochainement rendue officielle. Tous les médaillés des derniers Jeux à Mahé sont là, à l’exception de la sprinteuse Mary-Jane Vincent qui a fait part de son retrait de l’athlétisme.   

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