Raffick Bahadoor: « On nage en pleine sécheresse, avec un poids sur le dos »

« On nage en pleine sécheresse avec un poids sur le dos. » C’est ainsi que Raffick Bahadoor, président de la Taxi Proprietor’s Union (TPU), décrit la situation des chauffeurs de taxi en ce moment. Malgré la hausse des prix du carburant, il conseille à ses membres de ne pas augmenter leurs tarifs, les Mauriciens ayant en effet à faire face à une hausse du coût de la vie. Le président de la TPU se dit en outre en désaccord avec les priorités établies pour le Taxi Proprietors Welfare Fund. Raison pour laquelle le mot d’ordre qu’il adresse à ses membres est de « ne pas payer la cotisation de Rs 300, mais juste le droit d’entrée », à Rs 200. Dans cet entretien, Raffick Bahadoor se dit aussi à la recherche d’une rencontre avec le ministre du Transport, Alan Ganoo, afin de lui exprimer sa désapprobation quant au mode de fonctionnement de ce fonds de bien-être, et où « aucun représentant de chauffeurs de taxi ne siège ». Le board de ce fonds « est constitué de “yes men” », avance-t-il, avant de remettre les pendules à l’heure à l’intention de ceux pour qui « sofer taksi tir lavi ».

- Publicité -

Dans quelles conditions opèrent les chauffeurs de taxi actuellement ?

Nous faisons face à des problèmes spécifiques qui n’existaient pas auparavant. Le Covid-19 est le premier exemple, mais il y a aussi le métro. Puis la concurrence et certaines décisions prises par les autorités, qui ne répondent pas à nos aspirations. Tous ces facteurs jouent à l’encontre des intérêts des chauffeurs de taxi. En sus de cela, les prix des commodités ont pris l’ascenseur. J’ai d’ailleurs entendu dire tout récemment que les prix du riz Basmati et des grains secs vont encore augmenter. Question : comment les gens retiendront les services des chauffeurs de taxi ? N’oublions pas que ce sont plus particulièrement les gens qui n’ont pas de moyens de transport qui ont recours à ces services. En plus de cela, les prix du carburant ont flambé à la pompe. Tout cela pèse lourd sur le dos des chauffeurs de taxi. L’année dernière, j’avais déjà dit que les chauffeurs de taxi « pe voyaz dan sek ». Eh bien en 2022, je dirai qu’on est en train de « nager en pleine sécheresse, avec un poids sur le dos ».

Vous avez évoqué la hausse des prix des carburants. Les chauffeurs de taxi envisagent-ils de revoir leurs tarifs ?

Il faut d’abord se poser la question : qui n’a pas envie d’avoir plus d’argent tous les jours ? Tout le monde rêve de cela. D’ordinaire, les gens cherchent à obtenir de l’argent en vendant leurs services ou leurs produits. Mais ma réponse, dans le contexte actuel, est qu’il est impossible de procéder à une majoration de nos tarifs. Si on va de l’avant avec une hausse, alors on retirerait ce poids de nos dos pour le mettre sur celui de nos passagers. Résultat : si on majore nos prix, le peu de clients qu’il nous reste disparaîtra.

Il ne faut pas oublier que 80% de notre travail a été affecté. Either you survive or you die. Si on augmente nos prix, on signe notre arrêt de mort. Nous préférons gagner peu plutôt que de nous embarquer dans l’expectative. C’est sûr que je rentrerai bredouille ou avec deux trois « local » à la maison en cas de hausse des tarifs. Comment ferais-je alors pour nourrir ma famille ?

Il y a cette perception dans le public que les chauffeurs de taxi « tir lavi ». Que répondez-vous à cela ?

Le public doit savoir que les apparences sont souvent trompeuses. Actuellement, un taxi prend Rs 50 pour un passager de Flacq allant à Port-Louis. Si l’on compte six personnes dans un véhicule, cela fait donc Rs 300. Mais il faut aussi que le chauffeur trouve six autres personnes pour retourner à Flacq pour couvrir son trajet.

Les chauffeurs sont en train de pratiquer le collectif pour survivre à Port-Louis et dans sa périphérie. Faute de quoi ils ne peuvent survivre. À partir de Baie-du-Tombeau, un passager paie Rs 20. Avec quatre personnes, cela fait donc Rs 80 pour aller à la Gare du Nord. Dès lors, comment peut-on conclure que « sofer taksi pe tir lavi » avec un tel tarif ? Car il doit retourner à son point de départ pour obtenir Rs 160 à Rs 200.

