PMQT : Deal Papa/Piti « No need for legal advice »

Animant la première séance du Prime Minister’s Question Time de sa carrière politique, le Premier ministre par intérim Ivan Collendavelloo a tout simplement soutenu que « there was no need to seek legal advice ». C’était en réponse à une interpellation parlementaire du chef de file du Parti travailliste, Shakeel Mohamed, au sujet du « deal Papa/Piti », qui a résulté en une passation de pouvoirs au poste de Premier ministre le 23 janvier dernier. Les deux principaux concernés, l’actuel Premier ministre, Pravind Jugnauth, participant au sommet de l’Union africaine à Addis-Abeba, et le précédent chef du gouvernement, sir Anerood Jugnauth, ne se trouvaient dans l’hémicycle à ce moment précis. À la mi-journée, Le Mauricien a appris de sources bien informées que le Mentor Minister et ministre de la Défense et de Rodrigues a été admis à la clinique Fortis Darné pour des problèmes respiratoires en raison de la période hivernale. Il semblerait que la Speaker de l’Assemblée nationale, Maya Hanoomanjee, n’était pas informée de ce détail en début de séance. En procédant à la réallocation des PQ, elle n’a pas pu cacher son étonnement devant l’absence de sir Anerood Jugnauth dans le “Front Bench” de l’hémicycle. « But the Mentor Minister is not there », a-t-elle déclaré alors qu’elle allouait une PQ à sir Anerood Jugnauth.
Auparavant, le leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, et le ministre de l’Agro-industrie, Mahen Seeruttun, ont croisé le fer sur le projet de création d’un Central Wholesale Market à Belle-Rive pour la vente à l’encan de fruits et légumes. Le leader de l’opposition a fait état des craintes découlant de ce point central de vente à l’encan, parmi lesquelles des conséquences sur les prix de vente vu les coûts additionnels de transport pour les planteurs et les « bazardeurs ». Il s’est déclaré partisan de la mise en activité de trois ou quatre points de vente à l’encan régionaux au lieu de « cet éléphant blanc » à Belle-Rive.
Le ministre de l’Agro-industrie s’est appuyé sur le fait que ce projet a été élaboré par les précédents gouvernements, notamment à partir de 2008/09, et a ajouté que l’actuel leader de l’opposition, en tant qu’ancien ministre des Finances, avait prévu des dotations budgétaires en 2012 pour des études relatives à ce projet. Il a accusé le leader de l’opposition de « vouloir protéger une minorité d’encanteurs aux dépens des planteurs ».
La tranche de la Private Notice Question (PNQ) a été marquée par de vifs échanges entre Shakeel Mohamed et le ministre Etienne Sinatambou. Le chef de file du Labour a accusé le ministre d’avoir proféré les propos suivants à son égard : « Get to mama ! ». De son côté, Etienne Sinatambou a avancé avoir réagi parce que le député de l’opposition « has shown his private parts to me ».
Sur intervention de la Speaker, le ministre a dû se rétracter. Maya Hanoomanjee a fait comprendre qu’elle devra visionner de nouveau les enregistrements vidéo de la séance pour confirmer cette affaire de « private parts » avant de décider de la marche à suivre. Les députés Ravi Rutnah et Adil Ameer Meea se sont échangés de manière véhémente « de la politesse parlementaire » avant que la Speaker ne les rappelle à l’ordre.
Shakeel Mohamed : Eu égard de la démission de l’ancien Premier ministre et de la nomination de Pravind Jugnauth en tant que tel le 23 janvier 2017, peut-il confirmer si le gouvernement a sollicité des avis légaux à ce sujet et de quelles sources légales ?
Ivan Collendavelloo : L’ancien Premier ministre a présenté sa démission à la présidente de la République le 23 janvier dernier. The President of the Republic acting in her own deliberate judgment appointed Pravind Jugnauth as Prime Minister. Un communiqué officiel fut émis à cet effet. There was no need to seek legal advice when sir Anerood Jugnauth resigned and Pravind Jugnauth was appointed as Prime Minister.
Une surprise
Mohamed : C’est clair qu’il y a une confusion dans l’air autour de cette passation de pouvoirs au poste de Premier ministre. Il y a la section 53 (3) de la Constitution et la clause 59. I’ve heard the Acting Prime Minister said that there was no need to seek legal. Peut-il confirmer qu’à aucun moment des avis légaux ont été sollicités, soit avant la démission de sir Anerood, soit avant la nomination de Pravind Jugnauth à la tête du gouvernement ? Peut-il confirmer ce détail ?
