Notation internationale : Coup escompté de Moody’s avec un nouveau Downgrade

La raison : un affaiblissement de la qualité et de l’efficacité des institutions et de l’élaboration des politiques

Moody’s Investors Service a abaissé (Downgraded), hier, la note à long terme des émetteurs en devises étrangères et locales du gouvernement mauricien de Baa2 à Baa3. Cette dernière notation, qui est la plus basse à l’échelle de Moody’s permet quand même à Maurice de maintenir son Investment Grade en Afrique.

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En même temps, cette agence de notation a changé la perspective de négative à stable. Dans la conjoncture, même si la Mauritius Bankers’ Association se félicite du maintien de l’Investment Grade, le secteur bancaire est sur le qui-vive quant à la prochaine notation des banques commerciales.

Justifiant ce Downgrade qui était craint dans certains milieux depuis le début de l’année, Moody’s explique que la rétrogradation à Baa3 est motivée par « l’évaluation selon laquelle la qualité et l’efficacité des institutions et de l’élaboration des politiques se sont affaiblies ». L’agence de notation ajoute que cet affaiblissement entrave à son tour la résilience économique et la capacité à absorber les chocs économiques futurs.

«  Bien que le cadre institutionnel demeure solide et que l’élaboration des politiques ait historiquement soutenu une croissance économique élevée et stable, l’inversion de la détérioration de la solidité économique et budgétaire résultant de la pandémie est compliquée par le recours à des mesures non conventionnelles et ponctuelles, ce qui crée une certaine incertitude quant à la performance budgétaire future et, en fin de compte, pèse sur l’évaluation de Moody’s des institutions et de la solidité de la gouvernance », note l’analyse officielle de Moody’s.

L’agence soutient que les perspectives stables reflètent les attentes selon lesquelles le profil de crédit de Maurice restera aligné sur celui des États souverains notés Baa3 et, en particulier, intègrent le point de vue de Moody’s selon lequel les indicateurs budgétaires et de la dette s’amélioreront encore. Le fardeau de la dette devra tomber en dessous de 70% du PIB d’ici la fin de l’exercice au 30 juin 2023, malgré les risques d’assainissement budgétaire découlant du choc inflationniste mondial.

Moody’s concède que « les importantes réserves internationales de Maurice limitent le risque de vulnérabilité extérieure malgré d’importants déficits courants et constituent un amortisseur contre la hausse des prix à l’importation. La notation Baa3 est également soutenue par un faible risque social et politique. »

Moody’s constate que le gouvernement a formulé des objectifs à moyen terme visant à réduire la dette publique à 60 % du PIB, à augmenter les réserves internationales entre 22 et 24 mois de couverture des importations et à maintenir des taux de croissance de 5 %. « Le recours à des mesures ponctuelles et à l’utilisation de politiques non-conventionnelles au cours des deux dernières années augmente le risque que les réparations budgétaires et économiques à la suite du choc pandémique soient plus lentes que prévu », avance l’agence de notation.

Toutefois, Moody’s prend à contre-pied le gouvernement au sujet de la dette en affirmant qu’alors que  « la croissance revenant à sa tendance d’avant la pandémie, Moody’s s’attend que la dette publique se stabilise plutôt que de continuer à diminuer comme le prévoit le gouvernement. »

Cette agence de notation internationale rejoint l’analyse du Fonds monétaire international sur les dernières Article IV Consulations, notamment en ce qui concerne la gestion de la Banque de Maurice. « Meanwhile, the Bank of Mauritius’s balance sheet has weakened as a result of pandemic-related support measures, such as the creation of Mauritius Investment Corp (MIC) and the large one-off grant from the Central Bank to the government (Rs 55 billion, or 12% of 2020 nominal GDP), reducing monetary policy predictability and effectiveness. The creation of MIC, a special purpose vehicle that is fully owned by the Bank of Mauritius, supported financial stability when it was initially created at the start of the pandemic. However, MIC’s evolving role in the economy, which includes supporting economic development and developing a savings base for the country, exposes the central bank’s balance sheet to increased credit risk », indique encore le Downgrade Communiqué.

Bien que Moody’s s’attende à ce que la reprise économique soutienne en fin de compte la stabilisation de la dette, le gouvernement aura probablement besoin de mesures supplémentaires – soit du côté fiscal, soit par le biais d’une baisse des dépenses, non encore précisées – pour compenser une augmentation des dépenses de retraite (pension) à compter de l’exercice 2024.

Moody’s rappelle que le rythme de l’assainissement budgétaire demeure lié à la reprise économique, principalement en raison du retour de l’activité touristique aux niveaux d’avant la pandémie. « Depuis l’assouplissement des restrictions de voyage en octobre 2021, Maurice a connu une reprise similaire à celle d’autres souverains dépendants du tourisme. Les arrivées de touristes ont dépassé 70% des niveaux d’avant la pandémie au cours des derniers mois et Maurice a bénéficié de tendances favorables pour la durée moyenne du séjour et les dépenses quotidiennes moyennes des touristes », avance le rapport, qui émet une Note of Caution en ce qui concerne la situation sur les principaux marchés.

« Alors que la demande de voyages reste forte, avec une demande refoulée toujours forte, la hausse des prix et l’affaiblissement de la croissance, en particulier sur les principaux marchés sources tels que la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne, posent des risques à la baisse pour l’activité touristique, en particulier à partir de l’année prochaine », prévient Moody’s vu le poids de 60% des arrivées que représentent la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Afrique du Sud et l’île de La Réunion .

D’un autre point de vue, Maurice est confrontée à des risques à la baisse en raison de la hausse des prix des produits de base et de l’inflation, qui pèsent sur les niveaux de revenu réel et le pouvoir d’achat. Les importations de produits alimentaires et liés aux carburants représentent 36% des importations totales, soit 14% du PIB en 2021.

L’érosion du pouvoir d’achat due à une inflation plus élevée est susceptible de peser sur la consommation des ménages, tout en posant des défis au programme d’assainissement budgétaire du gouvernement, comme en témoigne l’augmentation des prestations sociales prévues dans le budget pour l’exercice 2023.

Autant de facteurs à risques entrant dans le Downgrade Matrix de Moody’s.

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