Cette perception selon laquelle « Sofer taksi tir lavi » est véhiculée par les chauffeurs de taxi marron pour que les gens ne voyagent pas dans les taxis traditionnels. D’ailleurs, la responsabilité du gouvernement est aussi engagée en ce qu’il s’agit de mettre de l’ordre dans les taxis marrons. Au lieu de donner des patentes dans 126 endroits, le ministre du Transport, Alan Ganoo, ferait mieux de mettre de l’ordre parmi les opérateurs illégaux. Maintenant, on entend dire que le ministre a autorisé les propriétaires de vans à prendre des passagers là où il n’y a pas d’autobus. C’est encore une autre manière de tuer les taxis. C’est pourquoi je dis que certaines décisions prises au niveau du ministère sont irréfléchies. Le ministre écoute juste ses Advisers. Je lui rappellerais que si l’ancien ministre Anil Bachoo a eu des démêlés dans le passé, c’est justement à cause de ses Advisers, grâce à ces nominés politiques qui ne disent pas la vérité au ministre. Vinn zis pas lamin lor ledo, vinn fer krwar ki tou korek. Car leur job est en jeu. C’est eux qui sont finalement en danger.

Avez-vous sollicité une rencontre avec le ministre Ganoo pour évoquer toutes ces questions ?

Oui, il y a deux semaines environ. Il m’a dit qu’il demanderait à sa secrétaire de prendre contact avec nous pour évoquer nos problèmes. À l’heure où je vous parle, des gens sont en Angleterre et en Italie, et « patant pe roule lor zot nom ». C’est là où le ministre du Transport devrait intervenir, au lieu de donner de nouvelles patentes aux agents des partis politiques. Toutes ces nouvelles patentes qui seront accordées seront octroyées à des agents, car il n’y a pas de pénurie de taxis dans le pays. Si on donne de nouvelles patentes, c’est pour satisfaire ces derniers, car pendant trop longtemps, « pa finn gayn narien ar zot ». Voilà la politique du ministère du Transport.

Je détiens des informations à l’effet que des gens ayant des patentes de taxi ont immigré à l’étranger. Ce n’est pas du tout correct dans le sens où ils obtiennent des revenus en euros et bénéficient de facilités hors taxes pour l’achat de voitures à Maurice. Je défie le ministre du Transport de venir mettre de l’ordre dans ces agissements. Nous disposons d’une liste de personnes opérant comme cela. Rien qu’à la gare Victoria, il y en a quatre, dont je peux même donner les numéros d’immatriculation des véhicules. Le ministre du Transport doit pouvoir mettre bon ordre dans le transfert des patentes par voie de succession.

Je suis d’accord pour une succession à l’épouse d’un chauffeur de taxi dont le mari est décédé, car elle a besoin de cette patente pour vivre. Mais pas quant à la succession aux enfants, qui travaillent déjà dans bann gran gran plas, ce qui est un non-sens. Je connais un cas à Vallée-des-Prêtres. Cette personne travaille chez Air Mauritius et se bat avec la National Land Transport Authority pour avoir le droit de succession ? Je profite de l’occasion pour féliciter la direction de la NLTA, car elle n’est pas d’accord avec ce droit de succession. Ce n’est pas ce qu’on pourrait dire un double emploi, mais carrément mener le rôle de « jouisseur ». Et il y en a beaucoup à Maurice.

Le gouvernement a accédé à votre requête pour la mise sur pied d’un Taxi Operators Welfare Fund. Êtes-vous satisfait ?

Il y a 20 ans, des chauffeurs de taxi s’étaient réunis car certains se faisaient souvent agresser. Quelques-uns ont même perdu la vie. Lorsque je me rendais aux funérailles, je voyais les membres de leur famille dans la désolation. D’autant que les chauffeurs décédés avaient des emprunts non payés à la banque, des enfants en bas âge ou encore des épouses sans emploi. Je voulais faire quelque chose. À l’époque, une cigarette coûtait Rs 5 à Rs 7. J’ai donc eu l’idée est de créer un Welfare Fund avec la contribution du prix d’une cigarette par jour. Nous sommes arrivés à la conclusion qu’avec une contribution de Rs 10 par jour, on pourrait mettre sur pied ce projet. J’ai rédigé une ébauche et je suis allé voir des politiciens. Je remercie en passant un vieux militant de Plaine-Verte, qui est allé voir le MSM pour réclamer la mise sur pied de ce fonds. Le projet a finalement été pris en l’état dans le manifeste électoral du parti.

Après les dernières élections, j’ai écrit au ministre Ganoo pour mettre en chantier ce fonds, et il a répondu positivement à notre demande, malgré le fait que le pays a été durement frappé ces deux dernières années par le Covid-19. Il travaille dur sur ce dossier. On a demandé aux chauffeurs de consentir à une contribution de Rs 300 mensuellement et une entrée comme membre à Rs 200. Lorsque la loi ayant trait à la création de ce fonds a été votée, le ministre a malheureusement nommé « so bann dimounn ». Mais les personnes qui ont été nommées n’ont pas le même enthousiasme et ne savent pas grand-chose en ce qui concerne le bien-être. Et le ministre Ganoo a eu l’audace de ne pas nommer de membre du syndicat des chauffeurs de taxi à ce fonds. Selon lui, les frontliners ne devraient pas faire partie de ce fonds. Je n’ai jamais entendu une telle absurdité.

