Plus de 100 jours que les bulldozers sont passés…

Françoise Lamusse
Membre de Drwa a enn Lakaz : Platform Sitwayen

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100 jours le dimanche 6 septembre que les bicoques des familles de Pointe aux Sables, Riambel et Malherbes ont été menacées et bulldozées, 100 jours que des enfants vivent dans des conditions inhumaines et que leurs parents n’ont pour tout logement qu’un morceau de tissu appelé tente.
● Drwa a enn lakaz : Platform Sitwayen est toujours sur le terrain, présente à travers les journaux afin qu’en solidarité avec ceux qui n’ont pas et ne trouvent pas de logements, nous continuions nos appels au Gouvernement afin qu’il aide à trouver une solution RAPIDE.

Nous pouvons entendre parfois dans le public des critiques par rapport à ces familles, comme si elles mendiaient un passe-droit et non le droit à une vie décente. Choquant d’entendre des réflexions de ce genre ! La plupart de ces familles suivies par Drwa a enn Lakaz ont déjà établi des dossiers de demandes de logement depuis plusieurs années, sont enregistrées sur le Social Register of Mauritius, à la NEF, travaillent et essaient au mieux de continuer à vivre avec dignité. Malgré de très faibles revenus les rendant souvent « inéligibles ». Et c’est en allant les rencontrer sur le terrain actuel de leur vie que l’on peut s’en rendre compte…

Des membres de la plateforme étaient aussi présents aux Assises du logement. De nombreuses propositions ont été émises, certaines très intéressantes, pour la plupart des solutions déjà identifiées depuis des lustres et qui pourraient enfin faire partie d’une politique de logement solide et adaptée aux réalités sociales de notre pays.

Mais en attendant ce futur prometteur, la problématique des familles actuellement sans logement – et pas uniquement celles de Pointe aux Sables, Riambel ou Malherbes – est toujours là, présente, comme un mal qui gangrène notre pays.

Depuis le mois de mars, nous parlons de la pandémie de la Covid-19 et le gouvernement a su prendre des mesures d’urgence à travers de nouvelles lois qui ont été votées très rapidement. Ne dit-on pas à situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles ?
Aujourd’hui, nous avons à faire face à la pandémie du manque de logements et des mesures exceptionnelles doivent être prises de la même façon par le gouvernement. Car il s’agit là de l’avenir d’êtres humains, d’enfants, de citoyennes et de citoyens mauriciens qui ont les mêmes droits à une vie décente que tous les citoyens de ce pays. Au nom de l’article 25 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. “Droit à un niveau de vie suffisant. 1. Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, (…)”. De la Convention relative aux droits de l’enfant qui mentionne ce droit dans l’ Article 27(3)” Les Etats parties adoptent les mesures appropriées, compte tenu des conditions nationales et dans la mesure de leurs moyens, pour aider les parents et autres personnes ayant la charge de l’enfant à mettre en oeuvre ce droit et offrent, en cas de besoin, une assistance matérielle et des programmes d’appui, notamment en ce qui concerne l’alimentation, le vêtement et le logement(…)”. De l’Article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels: “1. Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants.” Et des Sustainable Development Goals adoptés par le République de Maurice et 193 membres des Nations Unies en 2015 : Transforming our world – ending poverty (…) ensuring all people enjoy peace and prosperity.”

La Plateforme a ajouté à son action de proximité sur le terrain et son plaidoyer, une approche technique afin de proposer au ministre du Logement, M. Steven Obeegadoo, différentes possibilités de constructions, rapides, écologiques et à coûts raisonnables.
Nous tenons à informer nos concitoyens des éléments suivants :
Des membres de notre plateforme, engagés depuis longtemps dans cette lutte, avaient déjà compilé de multiples propositions qui existent sur notre sol mauricien et que nous avions envoyées puis remises en main propre au ministre Obeegadoo lors de nos entrevues au mois de juin et lors de courriers qui lui ont été envoyés par la suite :
« Le Ministère du Logement pourra trouver les terrains et entreprendre la construction rapide de logements peu chers. Comme logements intermédiaires, pour ceux en attente de maisons mais actuellement sans logement. Voire comme logements définitifs, vu le très intéressant rapport Qualité-Prix-Durée de construction. [Annoncé dans le Budget: 20,000 acres of abandoned land].
Des compagnies privées ont des solutions qui répondent aux critères de rapidité, de sécurité et de bas coût. »

Quelques exemples avaient été cités et des dossiers de présentation remis en main propre au ministre comme exemples de ce qui existe aujourd’hui, la liste n’étant pas exhaustive :

Maisons permanentes :
❖Prestataire 1 : Construction en 15 jours @ Rs 750k – Blocs préfabriqués.
❖Prestataire 2 : Le coût est 20% moins cher que la construction traditionnelle (Rs 800 pied carré). On peut construire rapidement – 10-12 maisonnettes en deux semaines.
Maisons relais :
❖Prestataire 3 : Ex of 20 Ft reconditioned container – 2/3 bedrooms + verandah @ Rs 650k – Rs 750k

Donc il possible de construire vite et pas plus cher… Et surtout à moins cher que les actuelles maisons NHDC à Rs 1,8 M.
Nous proposons donc pour le problème actuel et à venir des familles sans logement en urgence :
-que le Gouvernement crée une section spéciale au sein du ministère du Logement. Pour s’occuper essentiellement du problème de l’accès au logement en urgence des familles sans logements, incluant les familles qui habitent dans des maisons en amiante appelées à être détruites. Cette section pourrait mettre en place un programme de constructions rapides, s’occuperait du suivi de ce programme avec demande de facilitation au niveau des lois à amender et de certaines procédures lourdes et inadaptées.

Ces constructions pourraient comprendre des maisons-relais, en attendant l’accès à des maisons permanentes, des ONG pouvant aider à l’accompagnement des familles.
Pour mettre en place ce programme de constructions rapides, que des terrains soient identifiés, terrains privés ou publics, et cela par région : par exemple dans les 20,000 acres des terrains abandonnés annoncés dans le dernier Budget comme devant être converties en terres agricoles… ou encore les terres agricoles déclassifiées que le gouvernement pourrait réquisitionner.

Le secteur privé, des ONG, ainsi que de nombreux Mauriciens nous témoignent de leur envie de collaborer avec les autorités de façon concrète et pérenne pour une vraie politique nationale du logement qui ne laisse pas à la rue les plus pauvres. Nous comptons donc sur la réaction du ministre du Logement et du Premier ministre, en tant que Chairman de la Task Force sur le logement, pour démontrer une volonté politique réelle. Qui ne se résume pas à des effets d’annonce mais des actions concrètes ! 100 jours dimanche que les bulldozers sont passés…

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