Collendavelloo : I’ve made it clear Madam Speaker I can repeat the answer : There was no need that means that no legal advice was sought.
Mohamed : Cette passation de pouvoirs (entre père et fils) fut comme une surprise pour tout un chacun. Ce deal n’a jamais fait l’objet de discussions. Cette affaire n’avait pas été “canvassed” pendant la campagne électorale ou encore entre partenaires de l’alliance…
Collendavelloo : Je ne vois pas la pertinence de cette question…
Mohamed : It is not for him to decide…
Speaker : Vous êtes un parlementaire d’expérience et vous savez pertinemment bien que the Speaker has no control over the replies of ministers.
Mohamed : Le Premier ministre se rappellera qu’au moment du lancement de son parti, le Muvman Liberater, en juin 2014, il avait fait du concept de “Freedom of Information” un de ses chevaux de bataille. Comment réconcilie-il cette position et le refus de répondre à cette présente interpellation supplémentaire ?
Le Premier ministre par intérim fait l’impasse au sujet de cette interpellation, ne daignant pas se mettre debout pour répondre, la Speaker passant à la PQ suivante à l’agenda.
En début de séance, et pendant 12 minutes, le ministre Seeruttun a donné des détails sur le projet du Central Wholesale Market à Belle-Rive. Ce marché de vente à l’encan devra être opérationnel à partir de juin 2018, les travaux sur le chantier démarrant en janvier 2018.
Seeruttun: Le National Wholesale Market Project a été évoqué dans le programme gouvernemental 2012-2015 pour améliorer l’accès aux marchés et pour apporter des facilités appropriées de ventes en gros et aux enchères. Il y a à présent trois marchés aux enchères régionaux, à Vacoas, Port-Louis et Flacq. Ces marchés aux enchères ne correspondent toutefois pas aux besoins du public pour les raisons suivantes : les marchés opèrent sans aucune infrastructure appropriée, ce qui impacte sévèrement la vente des fruits et des légumes lors des conditions climatiques défavorables. Il n’y a pas de facilités de stockage pour les marchants, et tous les fruits et légumes doivent être vendus sur le lieu, entraînant ainsi une fluctuation des prix.
À même le sol
Les facilités de stationnement ne sont appropriées ni pour les marchands ni pour le public, ce qui conduit à un sévère embouteillage dans la localité. Les conditions sanitaires et hygiéniques ne sont pas satisfaisantes. Les légumes et fruits sont en effet vendus à même le sol et sur la rue. Il n’y a pas de transparence dans le processus actuel d’appel d’offres utilisé dans ces marchés aux enchères. Il n’y a pas de sécurité, particulièrement au Port-Louis Auction Market à Trou Fanfaron et les planteurs qui doivent travailler là tard la nuit ou tôt le matin sont souvent victimes d’attaques et de vols de leurs produits et argent.
L’objectif du National Wholesale Market est de : construire l’infrastructure nécessaire pour les fruits et les légumes, pour l’après-récolte, pour la vente ultérieure, soit des infrastructures conformes à toutes les lois et normes agricoles et alimentaires existantes. Par ailleurs, créer un marché moderne; mettre en place un mécanisme juste et transparent pour la fixation des prix pour que les planteurs aient les meilleurs prix pour leurs produits ; apporter un système d’information moderne et accessible sur l’évolution des prix ; avoir une foire et une infrastructure qui soient entièrement en harmonie avec la Food Act.
Quelque 100 000 tonnes de légumes et de fruits sont produites annuellement. 60% sont vendus à travers les trois marchés aux enchères régionaux et les producteurs n’obtiennent que 30 à 40% du prix au détail final en retour. Avec le National Wholesale Market, les agriculteurs seront en mesure d’avoir de meilleurs retours sur leurs produits.
Des appels d’offres pour des services de conseil en vue de la mise sur pied du National Wholesale Market ont été lancés par l’Agricultural Marketing Board en juin 2013 et le contrat a été décerné au Cabinet Gressard Consultants en France en janvier 2014. Le rapport des consultants a été soumis en avril 2014.