J’attire l’attention du ministre Ganoo sur le fait que « enn bo per res enn bo per, et enn papa res enn papa ». Et la TPU est le père de ce fonds de bien-être. Et le beau-père peut à n’importe quelle heure quitter la maison pour partir. Mais un père ne laissera jamais tomber ses enfants. Je crois que cette philosophie doit rester bien ancrée dans la tête du ministre Ganoo. Durant ma carrière, j’ai vu beaucoup de ministres du Transport. D’autres viendront et d’autres partiront, mais les chauffeurs de taxi, les syndicats de taxis et ce fonds de bien-être, eux, demeureront.

Par ailleurs, lorsque quelqu’un part, il doit le faire avec honneur. Je dis cela car une personne a été nommée et ne s’est pas présentée aux réunions du conseil d’administration du fonds pendant quatre semaines. Il y a aussi une section de la loi régissant le fondement de ce fonds, et sur laquelle nous ne sommes pas du tout d’accord. Mais avec une simple majorité, le conseil peut prendre des décisions sur notre tête. La TPU n’est pas d’accord avec cette pratique et nous demanderons de ne pas payer la contribution de Rs 300 aussi longtemps que ne nous ne saurons pas ce à quoi nous aurons droit en termes de priorités.

Maintenant, le conseil d’administration vient de nous envoyer un document, qui évoque nos conditions de travail, alors que tout le monde sait que cela concerne plutôt le ministère du Travail. Il parle aussi de la santé de nos familles. C’est quoi cela ? Il parle aussi de l’éducation des chauffeurs de taxi. Tout cela est farfelu. Sans compter que le document évoque aussi les facilités d’emprunts alors que nous obtenons déjà ces facilités auprès des institutions bancaires. Quid encore du « cadeau » pour la maternité. Ils croient qu’un enfant de chauffeur de taxi nait chaque jour ? En fait, ils oublient ce dont nous avons besoin. Je leur rappellerai que la priorité des chauffeurs, ce n’est pas ce qu’ils gagneront demain, mais ce qu’ils vont gagner aujourd’hui. L’assurance-vie et l’assurance-santé, le “discount” sur le “servicing”… Ce ne sont pas nos priorités. Quant au système de patentes, il n’est pas bon du tout. Autrefois, il fallait suivre un cours avant d’obtenir une patente de taxi.

Vous avez aussi des propositions en cas de décès de chauffeurs de taxi, non ?

Nous avons réclamé la subvention pour les funérailles. Cela est inscrit comme la dernière priorité de ce fonds de bien-être. J’avais demandé qu’en cas de décès d’un chauffeur de taxi, le fonds soit en mesure d’accorder une somme de Rs 200 000 à la famille du défunt. C’est cela notre première condition. Rs 200 000, ce n’est pas la mer à boire, car il existe dans le pays 7 000 chauffeurs de taxi. Avec un droit d’entrée de Rs 200, cela vous fait Rs 1,4 million. Maintenant, lorsqu’on ajoute la contribution de Rs 300 par chauffeur, cela vous donne Rs 2,1 millions mensuellement, et pendant 12 mois, cela fait Rs 25 millions. En y ajoutant Rs 1,4 million, on arrive donc à plus de Rs 26 millions pour un an.

En un an, on arrive à exactement Rs 26,4 millions et, même si une cinquantaine chauffeurs décèdent, à un intervalle d’un décès par semaine, cela fait un décaissement de Rs 10 millions par an sur un fonds de Rs 26,4 millions, qui de plus continue d’être alimenté. Aussi, que l’on ne vienne pas me dire que Rs 200 000 est « cher payé ». Il faut revoir la liste des priorités de ce fonds. Si zot pa konn lir sa, be dir zot vinn dan mo lekol. Il faut écouter la voix des syndicats. Nous ne sommes pas en train de dire que nous allons guider le fonctionnement de ce fonds. Il faut plutôt qu’il y ait un travail en parallèle pour le bien-être des chauffeurs.

Nous avons ainsi décidé au niveau de notre comité d’envoyer une lettre au ministre Alan Ganoo pour une réunion en présence de la direction de ce fonds. Nous savons qu’ils ont nommé tous des “yes men” au sein de ce comité, et au niveau du syndicat, nous n’acceptons pas ce genre de personnes. La direction de ce comité doit nous soumettre une liste indiquant où les priorités démarrent, et ce n’est pas nous qui allons dire quand elles se terminent.

