PROPOSITIONS BUDGÉTAIRES: Entre scepticisme et espoir…

Chaque année, les consultations prébudgétaires sont l’occasion pour syndicats, secteur privé et autres Ong de venir faire part de leurs propositions au ministre des Finances. S’il est bien logique que le grand argentier ne peut implémenter toutes les idées, certains représentants de ces organisations ont fini par être sceptiques au fil des années. Surtout les représentants, qui viennent avec toute une liste de suggestions, dont très peu sont retenues, quand ce n’est pas rien du tout. Si certains ont décidé de ne pas participer à ces consultations et d’envoyer leurs propositions par écrit, d’autres veulent « donner une chance à Pravind Jugnauth, qui est cette année, à la fois ministre des Finances et Premier ministre ». Quant à Raj Makoond, du secteur privé, cet exercice de consultations est « vital pour une meilleure compréhension des grandes perspectives de l’économie ».
Venir avec une longue liste de propositions, participer aux consultations où, fait ressortir par exemple Mosadeq Sahebdin, de la Consumer Advocacy Platform (CAP), « on n’a droit à la parole que pendant deux minutes » pour ensuite voir les points forts de son plaidoyer ne pas être retenus, peut lasser au fil des ans. C’est ainsi que le président de la CAP a décidé cette année de ne pas répondre à l’invitation du ministre des Finances. « L’année précédente, lorsque Vishnu Lutchmeenaraidoo était ministre des Finances, on avait invité les syndicats et les Ong ensemble. C’était un vrai bazar. Imaginez une centaine d’Ong s’occupant d’une palette de problèmes – dont des handicapés, des épileptiques, etc. –, sans compter des associations de jeunesse et d’autres centrées sur la protection de l’environnement… Et quand on a été appelé à prendre la parole, ce n’était que pour deux minutes. Mais que pouvons-nous dire en deux minutes ? Autant soumettre les propositions sur papier. Il y a une absence de dialogue dans cette réunion. On fait semblant de noter les points, mais après… » N’empêche que, nuance-t-il, « c’est une opportunité pour sensibiliser et poser les questions nécessaires, provoquer des réflexions, même si les propositions ne sont pas retenues » tout de suite. « Prenez l’exemple de la Sunset Clause sur les Rs 4 qui vont dans le Build Mauritius Fund. Même si la demande n’a pas été retenue, l’idée revient à chaque fois. C’est un moyen pour nous d’interpeller l’opinion publique. »
Le Chief Executive Officier de Business Mauritius, Raj Makoond, ne se range pas de cet avis. Pour lui, il s’agit d’une rencontre « capitale » où « le processus d’échanges est très important pour une meilleure compréhension des grandes perspectives » de l’économie. « Nous pensons qu’il faut accroître le taux d’investissement et mettre l’accent sur la productivité, qui peut impacter sur l’économie. » Ces consultations, selon lui, « nous permettent d’expliquer nos différents points de vue et, éventuellement, ces points seront intégrés dans les décisions finales », ajoutant : « Pour nous, cet exercice est vital pour un meilleur éclaircissement des enjeux de l’économie. Nous pensons que cela aidera à un budget qui encouragerait l’investissement. »
Pour sa part, Rashid Imrith, de la All Employees Federation, relève une différence cette année. « Les ministres des Finances ont l’habitude de dire que leurs mains sont liées. À l’exception de la fois où sir Anerood Jugnauth était à la fois ministre des Finances et Premier ministre et où il avait pris des décisions qui avaient porté leurs fruits, à l’instar du National Saving Fund, cette fois, c’est la deuxième fois que le ministre des Finances est aussi Premier ministre. Nous lui donnons donc une chance, mais the proof of the pudding is in the eating… Cette fois, le ministre des Finances n’aura pas de raison de dire que le cabinet n’a pas accepté. »
Le président de la FCSOU, Narendranath Gopee, se console de son côté des propos de Pravind Jugnauth. « Il a dit que même si le gouvernement ne retient pas nos propositions, il aura pris en considération l’importance des projets sur le court terme et que cela ne voudra pas dire qu’on rejette nos propositions mais que celles-ci seront implémentées au long terme. » Il invite toutefois le ministre des Finances à venir dire quel est le type de propositions qui peut être implémenté à court terme. « Par exemple le salaire minimum ou la révision du salaire des employés qui travaillent sur contrat et qui n’ont que Rs 1 800 par mois. Ou encore revoir la taxe pour les parents qui ont des enfants de plus de 18 ans et qui sont chômeurs. En effet, certains ont terminé leurs études universitaires et doivent dépendre sur leur famille pour vivre. Nos feuilles d’impôt ne font pas provision pour ces enfants. Mais je pense qu’on doit faire confiance aux paroles du ministre des Finances, qui est aussi Premier ministre. Je pense que ce qu’il dit lors des consultations bipartites dans le budget a sa valeur. Nous suivrons les mesures qu’il implémentera à court terme lors du prochain budget et nous estimons que le salaire minimum doit être une des mesures. »
Radakrishna Sadien, président de la Government Services Employees Association, abonde dans le même sens en se disant convaincu que cette année, le fait que le grand argentier est aussi Premier ministre fera la différence. « Il y a aussi des éléments qui justifient nos demandes et nous avons eu l’occasion d’expliquer cela au ministre des Finances, au ministre du Travail et aux conseillers. Nous avons mis en avant des problèmes de société, tels le chômage, et nous avons souligné l’importance d’avoir une stabilité sociale pour avoir des développements économiques. J’ai dit qu’il ne faut pas oublier la toile de fond, c’est-à-dire le chômage, l’éducation, les travailleurs étrangers… Nous avons voulu laisser la chance au gouvernement, qui tient un discours sur le dialogue social et sur la démocratie participative. Nous ne doutons pas de la sincérité du gouvernement mais nous ne pourrons émettre une opinion sur les propositions retenues qu’une fois son discours budgétaire prononcé. Nous donnons la chance au comité. On ne peut décliner l’invitation d’un ministre. Le Premier ministre a noté les points soulevés. Selon moi, le fait que le ministre des Finances soit aussi le PM fera la différence. »

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