Les consultants avaient des consultations avec les auctioneers ainsi que les planteurs et les autres acteurs, y compris les supermarchés, et ont visité les trois marchés à Port-Louis, Flacq et Vacoas pour prendre en compte les conditions qui prévalent. Les consultants ont recommandé la réorganisation de la vente en gros de fruits et de légumes au niveau national à travers la concentration des volumes en un seul endroit pour une meilleure efficacité, un partage des coûts entre opérateurs et des locaux modernes et adéquats. Parmi les autres recommandations, des terres de 8 arpents et un terrain additionnel de 5 arpents pour l’expansion future d’activités le long de l’autoroute M3 près de Verdun pour la création d’un National Wholesale Market d’environ 12 100 m2. Le site a été identifié par les consultants car il se situe près de l’autoroute et est lié au rond-point en provenance d’Ebène. De plus, il est facilement accessible à tous les usagers et peut recevoir des développements.
Un autre site
La construction du National Wholesale Market est en deux phases successives avec une superficie de stationnement de 27 500 M2.
Sont prévues la création d’une société d’investissement par le biais d’un partenariat public-privé pour un investissement autour de Rs 345 M pour la mise en oeuvre du projet; la création d’une société séparée de gestion de l’État en partenariat avec les organisations d’opérateurs de marché en gros pour la participation à la gestion du marché en gros; la collecte de péages et de loyers pour la maintenance; la promulgation d’une loi appropriée pour réglementer les activités du marché en gros au niveau national. Le projet serait géré par l’AMB et le coût de sa mise sur pied est estimé par les consultants à Rs 345 M.
Lorsque j’ai pris le poste de ministre, j’ai été informé que le site était réservé au projet de Verdun et était une propriété appartenant au Sugar Investment Trust et pourrait ne pas être accordé pour le projet. Un autre site a été identifié à Five Ways, Wooton, qui est également convenablement situé pour un tel projet.
Un appel d’offres ouvert pour les services de conseil pour la mise en place d’un marché national en gros a été lancé le 13 mai 2016. En novembre 2016, le contrat a été attribué à l’Association professionnelle Studio Valle Progettazioni et le contrat a été signé le 13 mars 2017 pour le montant total de Rs 11 655 000.
Une réunion consultative avec les parties prenantes sur la mise en place du projet a eu lieu le 3 septembre 2015 à Réduit à laquelle j’ai personnellement assisté. Les informations nécessaires sur le projet ont été divulguées avec les parties prenantes présentes dont les représentants de planteurs de toute l’île. Les personnes présentes ont posé des questions, et des éclaircissements nécessaires ont été donnés.
Concernant la première partie de la question, je dépose une copie de l’étude de faisabilité détaillée menée en 2014 par le Cabinet Gressard Consultants de France.
Ligne de crédit
S’agissant de la deuxième question, on m’informe que le coût du projet est maintenant estimé à environ Rs 370 M. Le projet sera entièrement financé sous la ligne de crédit du gouvernement de l’Inde. Il est attendu que le marché génère des revenus de Rs 22 M par an. En ce qui concerne le coût d’opération annuelle, il est attendu qu’il atteigne environ 15 millions d’euros et sera financé comme suit:
• frais de péage – Rs 1,4 M
• Location des étals – Rs 9,6 M
• Location des entrepôts – Rs 10, 955 M.

Les frais à facturer, tels que recommandés dans l’étude de faisabilité, sont les suivants:
• Frais de péage – allant de Rs 100 à Rs 1 000 par voyage.
• Location des étals à Rs 100 / jour.
• Location des étals aux enchères qui seront de Rs 300,000 par an.
• Location d’entrepôts – Rs 4 200 m2 / an.

Toutefois, ces frais sont encore à l’étude et aucune décision finale n’a été prise.
Quant à la dernière question, l’appel d’offres pour la conception, la construction et la supervision a été attribué le 13 mars 2017. L’appel d’offres pour les travaux de construction devrait être lancé en octobre 2017. L’attribution du contrat sera effectuée vers la première semaine de janvier 2018. Les travaux de construction devraient durer quelque 18 mois. Le projet devrait être achevé d’ici juin 2019. Le marché sera donc opérationnel après cette date.
À l’heure des interpellations supplémentaires, le leader de l’opposition s’est évertué à faire la démonstration que le Central Wholesale Market à Belle–Rive se résumera à « un éléphant blanc » ou tout au plus occasionnera un gonflement des prix des fruits et légumes en raison des coûts additionnels pour le va-et-vient des cargaisons au point central et ensuite vers les points de vente au détail. Il a plaidé pour une révision de ce projet en tenant en ligne de compte les préoccupations des Stakeholders dans la production de fruits. Le ministre de l’Agro-Industrie a maintenu que  « the Central Wholesale Market Place is to provide consumers with produces at the best price ».