Après avoir obtenu satisfaction, on demandera aux chauffeurs de contribuer à hauteur de Rs 300. Mais pour le moment, notre mot d’ordre est de se faire enregistrer auprès du Taxi Proprietors Welfare Fund et de ne pas contribuer. Il faut bien nous comprendre. Nous ne contestons pas l’existence de ce fonds, mais plutôt son mode de fonctionnement. Nous demandons donc aux chauffeurs de taxi d’attendre le mot d’ordre et de ne pas faire de paiement à la va-vite et que, demain, ils ne viennent pas reprocher au syndicat de les avoir laissé tomber. Les avantages que propose le fonds aux chauffeurs peuvent prendre dix ans avant de se concrétiser. Et je ne veux surtout pas que cela en soit ainsi.

J’avais demandé au gouvernement d’inclure quatre ministères au sein de ce comité, mais ils y ont mis les représentants du ministère du Transport, du ministère des Finances, de la NLTA et du ministère du Travail pour que ce comité soit redevable. Et maintenant, le fonds payera le Chairman Rs 25 000 à Rs 30 000 par mois. Donc, on me dit de travailler nuit et jour pour honorer le salaire du Chairman d’après les dispositions du PRB. Et là, j’apprends que certains sont juste payés pour mettre sur pied ce comité de gestion. Cela signifie donc qu’on est déjà en train de puiser dans le fonds de Rs 800 000.

Je le redis. Si on paie Rs 200, on arrive à Rs 3,4 millions, et si on y ajoute la contribution de Rs 300, le fonds sera assez costaud pour accorder tout de suite une somme de Rs 200 000 à chaque famille comptant un chauffeur de taxi décédé. Cela dit, qu’on ne vienne pas nous dire qu’on offrira cette somme. Nous n’avons pas confiance aux politiciens. C’est pourquoi nous ne sommes pas d’accord avec cette section de la loi, qui parle d’une simple majorité pour changer les dispositions de cette même loi. Selon nous, quatre chauffeurs doivent siéger avec les quatre représentants du gouvernement au conseil d’administration de ce fonds. Il faudrait aussi que le vote soit unanime pour prendre les décisions qui s’imposent. La loi doit être amendée.

Le gouvernement vient de décider de réduire les limitations de vitesse dans les villes et villages. Qu’en pensez-vous ?

Les Nations unies ont estimé que la vitesse devait être réduite à 30 km/h dans les grandes villes. Mais c’est quoi, une grande ville ? En fait, ils parlent surtout de villes aux États-Unis, en France, en Angleterre, en Allemagne, en Belgique, bref des villes où vivent des millions de personnes. Elles ne parlent certainement pas des villes qui sont mortes à partir de 17h. Je mets au défi les ministres et députés de rouler de 30 km/h à 40 km/h. Avec une telle mesure, tout le monde aura droit à une contravention. C’est peut-être le modèle économique du gouvernement pour « tir kas ek dimounn ». Je demande au gouvernement de vérifier les panneaux indicateurs aux ronds-points pour voir si les conducteurs ont une bonne visibilité quant à l’endroit où ils se dirigent. La ville de Quatre-Bornes est un bon exemple, plus particulièrement la route Bassin, qui mène à La Louise. Des “No-Entry” sont cachées par des arbres. Il y a aussi plein de nids de poule.

On parle souvent d’accidents impliquant des motocyclettes. On entend toujours que « l’enquête suit son cours », mais on n’explique jamais les causes de l’accident. Or, dans bien des cas, c’est en raison des infrastructures routières. A la rue d’Entrecasteaux, les gens marchaient autrefois sur les trottoirs, mais aujourd’hui, les trottoirs servent à garer les véhicules. La même chose prévaut Route des Pamplemousses. Et comment expliquer que des chauffeurs de camion continuent de faire usage de drapeaux rouges… en 2022 ? Le soir, c’est encore pire. Les phares de certains camions sont identiques à ceux des motocyclettes.

Dans quelle mesure le métro affecte-t-il les activités des chauffeurs de taxi ?

Le métro fait partie de cette chaîne « kot nou pou maye ». Lorsque le métro fera le trajet Port-Louis/Curepipe, il deviendra un concurrent direct pour nous.

Des cas de « hit and run » sont souvent rapportés. Que préconisez-vous pour lutter contre ce fléau ?

J’aurais aimé que le ministre du Transport vienne y répondre. Il faudrait, dans ce genre de cas, que les autorités puissent suspendre le permis de conduire du contrevenant jusqu’à ce que la cour donne son jugement. Il faut agir vite si on veut diminuer le nombre de morts sur nos routes. Or, ceux qui ont les moyens peuvent payer leur caution et reprendre immédiatement le volant, des fois même au même moment que se déroulent les funérailles de leur victime. Est-ce normal ? Pour les conducteurs qui n’ont pas de permis et qui tuent des gens, je propose qu’ils ne puissent obtenir de permis de conduire pendant au moins 15 ans.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -