L’exemple costaricain

Occupant une superficie de 51 000 km2 pour une population de 5 millions d’habitants, soit à peine quatre fois plus que la nôtre, le Costa Rica est probablement l’un des plus brillants exemples de la planète en matière de protection de l’environnement et de promotion des énergies renouvelables. Pour preuve, ce pays ambitionne, sous l’impulsion de son président, Carlos Alvarado, de mettre en place un plan national visant à se décarboner d’ici 2050. Certes, le Costa Rica n’est pas le seul pays à afficher de pareils objectifs. Reste qu’à la différence de la majeure partie des autres, il peut se targuer d’avoir depuis longtemps déjà compris l’importance de cet éco-engagement, qu’il aura notamment traduit en mettant en place de véritables structures légales et en ayant pris des dispositions sans précédent pour la protection de ses larges étendues de forêts et de leur biodiversité. Sans compter les efforts quotidiens du peuple costaricain, très sensible à cette cause.
En outre, si atteindre l’objectif de 0% d’émission carbone apparaît comme cornélien pour la plupart de nos sociétés industrialisées, au Costa Rica, l’effort devant être consenti est bien moindre. Il faut dire qu’en comparaison, l’empreinte carbone de ce pays est on ne peut plus minuscule. Ce petit pays d’Amérique centrale n’est en effet qu’à un petit 1,5% de l’autosuffisance en termes d’électricité renouvelable, faisant de lui un exemple cité de par le monde. En peu de temps, le Costa Rica sera en effet devenu un véritable modèle à suivre. Entre l’éolien, le solaire, l’hydraulique et la biomasse, toutes les sources d’énergie renouvelable y sont utilisées pour, au final, produire un mix énergétique 100% renouvelable.

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Alors que le réchauffement climatique ne fait plus l’ombre d’un doute et que les menaces se précisent, ce pays aura donc obtenu, par la seule force de ses ambitions, d’incroyables résultats. D’où deux questions : comment ce pays, minuscule par sa taille et sa population, y sera-t-il parvenu, alors que d’autres nations, bien plus développées, n’y arrivent pas ? Et pourquoi ne suivons-nous pas l’exemple costaricain, fort de nos connaissances sur les désastres à venir, de notre degré d’exposition et des accords signés en direction de la lutte contre le dérèglement climatique ?

Concernant la première question, il faut d’abord savoir que ce pays bénéficie d’une configuration géographique et géologique idéale, le Costa Rica disposant notamment de deux volcans ainsi que d’un lac de près de deux milliards et demi de mètres cubes. Encore fallait-il évidemment mettre à profit ces providentielles prédispositions naturelles. Et c’est ce que les autorités costaricaines ont fait, entre autres en érigeant dix barrages sur son territoire. Avec des éoliennes et des centrales hydroélectriques tournant à plein régime, l’exploitation de l’énergie géothermique et l’utilisation accrue de panneaux solaires par la population, ce pays s’est donc donné les moyens d’atteindre non seulement une totale autonomie énergétique, mais aussi de se dégager du charbon et du pétrole. Sans compter le marché automobile, dont les véhicules électriques (et donc rechargeables au Costa Rica à partir de sources d’énergie renouvelable) sont en plein essor.

Et chez nous, direz-vous ? Et bien chez nous, et ce n’est hélas un secret pour personne, les engagements pour la promotion des énergies vertes et la protection de l’environnement se comptent sur les doigts de la main. Bien sûr, le gouvernement clamera haut et fort que des mesures ont été prises, à l’instar de facilités consenties pour l’achat de panneaux photovoltaïques ou encore la mise en opération de fermes solaires et éoliennes. Pour autant, nous sommes encore très (très) loin de nous débarrasser de notre dépendance aux énergies fossiles, et ce alors que nous disposons d’avantages naturels indéniables. Ce manque de vision se constate à tout instant et risque, hélas, d’être tout aussi absent lorsque reviendra aux principaux partis la responsabilité de présenter leurs objectifs verts quand sonnera le départ de la course aux législatives. À l’inverse là encore du Costa Rica où, en période électorale, la protection de l’environnement s’affiche traditionnellement comme l’une des principales priorités politiques, au même titre que l’éducation et la santé, et non pas, comme c’est le cas chez nous, en quelques insignifiantes mesures inscrites à la fin des manifestes.

C’est qu’à Maurice, ces priorités, justement, sont tout autres, le mot d’ordre restant inéluctablement attaché à la croissance, cherchant tant que possible à se rapprocher du modèle singapourien. Sans se demander ce que feront nos industries lorsque le pétrole viendra à manquer ou que son coût deviendra insoutenable, ce que feront nos hôtels et nos touristes lorsque le niveau de la mer aura gagné leurs portes, ou encore ce que feront les Mauriciens lorsque leur île ne connaîtra plus qu’une unique saison. Maurice, c’est un fait, continue de miser sur le mauvais cheval. Autant dire que ce n’est pas demain que le pays deviendra le Costa Rica de l’océan Indien.

Michel Jourdan

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