MV WAKASHIO | Cour de district de Port-Louis – Le VDR n’a enregistré aucun appel de la NCG le 25 juillet

  • Le capitaine du MV Wakashio:  « Je ne suis pas un criminel car c’était un accident »
  • Le magistrat Neeshal Jugnauth se prononcera le 20 sur la motion de remise en liberté provisoire de Sunil Kumar Nandeshwar

La polémique autour des circonstances du naufrage du MV Wakashio au large de Pointe d’Esny dans la soirée du samedi 25 juillet dernier est relancée. Le Voyage Data Recorder à bord du vraquier battant pavillon panaméen ne comprend aucun appel de la National Coast Guard alors que les autorités mauriciennes maintiennent que la NCG avait tenté d’entrer en contact avec le capitaine du bateau et qu’il n’y a pas eu de réponse. C’est ce qui a été révélé en Cour de Port-Louis, hier, lors des débats sur la demande de remise en liberté provisoire du capitaine du MV Wakashio, Sunil Kumar Nandeshwar. La police objecte à cette démarche en raison des risques qu’il ne quitte le territoire mauricien ou encore qu’il n’interfère avec les témoignages des autres membres de l’équipage toujours sous surveillance à Maurice. Le capitaine soutient qu’il n’a aucune intention de quitter le pays avant que son procès soit entendu en vue de « laver mon honneur » et prouver que « c’était un accident et que je ne suis pas un criminel ».

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Le capitaine du MV Wakashio fait face à une accusation provisoire pour « unlawful interference with the operation of a property of a ship likely to endanger its safe navigation », sous les articles  5(1) (b), (2) et 9 de la Piracy and Maritime Violence Act 2011, après le naufrage du MV Wakashio sur la côte Sud-Est du pays, causant une marée noire. Dans son rapport des faits, l’inspecteur Ramdhony, de la Central Criminal Investigation Department (CCID) a expliqué que le 25 juillet 2020, le vraquier MV Wakashio avait quitté le port de Singapour pour se rendre au Brésil avec 20 personnes à bord, incluant le capitaine et son Chief Officer, Hitihamillage Subodha Janendra Tilakaratna. Par la suite, le drame s’est produit lorsque le vraquier s’est échoué. L’inspecteur Ramdhony avance, selon les preuves recueillies, que c’était le Chief Officer qui était aux commandes du vraquier avant l’échouement, sous le commandement du capitaine.

Des données, à savoir les « electronic charts » ou encore la boîte noire du vraquier, avaient été sécurisées pour les besoins de l’enquête. Selon cette dernière, il fut établi qu’avant le voyage, un plan de route à suivre avait été dressé par le Second Officer et approuvé par le capitaine et les autres membres. Il fut alors trouvé que le vraquier n’avait pas respecté ce plan de route en naviguant à 5 milles nautiques près des côtes de Maurice au lieu de 30 milles nautiques. L’inspecteur de soutenir que le vraquier se rapprochait de plus en plus des côtes du pays, sous les instructions du capitaine, afin de pouvoir capter le signal réseau car les membres de l’équipage fêtaient un anniversaire à bord du vraquier. L’inspecteur avance aussi que le capitaine n’était pas aux commandes et avait consommé de l’alcool « contrairement aux règlements ». Se basant sur les données du Voyage Data Recorder (VDR) du navire, l’inspecteur soutient que l’on pouvait entendre le capitaine indiquer à son Chief Officer, qui était aux commandes : « Just keep going till nobody calls us », faisant  référence à la National Coast Guard. Interrogé sur le fait que la National Coast Guard avait tenté de prendre contact avec l’équipage du navire, l’inspecteur a répondu par l’affirmative mais que la NCG n’avait pas obtenu de réponse. L’inspecteur devait ajouter qu’après avoir écouté le VDR, il pouvait confirmer qu’il n’y avait pas eu d’appel de la NCG avant et après l’échouement du navire.

D’autre part, l’inspecteur Ramdhony a avancé que le capitaine avait admis avoir donné des instructions pour modifier le plan de route du vraquier. Il soutient que l’enquête est en cours pour situer les responsabilités dans ce naufrage, avec une enquête approfondie sur la base du rapport des experts relevant des « données techniques » recueillies.

Interrogé par l’avocat du capitaine, Me Ilshad Mansoor, l’inspecteur Ramdhony a confirmé que c’était le Chief Officer, également arrêté dans cette affaire, qui dirigeait le navire sous les instructions du capitaine. Interrogé sur le fait qu’il incombait au Chief Officer de s’assurer de la bonne navigation lorsqu’il a pris les commandes, l’inspecteur a soutenu que l’enquête devra situer les responsabilités. Il a par ailleurs insisté sur le point que le capitaine a donné des explications cohérentes à la police dans sa version des faits et qu’à aucun moment il a tenté de fuir la justice. Il avancera par ailleurs qu’il serait quasi impossible d’interférer avec les membres de l’équipage, ces derniers étant sous étroite surveillance policière.

« I will not escape »

S’adressant à la Cour, le capitaine Nandeshwar a soutenu qu’il se pliera aux strictes conditions de remise en liberté provisoire qui lui seraient imposées car « je ne souhaite pas mettre à risque ma bonne réputation ». Il a soutenu qu’il a été Master-Captain pendant plus de 25 ans et qu’il jouit d’une bonne réputation auprès de ses pairs. Le capitaine estime que tout le monde sait qu’il est le capitaine du vraquier qui s’est échoué à Maurice et qu’il souhaite ainsi tout entreprendre pour prouver « que c’était un accident et que je ne suis pas un criminel ». Et d’ajouter « que je n’ai rien à gagner en interférant avec les membres de l’équipage », soulignant : « Je n’ai pas de proches ni d’amis à Maurice et je ne pense pas qu’un Mauricien souhaiterait m’aider à m’évader après ce qui s’est passé », dans sa tentative de répondre aux appréhensions de la police quant à l’éventualité qu’il fuie le pays.

Par ailleurs, le président de la Mauritius Sailors Home Society, Afzal Delbar, appelé à la barre des témoins, a soutenu que l’organisation sera prête à accueillir et fournir les services nécessaires au capitaine s’il est relâché sous caution. Cette organisation, régie sous la Maritime Labour Convention, fournit des facilités à des marins en transit ou en difficultés selon la convention. Le président Delbar indique ainsi que le capitaine sera pris en charge et l’organisation veillera qu’il soit disponible à tout moment pour les autorités gouvernementales ou la police aux fins d’enquête, s’il obtient la liberté conditionnelle.

Le magistrat Neeshal Jugnauth se prononcera sur cette demande de remise en liberté le 20 octobre.

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