MUSIQUE: Tritonik, osmose de la musique et des coeurs

La soirée de lancement de Project One, le premier album de Tritonik, au Sapin samedi dernier a été un succès d’affluence tout autant que d’osmose entre des artistes et leur public. Si l’Art a vaincu, ceux qui ont fait le déplacement à Camp-Levieux ce soir là étaient peut-être conquis d’avance, mais ils n’ont pas été déçus, trouvant là une valeur sûre du séga-blues mauricien, un cri et un espoir fermes comme une prière.
Si les arts sont le plus souvent laïcs de nos jours, il arrive qu’un artiste soit adulé comme un Dieu, qu’un concert soit en quelque sorte délivré comme une messe ou une prière adressée à l’humanité. Avec son jeu de guitare vivace et sa voix de bluesman ségatier, avec sa présence et son naturel, Éric Triton peut se permettre de chanter les mêmes chansons, parce qu’elles accrochent et restent dans la tête, parce que son public ne s’en rassasie pas, les connaît par coeur et les reprend avec lui et ses musiciens sans bouder son plaisir. Les messages délivrés ici, dénoncent et font espérer en un pays plus uni et plus ouvert.
Tout naturellement qu’il chante, l’artiste a invité l’auditoire à aller marcher aujourd’hui à partir de 13 h de Bell-Village vers Port-Louis pour que le pays évolue, et certains leaders du mouvement contre le Best loser system étaient là pour apprécier ce geste de solidarité.
Dans une salle plus que comble, les ingénieurs du son et cameramen étaient aux commandes pour tourner un DVD, et tout ce beau monde a répondu présent dès le premier titre, également en tête de l’album, Madame Sere, qui ouvre le concert, histoire de se dire qu’on est bien chez nous. Le rythme accroche et la référence aux langages codés de l’enfance répand un baume. Oscillant entre l’intensité de Ça va ça va pas, les rêveries de Vinn gete et la puissance militante de Zenn, souvent, dans d’autres textes l’ironie nous sauve d’une tristesse qui serait sinon trop larmoyante.
Jouées par Shakti Shane Ramchurn, les subtilités du tabla vont bien à cette voix et cette guitare qu’il complète et ponctue. Norbert Planel et Chouck y ajoutent de magiques sons métalliques. Leurs voix en choeurs font le reste. Le tout fonctionne avec naturel, sans fioriture et dans la fidélité à l’art. L’Unité a été le clou de la soirée, lorsque chacun a pris la main de son voisin et que ces doigts croisés se sont tendus vers la scène. Pas de prêtre, pas d’église ici, seulement des coeurs libres, et un ferme espoir qui résonne dans les mots.

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