Xavier-Luc Duval : Une des préoccupations des planteurs est cette compétition avec les gros producteurs des propriétés sucrières. Y va-t-il d’une question de “Fairness” ?
Mahen Seeruttun : Tel est le cas avec les trois points de vente à l’encan régionaux. We have not heard of any abuses.
XLD : Quelles seront les heures d’ouverture de ce point central d’encan ?
Seeruttun (hésitant) : Tous les jours, during daytime. I would say. As from 7…
XLD : The minister should know. He should master his subject. Ne sait-il pas que ces opérations se font « at odd hours » ?
Le ministre poursuit ses explications en rappelant que sur 6 309 planteurs de fruits et légumes enregistrés, 1 453 sont de l’Ouest du pays et 1 240 du Sud, soit 42%. Il fait alors état des facilités d’accès de différents points de l’île avec l’infrastructure routière en place.
XLD : My question remains. 58% des planteurs sont éloignés de ce Central Wholesale Marketplace. Would it not be smarter to have regional markets rather than this white elephant ?
Seeruttun : We are the government. Pendant des années, ce projet était en discussion. En 2008/09, le ministre des Finances d’alors…
À ce moment survient une violente prise de bec entre Shakeel Mohamed et des députés de la majorité, dont Pradeep Roopun et Etienne Sinatambou, ce dernier devait lancer en direction du député rouge :
La tet touni…
Sinatambou : Mo ramas twa, to papa, to gran-pere…
Mohamed : Eta la tet touni…
Seeruttun : The then minister of Finance…
Mohamed (furieux) : Madame la Speaker, je voudrais présenter un “point of order”. Quel type d’homme est-il pour dire “get to mama” ? Shame on him !
Un gros brouhaha se fait entendre des deux côtés de la Chambre alors que le député Ravi Rutnah reprend à son tour.
Rutnah (en direction d’Ameer Meea) : Al gore !
Le député Meea lui donne la réplique sur un ton agressif. Entre-temps, le ministre Sinatambou s’est levé pour s’expliquer auprès de la Speaker.
Mohamed : Il a parlé de ma mère. Shame on him ! Li koz mo mama e li donn ekplikasyon ? Withdraw !
Sinatambou : Je pense que tous les membres de cette partie de la Chambre ont vu qu’il m’a montré ses parties intimes.
Mohamed : Imbécile, al invante do !
Speaker : Please withdraw if you have said…
Sinatambou : Je retire ce que j’ai pu dire mais je pense qu’il ne peut montrer ses parties intimes à un membre de cette Assemblée.
Seeruttun (reprenant sa réponse) : Il y a eu le budget de 2008/09. Puis il y a le paragraphe du programme gouvernemental PTr/PMSD de 2012/2015, où ce projet a figuré. En 2012, en tant que ministre des Finances, l’actuel leader de l’opposition avait prévu des fonds dans le budget pour ce projet. Il y a 6 300 petits planteurs. He is defending 80 auctionneers. Je suis allé à Port-Louis aux petites heures du matin pour voir comment cela se passe à Port-Louis. Il a été à Flacq à 4h. Tout ce qu’il dit relève de la démagogie de sa part…
Speaker : Last question…
XLD : Le ministre a pris dix minutes pour répondre à une interpellation supplémentaire. What can I do ?
Maya Hanoomanjee intervient alors pour donner des explications sur le temps imparti pour la PNQ.
XLD : Je suggère que vous ayez un contrôle sur la longueur des réponses des ministres… He made some political points. Il se couvre de ridicule. Il est déconnecté de la réalité. Cette question émane des planteurs. Il n’est nullement question d’encanteurs…
Speaker : You are making a statement ! Ask your question..
XLD : Il a fait une déclaration politique. Il est en train de décourager les petits planteurs…
Speaker : Ask your question.
XLD : Je vais demander au ministre de m’expliquer comment il va décourager les membres de la communauté des planteurs âgés de 50 et 60 ans de ne pas abandonner leurs activités aux champs.
Seeruttun : Nous mettons à exécution les recommandations du rapport. C’est une surprise pour moi de voir le PMSD…
Speaker : You have to be brief. Time is almost over.
Seeruttun : C’est la première fois que le PMSD s’intéresse au sort des petits planteurs. He is trying to explain then fears of those who are exploiting the small planters.

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