L’été meurtrier

Face au calvaire des (trop) nombreuses familles mauriciennes endeuillées par le Covid-19, nul ne peut rester insensible. L’hécatombe recensée ces dernières semaines, emportant sur son passage jeunes, adultes et personnes âgées, ne doit-elle pas être directement imputée au manque de vision et à une gestion d’amateurs, au petit bonheur même, de la pandémie par nos dirigeants politiques ? Bien qu’ils s’en défendent – et d’ailleurs pourquoi rêver qu’ils assument humblement leurs erreurs et présentent des excuses ? – force est de constater que tant beaucoup de Mauriciens que nos dirigeants politiques ont sciemment ignoré les signes avant-coureurs qui laissaient entrevoir la déferlante mortelle du Covid-19, et surtout de son terrible variant Delta, chez nous.

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Pourtant, « pa dir pann dir ». Plusieurs observateurs, dont l’ancien directeur des services de la Santé, le Dr Vasantrao Gujadhur, n’avait de cesse de tirer la sonnette d’alarme via tous les médias possibles, et ce, dès août, soit un mois à peine après la reprise des activités économiques et la réouverture, même sous conditions, de notre espace aérien. Notant une hausse du nombre de cas de contaminations dans la communauté, le Dr Gujadhur martelait à chaque occasion qu’il fallait : « Pran kont ! » Nul ne peut taxer l’ancien patron de la Santé de démagogie ou de politique partisane. À chaque fois que la parole lui a été offerte, en professionnel digne, ce médecin a souhaité une prise de conscience politique et populaire. Ces deux axes vont de pair : on l’a compris lors de la première vague, en 2020. N’est-ce pas d’ailleurs cette équation qui nous avait permis de reprendre nos activités en toute sérénité l’an dernier, après le confinement ?

Cette année, les choses ne sont pas allées dans la bonne direction. Déjà, à la levée du confinement, des cas étaient encore et toujours enregistrés au sein de la communauté. Ce qui n’est pas du tout bon signe, car cela traduit le fait, donc, que ce fichu virus circulait encore librement ! À cela, tant le Premier ministre que celui ayant la responsabilité de la Santé ont longtemps préféré seriner que « tou korek » ! Trop confiants et mettant la charrue avant les bœufs, d’autres élus ont même pris le parti de gloser dans les médias internationaux, probablement davantage pour faire montre de leur superbe maîtrise de la langue de Shakespeare qu’autre chose, que Maurice était « relatively Covid-Safe ». Résultat des courses de cette gestion lamentable : une recrudescence des cas. Pire, une vague de morts sans précédent.

Cet été 2021 sera hélas mémorable, parce que jamais dans notre vécu de Mauriciens nous n’aurons enterré autant des nôtres. Certaines familles ont été cruellement frappées avec la disparition de plusieurs membres à la fois. D’autres pleurent d’incompréhension face à une situation qui échappe à toute logique. Le mal qu’on souhaitait à tout prix empêcher est malheureusement fait.

Nous sommes, depuis l’an dernier, dans un état d’urgence. Nous sommes en guerre, comme l’ont qualifié plusieurs politiques de l’opposition. Valeur du jour, toute l’île Maurice est en zone rouge, pour reprendre le paradigme si cher à nos élus du jour. Mais plutôt que d’être antipatriotiques et de baisser les bras, optons, tant qu’il y en a la possibilité, pour une sortie de crise. Comme la proposition de plusieurs Mauriciens de conversion du complexe sportif cinq étoiles de la circonscription No 8 en Côte d’Or Covid-19 Centre (CCC), ainsi que l’a baptisé le Dr Satish Boolell. Une idée qui fait déjà son petit bonhomme de chemin et que, nous l’espérons sérieusement, sera bientôt concrétisée. Car les ressources sont là. La main-d’œuvre également. Il ne manque que la volonté politique.

Alors, MM. Jugnauth, Jagutpal, Obeegadoo et consorts, mettez votre ego de côté ainsi que vos querelles partisanes. Que prime l’urgence de sauver nos vies ! Nous n’avons pas beaucoup de temps. Et nous avons perdu trop d’amis, de proches, de connaissances, de frères et de sœurs. Que leur mort ne soit pas vaine. Et que dans un sursaut de survie, avant toute chose, nos politiques prouvent qu’ils sont avant tout humains et sensibles aux souffrances du peuple.

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