Le poison de la haine

L’Assemblée nationale a toujours été utilisée par les parlementaires des deux côtés de la Chambre pour essayer de marquer des points politiques lorsque l’occasion se présente. En général, les Speakers arrivaient tant bien que mal à recentrer les débats et à éviter les dérapages trop flagrants en rappelant à l’ordre les uns et les autres.
Mais la réponse du Premier ministre, Pravind Jugnauth, à la question parlementaire d’un backbencher de la majorité concernant le contenu des coffres saisis par la police dans la résidence de l’ancien Premier ministre, Navin Ramgoolam, en 2015, a provoqué un dégout profond chez la majorité de ceux qui l’ont entendu, que ce soit à la télévision ou dans l’hémicycle. Beaucoup de parlementaires, y compris certains de la majorité, n’ont pas caché qu’ils se sont sentis mal à l’aise en entendant l’énumération, dans les moindres détails, des médicaments et des produits dopants découverts par la police.
Selon le Premier ministre, ils étaient utilisés par le leader du Parti travailliste pour doper sa virilité et sa sexualité. Jamais dans le passé n’a-t-on vu un parlementaire, fut-il Premier ministre, descendre à ce niveau pour dénigrer un adversaire politique, un être humain comme lui, au point de réduire l’Assemblée nationale à un vulgaire caisson de camion utilisé lors des meetings politiques. La haine qui caractérisait cette réponse parlementaire a empoisonné les débats parlementaires.
Les débats argumentés sont-ils remplacés par les coups sous la ceinture en l’absence des victimes concernées ? Comme l’excès nuit en tout, il n’est pas étonnant que la déclaration du Premier ministre n’ait pas eu l’effet escompté. Pourtant, il avait la possibilité d’acculer son principal adversaire politique, comme il l’a lui-même reconnu, en insistant sur la provenance des Rs 230 M retrouvées dans les coffres concernés. Une question qui n’a toujours pas été éclaircie, même en cour, et qui mérite une réponse claire et précise.
Le pire, dans cette affaire, est l’utilisation des backbenchers pour lancer des questions dirigées. Est-ce pour cela que les jeunes parlementaires inexpérimentés ont été élus au Parlement ? Une telle attitude peut-elle encourager les jeunes professionnels à faire leur entrée dans l’arène politique et faire leur entrée au Parlement ? En tout cas, l’attaque du Premier ministre démontre que le gouvernement est prêt à tout pour discréditer ses adversaires.
Heureusement, tout n’est pas perdu. Les débats parlementaires sur l’introduction d’un amendement à l’Education Act visant à instituer un board pour préparer et corriger les papiers d’examens du Kreol Morisien ont donné lieu à des échanges intéressants. Plusieurs intervenants ont reconnu que, au-delà de certains problèmes d’ordre administratif et technique, ce texte de loi contribue à donner au Kreol Morisien ses lettres de noblesse. Son enseignement, tant au niveau primaire que secondaire, facilitera la tâche des enseignants à apprendre à la majorité des Mauriciens à lire, à écrire et à compter.
Il est reconnu aujourd’hui que le Kreol Morisien appartient à toute la population dans sa multiculturalité et dépasse la question identitaire et communautaire. Notre langue fait partie de la culture mauricienne. Sans compter que le Kreol Morisien peut être utilisé pour étudier différentes matières et différentes langues. Comme c’est le cas aux Seychelles, où le créole peut être utilisé pour apprendre l’anglais ou le français. À Maurice, on peut aller plus loin avec son utilisation pour apprendre les langues ancestrales et les langues étrangères en général.
La semaine se termine avec la nomination par le pape François de Jean Michaël Durhône (52 ans) comme évêque de Port-Louis. Si dans le public en général, cette nomination est accueillie avec surprise, par contre, dans le clergé catholique, ce choix du pape est accueilli comme un don divin et signe de l’amour de Dieu. Dans sa première déclaration, le principal concerné insiste sur le fait qu’il sera l’évêque de tous les Mauriciens dans sa multiculturalité, et pas uniquement celui des créoles. Nous lui souhaitons bonne chance dans sa nouvelle mission.

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