Le Best Loser System vit-il ses derniers jours ?

DIPLAL MAROAM

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Comme il fallait s’y attendre, en l’absence d’un mini-amendement constitutionnel et conformément au GN185/2019 émis par le président de la République sous la Representation of the People Act, les candidatures de Rezistans ek Alternativ ont tout simplement été invalidées par la Commission électorale. Mais il faut tout de même reconnaître que la Cour suprême s’est démenée ces derniers temps pour pouvoir écouter l’affaire logée par le parti de gauche, mais en vain ayant manifestement été pris de court par le laps de temps limité pour la tenue des législatives. Mais quoi qu’il en soit, nous n’en serions probablement jamais arrivés là si nos dirigeants avaient adopté une attitude plus responsable à l’égard des recommandations de la justice sur le Best Loser System (BLS), particulièrement celles du juge Seetulsingh en 2000. Or, deux décennies plus tard, nous nous trouvons toujours à la case départ. Qu’avait énoncé justement le juge Seetulsingh ? Dans un jugement éclairé et fort instructif au regard de l’affaire Carrimkhan, le juge avait fait ressortir que « A common way of Mauritian life has gradually and steadily developed in Mauritius and cuts across cultural barriers », ce qui fait que le critère se fondant sur le mode de vie des Mauriciens pour différencier les trois communautés mentionnées dans la première Cédule de la Constitution – hindou, musulman et sino-mauricien – ne tient plus la route aujourd’hui. Les candidats du parti Lalit aux législatives de septembre 2000 furent, par conséquent, classés dans le groupe “population générale”, considérée comme une quatrième communauté pour tous ceux qui ne se retrouvent pas dans les trois premières.

C’est effectivement s’appuyant, dans une grande mesure, sur ce jugement qu’en juin 2005, le juge Balancy avait délivré un verdict dans l’affaire Narain et autres en faveur de Rezistans ek Alternativ dont les 11 membres, se considérant d’abord et surtout Mauriciens, avaient refusé d’inscrire leurs communautés sur le bulletin de candidature en vue des législatives de juillet 2005. Ce jugement – qui avait été subséquemment renversé en appel en novembre de cette même année, ce pour ne pas chambouler le BLS – avait fait ressortir que la clause des National Assembly Elections Regulations de 1968, qui fait obligation à un aspirant candidat à un scrutin législatif de décliner sa communauté sous peine de voir sa candidature rejetée est contraire aux principes fondamentaux de la démocratie incarnés par la section 1 de la Constitution. Le juge Balancy avait également déploré que le souhait du juge Seetulsingh à l’effet que le manquement noté dans la Constitution autour du BLS soit remédié par le truchement d’une réforme électorale tant promise soit resté lettre morte.

En 2012, suite à la plainte de Rezistans ek Alternativ après le rejet de 104 candidats lors de l’enregistrement de mai 2010, l’UNHRC ne s’était toutefois pas prononcé contre le BLS comme tel, mais l’utilisation du recensement différentiel datant de 1972 pour élire les députés correctifs. Or, il est évident que si l’UNHRC était mis en présence de toutes les informations ayant trait aux réalités sociales du pays qui ont d’ailleurs motivé l’abandon du recensement communal à partir de 1982, tout ce remue-ménage concernant le BLS n’aurait probablement jamais surgi. D’ailleurs, pour la détermination des Best Losers, est pris en compte le pourcentage de chaque communauté – et non pas le nombre –, chiffre qui demeure presque le même que ce soit en 1972 ou 2019. Ainsi, le malin plaisir qu’éprouvent certains à démontrer que la communauté majoritaire ne l’est plus aujourd’hui relèverait simplement de la mauvaise foi car changement de religion n’impliquant pas forcément changement de communauté.

Finalement, le cas, entre autres, concernant les candidats de Lalit de briguer les suffrages sous la communauté “population générale” en septembre 2000 et par tirage au sort en octobre 2019 de même que le repêchage de Michael Sik Yuen en mai 2010 indiquent que le BLS n’est ni fiable ni adéquat car ne résolvant en aucun cas la sous-représentation communale. La réforme du système électoral figurera, très certainement, dans tous les manifestes électoraux comme les années précédentes. Ainsi, les questions que l’on se pose : serait-ce encore une déclaration d’intention ? Entre-temps, la longue lutte de Rezistans ek Alternativ portera-t-elle enfin ses fruits plus de 50 ans après l’indépendance ?                                                                                                                                  

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